RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

546 CHAPltRK IX.
rendre creintifz de nous adresser à luy : pource que combien
qu'il soit bon et bening Père : toutesfois par noz offenses nous
l'avons irrité contre nous. Car si entre les hommes le filz ne scauroit
avoir meilleur Advocat envers son père, lequel il a offensé,
5 que soy mesme : quand en humilité et obéissance, recongnoissant
son forfàict, il luy vient requérir mercy, (d'autant que lors un
cœur paternel ne peut mentir, qu'il ne se fleschisse et esmeuve
par telles prières) que fera ce Père de miséricorde et Dieu de toute 2. Cor. 1.
consolation ? N'exaucera-il poinct les pleurs et gemissemens de
io ses enfans ; le prians pour eux mesmes (mesmement puis qu'il
les y convye et exhorte) plustost qu'il ne fera toutes les requestes
que scauroient faire pour eux tous autres ; au refuge desquelz
ilz se retirassent ; en se defïians et doubtans de sa bonté et
• clémence? Il nous fait entendre ceste grande miséricorde pater-
15 nelle par la parabole, où nous est représenté le père, qui n'at- Luc 15.
tend point que pardon luy soit demandé de parolle par son filz,
lequel s'estôit aliéné de luy> avoit prodigalement dissipé sa
substance, et commis envers luy tresgrande offense. Mais il le
prévient, le recongnoist de loing : quand il le voit revenir par
2o devers soy, luy accourt au,.devant, l'embrasse, le console et le
receoit eh grace. Car en nous proposant à voir en un homme
l'exemple de si grande clémence et doulceur : il nous a voulu
enseigner combien plus de grace, doulceur et bénignité nous
devons attendre et espérer de luy : qui non seulement est
25 père : mais sur tous les pères tresbon et trespitoiable : si nous
venons nous rendre à sa miséricorde : encores que nous luy
ayons esté ingratz,' rebelles, et mauvais enfans. Et à fin de
nous donner plus de certitude, que c'est à nous, si nous
sommes chrestiens, qu'il est tel Père : Il n'a pas voulu seule-
30 ment estre de nous appelle père : mais il a voulu nommément
que nous l'appellions nostre. Comme si nous luy disions :
Père qui es si doulx à tes enfans, et si bon à leur pardonner',
nous tes enfans te requérons : estant asseurez que tu es
nostre pèrei qui n'as enversnous que paternelle affection et
35 volunté : qùoy que soyons indignes d'un tel père, quelque mauvaistié
qu'ayons eue, ou quelque imperfection, ou povreté qui
soit en nous.
Or ce qu'il ne nous est point icy baillé doctrine, que chascun
particulièrement l'appelle son père : mais que plustost