RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

766 CHAPITRE XVI.
lesquelles, par ce, apprendront de ne reprendre et condamner la
despence des Princes, combien qu'elle oultrepasse l'ordre et
l'usaige commun.
Après les Magistratz, s'ensuyvent les Loix : qui sont vrais
5 nerfz ou, comme Giceron les appelle, âmes de toutes Republiques,
sans lesquelles Loix, ne peuvent aucunement consister les Magistratz,
comme de rechief elles sont conservées et maintenues par
les Magistratz. Pourtant on ne povoit mieux dire que d'appellerla
Loy : un Magistrat muet, et le Magistrat, une Loy vive. Or ce
10 que j'ay promis de declarer, par quelles Loix doibt estre gouvernée
une police Chrestienne, n'est pas que je veuille entrer en longue
disputation, à scavoir, quelles seraient les meilleures Loix. Laquelle
disputation seroit infinie : et ne convient pas à nostre
present propoz. Seulement je marqueray en brief,- et comme en
in passant, de quelles Loix elle peut sainctement user devant
Dieu, et estre justement conduicte envers les hommes. Ce que
mesmes j'eusse laissé à dire : n'estoit que je voiz que plusieurs
errent dangereusement en ceste endroit. Car aucuns nyent qu'une
Republique soit bien ordonnée, si, en délaissant la police de
so Moyse, elle est gouvernée des communes Loix des autres nations.
De laquelle opinion je laisse à penser aux autres combien
elle est dangereuse et séditieuse. Il me suffira à present de
monstrer que elle est pleinement faulse et folle. Premièrement
il nous fault noter la distinction commune, laquelle divise toute
25 la Loy de Dieu, baillée par Moyse en trois parties : c'est à scavoir,
en meurs, ceremonies, et jugemens. Et fault considérer à
part chascune des parties : pour bien entendre ce qui nous en
appartient ou non. Or ce pendant nul ne se doibt arrester à ce
scrupule, que mesmes les jugemens et ceremonies sont contenues
30 soubz les meurs. Car les Anciens, qui ont trouvé ceste distinction,
combien qu'ilz n'ignorassent point que les ceremonies et
jugemens se rapportoient aux meurs : neantmoins pourtant que
. l'un et l'autre se povoit changer et abolir, sans corrumpre ne
diminuer les bonnes meurs : à ceste cause ilz n'ont point ap-
35 pelle ces deux parties : Moralles : mais ont attribué ce nom à
icelle partie, de laquelle depend la vraye intégrité des mœurs.
Nous commencerons donc à la loy morale : laquelle,
comme ainsi soit qu'elle contienne deux articles, dont l'un
nous commande de simplement honorer Dieu par pure Föy