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Genese de la cuisine..

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qui vous soit interdite, on vous sert d’énormes poissons à <strong>de</strong>ux reprises. Êtes-vous<br />

rassasiés <strong>de</strong>s premiers, on vous en offre d’autres qui vous font oublier que vous<br />

avez goûté les précé<strong>de</strong>nts. Tout est préparé avec tant <strong>de</strong> soins et d’art culinaire, que<br />

lorsqu’on a dévoré quatre ou cinq p<strong>la</strong>ts, les premiers n’empêchent pas les nouveaux<br />

<strong>de</strong> passer, et <strong>la</strong> satiété ne diminue pas l’appétit. Le pa<strong>la</strong>is, stimulé par <strong>de</strong>s sauces<br />

<strong>de</strong> nouvelle invention, sent à tout moment comme s’il était à jeun, se réveiller ses<br />

désirs. L’estomac se charge sans qu’on y pense et <strong>la</strong> variété prévient le dégoût. Et<br />

parce que nous sommes dégoûtés <strong>de</strong>s nourritures pures qu’a créée <strong>la</strong> nature, nous<br />

les mé<strong>la</strong>ngeons les unes aux autres <strong>de</strong> toutes les façons et, méprisant <strong>la</strong> nature <strong>de</strong>s<br />

choses, <strong>la</strong> gourmandise est excitée par <strong>de</strong>s saveurs falsifiées. À peine sommesnous<br />

moines, nous voilà ma<strong>la</strong><strong>de</strong>s <strong>de</strong> l’estomac ! Après ces repas, on se lève <strong>de</strong> table<br />

les veines gonflées, <strong>la</strong> tête lour<strong>de</strong>, et pour quoi faire sinon dormir ? »<br />

Il faut nuancer. Léo Moulin commente : « Sans commettre l’erreur <strong>de</strong> les<br />

réduire à l’image <strong>de</strong> gloutons, gourmands, buveurs et pail<strong>la</strong>rds que <strong>la</strong> polémique<br />

nous a <strong>la</strong>issée, on peut dire que, ne serait-ce que pour lutter contre <strong>la</strong> monotonie,<br />

ils ont été bien vite amenés à varier et à raffiner leur menu 83 ». Voilà qui démolit<br />

l’opinion que « leurs abbayes sont proprement <strong>de</strong>s « Temples <strong>de</strong> <strong>la</strong> gloutonnerie ».<br />

Il est vrai que le Pa<strong>la</strong>is <strong>de</strong>s papes à Avignon et surtout <strong>la</strong> <strong>cuisine</strong> <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong><br />

Fontevrault, avec son immense cheminée centrale f<strong>la</strong>nquée <strong>de</strong> plusieurs autres<br />

cheminées auxiliaires distribuées tout autour <strong>de</strong> <strong>la</strong> salle, véritables cathédrales <strong>de</strong><br />

l’art culinaire, ont prêté f<strong>la</strong>nc à ces attaques. Pourtant, l’ordinaire <strong>de</strong>s bénédictins<br />

n’est composé que <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux p<strong>la</strong>ts, trois si <strong>de</strong>s légumes sont disponibles.<br />

Samuel Pegge, auteur <strong>de</strong> <strong>la</strong> transcription du célèbre Forme of Cury 84 observe :<br />

« En résumé, les satiristes d’avant et pendant <strong>la</strong> Réforme (ang<strong>la</strong>ise) pestent contre<br />

<strong>la</strong> somptuosité du train <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s évêques et du clergé : en effet le luxe dans lequel<br />

ils vivaient atteignit un tel sommet que l’archevêque Cranmer, en 1541, trouva<br />

nécessaire d’appliquer <strong>de</strong>s règles restrictives à leurs menus, incluant le sien. » Trop<br />

c’est trop ! Et il faut donner le bon exemple.<br />

Durant le règne d’Édouard IV (1461-1483), un archevêque a droit à <strong>de</strong>ux cygnes<br />

ou <strong>de</strong>ux chapons, un évêque à un seul. Un archevêque dispose <strong>de</strong> six merles à <strong>la</strong><br />

fois, un évêque cinq, un doyen quatre, un archidiacre, <strong>de</strong>ux. Si le doyen a quatre<br />

p<strong>la</strong>ts à son premier service, il perd le droit aux autres fritures ainsi qu’aux f<strong>la</strong>ns.<br />

On permet à un archevêque six bécasses à <strong>la</strong> fois. Un archidiacre seulement <strong>de</strong>ux.<br />

Les <strong>la</strong>pins, alouettes, faisans, perdrix sont servis dans les mêmes proportions. Ce<br />

n’est que le dimanche qu’un chanoine rési<strong>de</strong>ntiel a droit à un cygne, pendant qu’un<br />

62 genèse <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>cuisine</strong> québécoise

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