RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

472 CHAPITRE VIII.
en perdition ceux lesquelz il congnoist devoir estre enclins à
malice ou impieté. Or ceste opinion ainsi communément receuë
n'est pas seulement du commun populaire: car elle ha eu en
tous temps de grans autheurs. Ce que je confesse rondement : à
s fin qu'on ne pense que cela puisse beaucoup nuyre à nostre cause,
si on les produyt contre nous. Car la vérité de Dieu est si claire
en cest endroit, qu'elle ne pourra estre obscurcie : et si certaine,
qu'elle ne pourra estre esbranlée par nulle authorité des hommes.
Certes Sainct Paul, enseignant que nous avons esté esleuz en Ephe. i.
io Christ devant la Creation du monde il oste tout esgard de nostre
dignité. Car c'est autant comme s'il disoit. Pource qu'en la semence
universelle d'Adam, le Père celeste ne trouvoit rien digne
de son election : il a tourné ses yeux vers son Christ : à fin
d'eslire, comme membres de son corps, ceux qu'il vouloit recela
voir à vie. Pourtant que ceste raison soit résolue entre les fidèles :
que Dieu nous a adoptez en Christ, pour estre ses héritiers : à
cause qu'en nous mesmes nous n'estions pas capables d'une telle
excellence. Ce qu'il note aussi bien en un autre lieu, quand il
exhorte les Colossiens à rendre graces à Dieu, de ce qu'il les avoit
aorenduz idoines de participera l'Héritage des Sainctz. Sil'eslec- ColosJ.
tion de Dieu precede ceste grace, par laquelle il nous rend idoines
d'obtenir la gloire de la vie future : que trouverra-il en nous ;
dont il soit esmeu à nous eslire? Ce que je pretendz sera encores
myeux exprimé par une autre sentence. Dieu nous a esleuz,
as dit-il, devant que jetter les fondemens du monde, selon le bon
plaisir de sa volunté : à fin que nous fussions sainctz, imma- Ephe. /.
culez et irrépréhensibles devant sa face. Il oppose le bon plaisir
de Dieu à tous mérites qu'on scauroh; dire : car partout où
regne ce bon plaisir de Dieu, nulles œuvres ne viennent en con-
3osideration. Il est vray qu'il ne poursuytpas cela en ce passage :
mais il fault entendre la comparaison telle, qu'il l'explique aillieurs.
Il nous a appeliez, dit il, en sa vocation saincte : non pas
selon noz œuvres, mais selon son plaisir et sa grace : laquelle 2. Tim.i.
nous a esté donnée en Christ, de toute éternité. Les parolles
35 qu'il adjouste consequemment (c'est à fin que nous fussions sainctz
et immaculez) nous délivrent de tout scrupule. Car si nous
disons, qu'il nous a esleuz, à cause qu'il prevoyoit que nous
serions sainctz, nous renverserons l'ordre de Sainct Paul. Nous
pouvons donc ainsi arguer seurement. Puis qu'il nous a esleuz à