RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

SS2 CHAPITRE IX.
selon son bon plaisir. Et ainsi faisans ceste prière, nous renonceons
à toutes noz cupiditez et désirs : delaissans et abandonnans
à Dieu toutes les affections que nous avons ; et le prians
qu'il ne face point que les choses adviennent selon nostre appe-
5 tit : mais selon qu'il voit et congnoist estre bon, et ainsi qu'il
luy plaist. Et mesmes ne desirons pas seulement que l'e[f]fect de
noz cupiditez contrariantes à Dieu, soit anneanty et destruict :
mais que Dieu crée en nous nouveau cœur et nouveau vouloir,
tellement qu'il n'y ayt en nous autre désir, qu'un accord avec sa
10 volunté. Brief, que de nous mesmes nous ne veuillions point:
mais que son Esprit veuille en nous : et nous face aymer les choses
qui luy plaisent, et avoir en hayne et horreur tout ce qui luy
desplaist.
Voylà les trois premieres petitions de ceste oraison : lesquelles
la nous debvons requérir en regardant l'honneur de Dieu seulement,
sans avoir consideration de nous, ne de nostre proffit. Qui neantriioins
en advient : combien que ce ne soit la cause et la fin qui
nous doibt mouvoir de les requérir. Et combien que toutes ces
choses, encores que n'y pensions né les desirions ou demandions,
20 ne laisseroient pourtant d : advenir et d'estre accomplies en leur
temps : neantmoins si nous les fault-il désirer et requérir. Et
nous est bien grand besoing de le faire : à fin de nous protester
et declairer estre serviteurs et enfans de Dieu : en désirant et
pourchassant de ce qu'il est en nous, son honneur comme de
as nostre Seigneur et Père. Et pourtant ceux qui n'ayans telle affection
et désir d'avancer la gloire de Dieu, ne prient que son Nom
soit sanctifié, que son Regne advienne, que sa volunté soitfaictë :
ilz ne sont point et ne doivent estre reputez du nombre des
enfans et serviteurs de Dieu. Et comme toutes ces choses advien-
3odront et seront faictes maugré eux: aussi ce sera à leur jugement
et condemnation.
LA IUI. PETITION.
Donne nous aujourd'huy nostre pain quotidien.
Qui est la premiere des autres trois, par lesquelles nous de-
35 mandons à Dieu les choses qui nous conservent, et qui subvien-