RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

650 CHAPITRE XII,
Dieu, et rien^en nous. Secondement en charité : laquelle mesmes
il suffit presenter imparfaicte à Dieu, à fin qu'il augmente en
mieux : veu qu'elle ne se peut offrir en perfection.
Aucuns autres, accordans avec nous en cela, que la dignité
s gist en Foy et en charité, ont toutesfois grandement erré en la
mesure de ceste dignité : requerans une perfection de Foy, à
laquelle rien entièrement ne se puisse adj ouster : et une charité
pareille à celle que nostre Seigneur Jesus Christ a eu envers nous.
Mais par cela mesmes ilz dédiassent et recullent tous les hom-
10 mes de la reception de ceste saincte Gene, non pas moins que font
les aultres devant dictz. Car si leur oppinion avoit lieu : nul ne la
prendroit sinon indignement : puis que tout jusques à un, seroient
detenuz coulpables et convaincuz de leur imperfection. Et certes ce
a esté d'une trop grande ignorance, à fin que je ne dye bestise, que
16 requérir celle perfection, pour recevoir le. Sacrement : laquelle
le feroit vain et superflu. Car il n'est pas institué pour les parfaictz
; mais pour les imbecilles et debiles : à fin d'esveiler, stimuler,
inciter et exercer leur deffault, tant en Foy qu'en charité.
Ce que nous avons traicté de ce Sacrement jusques icy, monstre
20 amplement qu'il n'a pas esté institué à ce qu'il feust pris une fois
l'an, et ce par forme d'acquict : comme maintenant en est la coustume
publique : mais à fin qu'il feust en frequent usage à tous
Chrestiens, pour leur réduire souvent en memoire la passion de
Jesus Christ. Par laquelle recordation et souvenance leur Foy feust
25 soustenue et confirmée : et eux incitez et exhortez à faire confes- .
sion de louënge au Seigneur, et à magnifier et publier sa bonté.
Par laquelle finalement feust nourrie et entretenue mutuelle charité
entre eux : et aussi ilz se la testiffiassent les uns aux autres,
voyans la conjonction d'icelle en l'unité du corps de Jesus Christ.
30 Car toutesfois et quantes que nous communiquons du signe du
corps du Seigneur, nous nous obligeons mutuellement l'un à l'autre,
comme par scedulle, à tous offices de charité : à ce que nul
de nous ne face rien, parquy il blesse son frère : et ne obmette
rien parquoy il le puisse ayder et secourir, toutesfois et quantes que
35 la nécessité le requerra. S. Luc recite aux Actes tel avoir esté
l'usage de l'Eglise Apostolique : quand il dit les fidèles avoir esté Actes 2.
perseverans en la doctrine des Apostres, en communication, c'est
à dire en aumosne, en fraction du pain, et en oraisons. Ainsi failloit-il
entièrement faire, que nulle assemblée d'Eglise feust faicte