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Genese de la cuisine..

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Pierre-Georges Roy re<strong>la</strong>te les observations d’un officier militaire français sur <strong>la</strong><br />

<strong>cuisine</strong> d’hiver traditionnelle peu avant <strong>la</strong> chute du Canada : « Déjà en 1755, l’officier<br />

d’Aleyrac remarquait que <strong>la</strong> vie et les précautions <strong>de</strong>s Canadiens pour l’hiver<br />

sont comparables à celles <strong>de</strong>s fourmis. Ils se pourvoient disait-il, <strong>de</strong> tout pour ce<br />

temps durant l’été. Ils tuent tout ce qui leur faut <strong>de</strong> novembre à <strong>la</strong> fin d’avril, où<br />

<strong>la</strong> neige et le dégel cessent. Ils accumulent leurs vian<strong>de</strong>s comme s’ils vou<strong>la</strong>ient<br />

les manger dans un seul repas, les mettent dans un grenier où elles gèlent et se<br />

conservent. Quand ils veulent en manger, ils les font dégeler auprès du poêle et <strong>la</strong><br />

préparent ensuite comme si <strong>la</strong> bête venait d’être abattue, car <strong>la</strong> vian<strong>de</strong> est aussi<br />

fraîche et bonne qu’alors. Le <strong>la</strong>it y gèle en hiver <strong>de</strong> telle manière qu’on le porte<br />

dans <strong>de</strong>s sacs pour le vendre à <strong>la</strong> ville 48 . »<br />

L’Ancien Canadien survit avec ses traditions. « L’abondance copieuse et grasse,<br />

<strong>la</strong> gaieté vive et enjouée, <strong>la</strong> politesse toute cordiale et simple, voilà ce qui faisait<br />

le charme <strong>de</strong>s festins du bon vieux temps, que se donnaient les uns les autres,<br />

pendant les longs mois d’hiver, les habitants <strong>de</strong> nos campagnes. Heureux temps<br />

où l’acceuil gracieux <strong>de</strong>s maîtres suppléait au luxe <strong>de</strong>s meubles du ménage, aux<br />

ornements dispendieux <strong>de</strong>s tables, chez les Canadiens ruinés par <strong>la</strong> conquête ! Les<br />

maisons semb<strong>la</strong>ient s’é<strong>la</strong>rgir pour les <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> l’hospitalité, comme le cœur <strong>de</strong><br />

ceux qui l’habitaient 49 ! » rappelle Camille Roy, critique littéraire originaire <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

Côte-du-Sud.<br />

Cuisiner est l’une <strong>de</strong>s principales occupations durant l’hiver. Les hommes<br />

travaillent dur au bûchage <strong>de</strong> bois et se nourrissent d’une alimentation roborative.<br />

Le cinéaste Pierre Perrault décrit un retour <strong>de</strong> bûcherons à <strong>la</strong> maison, vu par <strong>de</strong>s<br />

yeux d’enfant : « À l’arrivée, un soir inattendu, <strong>de</strong> ces hommes éblouissants, <strong>de</strong> ces<br />

pères bril<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> soleil et <strong>de</strong> neige, <strong>de</strong> ces grands frères arrogants et fantasques,<br />

tous ébourrifés <strong>de</strong> barbes hirsutes, <strong>la</strong> poche sur le dos, le juron juste, <strong>la</strong> voix forte,<br />

qui envahissent les <strong>cuisine</strong>s <strong>de</strong> récits po<strong>la</strong>ires, <strong>de</strong> chasse-galerie, <strong>de</strong> chansons et <strong>de</strong><br />

nostalgies fiévreuses. L’enfant regar<strong>de</strong> ces hommes, grands comme <strong>de</strong>s arbres, qui<br />

ne sont pas en carton, <strong>de</strong>s héros qu’on n’a pas loué aux Américains pour célébrer<br />

une liturgie olympique, <strong>de</strong>s héros <strong>de</strong> chair et <strong>de</strong> sang, <strong>de</strong> sa délignée, en bottes<br />

<strong>la</strong>cées, qui éc<strong>la</strong>boussent toutes les monotonies 50 . »<br />

L’atmosphère <strong>de</strong> bonne chère rend <strong>la</strong> maisonnée très gaie, invitante. On se sent<br />

bien. Rien n’égale l’arôme <strong>de</strong>s soupes chau<strong>de</strong>s, du poulet qui rôtit, du gâteau sortant<br />

du four, ou du choco<strong>la</strong>t chaud que les enfants boivent en revenant <strong>de</strong> l’école<br />

186 genèse <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>cuisine</strong> québécoise

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