RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

DE LA CENE. 631
sans la parolle, ne sans aumosne, ne sans la participation de la
Cène, ne sans oraisons. On peut bien aussi assez conjecturer des
escris de Sainct Paul, que cest ordre estoit institué en l'Eglise des
Corinthiens. Et certes ceste coustume, laquelle commande de
5 communiquer une fois l'an, est une trescertaine invention du
Diable : par quiconques elle ayt esté mise sus. On dit Zepherin
Evesque de Rome avoir esté autheur de celle ordonnance : laquelle
je ne croy point avoir esté telle de son temps, que nous l'avons
maintenant. Touchant de luv, possible est que par son insti-
10 tution il ne pourvoyoit pas mal à son Eglise : comme le temps
estoit lors. Car il n'y a point de doubte, que lors la saincte Cène
ne feust proposée aux fidèles, toutesfois et quantes qu'ilz convenpient
ensemble en leur congregation, et qu'une bonne partie d'eux
ne communiquast. Mais pource que à peine jamais il n'advenoit
is que tous ensemble à une fois communiquassent : et d'autrepart
feust nécessaire que eux qui estoient meslez entre les infidèles, et
ydolatres tesmoignassent leur Foy par quelque signe extérieur : à
ceste cause le S. homme avoit institué ce jour là pour ordre et
police, auquel tout le peuple des Chrestiens de Rome, par la par-
20 ticipation de la Cène de nostre Seigneur,feist confession de sa Foy.
Au reste pour cela ilz ne laissoient d'aussi souvent communiquer :
puis que non gueres devant il avoit esté institué par Anaclete aussi
Evesque de Rome, que tous Chrestiens tous les jours communiquassent.
Mais l'institution de Zepherin, laquelle estoit autrement bonäs
ne, par la postérité a esté destournée à mal, quand une certaine loy
a esté mise d'une communication en l'année : par laquelle il a esté
faict,que quasi tous, quandilz ont une fois communiqué,comme s'estans
tresbien aquictezpour tout le reste de l'année, s'endorment. Or
il failloit bien qu'on feist autrement. On devoit à tout le moins chas-
30 cune sepmaine une fois proposera la congregation des Chrestiens
la Cène de nostre Seigneur : et dévoient estre déclarées les promesses,
lesquelles en icelle nous repaissent et nourrissent spirituellement.
Nul certes n'estoit à contreindre de la prendre : mais tous
en debvoient estre exhortez : et ceux qui en eussent esté negligens,
35 reprins et corrigez. Lors tous ensemblément,comme affamez, feussent
convenuz à tel repas. Non sans cause donc dès le commencement
j'ay par complaincte diet, que ceste coustume, laquelle en
nous ordonnant un jour de l'année nous rend paresseux et endormiz
pour, tout le reste du temps, a esté apportée par l'astuce du Diable,