RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

DE LA VIE CHRESTIENIfE. M7
estre en bon repoz, avoir toutes choses à souhaist, vivre en délices
et pompes, voire mesmes quand ilz seront traictez par iceux inhumainement,
quand ilz endureront contumelie, quand ilz seront
pillez ou affligez de quelque manière d'oultrages que ce soit, encores
leur sera-il facile de se reconforter en telz maulx. Car ilz s
auront tousjours devant les yeux ce jour dernier, auquel ilz
scauront que le Seigneur doibt recueillir ses fidèles au repoz de
son Royaume, torcher les larmes de leurs yeux, les couronner
de gloire, les vestir de liesse, les rassasier de la doulceur infinie
de ses délices, les exalter en sa haultesse : en somme les faire 10
participans de sa félicité. Aucontraire jetter en extreme ignominie
les iniques, qui se seront magnifiez en terre, changer les délices en
horribles tormens, leur ris et joye en pleurs et grincement de
dents, inquiéter leur repoz par merveilleux trouble de conscience :
en somme les plonger en feu éternel, et les mettre en la subjec- i»
tion des fidèles : lesquelz ilz auront mal traictez iniquement.
Voilà certes nostre consolation unique : laquelle ostée, ou il
nous sera nécessaire de perdre couraige, ou bien nous flater et
amyeller par soûlas vains et frivoles, qui nous tourneront en
ruyne. Car le Prophète mesme confesse qu'il a vacilé, et que 20
ses piedz sont quasi glisez, cependant qu'il s'arrestoit trop à
reputer la félicité présente des iniques : et qu'il n'a peu consister
jusques à ce qu'il a reduict sa cogitation à contempler le sanctuaire
de Dieu : c'est à dire, à considérer quelle sera une fois
la fin des bons et des iniques. Pour conclure en un mot, je dy, 2a
que la croix de Christ lors finalement triumphe dedens les cœurs
des fidèles, à l'encontre du Diable, de la chair, du péché, de la
mort, et des iniques : s'ilz convertissent pareillement les yeux
à regarder la puissance de sa Ressurrection.
Par ceste mesme leceon l'Eseriture nous instruict aussi bien, 3u
quel est le droict usage des biens terriens : laquelle chose
n'est pas à négliger, quand il est question de bien ordonner nostre
vie. Car si nous avons à vivre : il nous fault aussi user des
aydes nécessaires à la vie. Et mesmes nous ne nous povons abstenir
des choses, qui semblent plus servir à plaisir qu'à nécessité. 3s
Il fault donc tenir quelque mesure, à ce que nous en usions en
pure et saine conscience, tant pour nostre nécessité, comme pour
nostre delectation. Ceste mesure nous est monstrée de Dieu, quand
il enseigne que la vie présente est à ses serviteurs comme un
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