RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

DU GOUVERNEMENT CIVIL. 761
Magistratz, n'est pas tant pour les instruire de ce qu'ilz ont à
faire : que pour monstrer aux autres que c'est qu'un Magistrat,
et à quelle fin il est ordonné de Dieu. Nous voyons donc que les
Magistratz sont constituez protecteurs et conservateurs de la tran-
5quilité, honnesteté, innocence, et modestie publique : lesquelz se
doivent employer à maintenir le salut et la paix commune de
tous. Or pourtant qu'ilz ne se peuvent acquiter de cela, sinon Rom. 43.
qu'ilz deffendent les bons contre les injures des mauvais, et qu'ilz
subviennent et donnent ayde à ceux qui sont oppressez : à ceste
10 caû§e ilz sont armez de puissance, pour reprimer et rigoureusement
punir les malfaicteurs, parla meschanseté desquelz la paix publique
est troublée. Car à dire vray, nous voyons par experience ce
que disoit Solon, que toutes les Republiques consistent en deux
choses : c'est à scavoir en la remuneration des bons, et en la puniîstion
des mauvais: lesquelles deux choses ostées, toute la discipline
des societez humaines est dissippée et miseàneant. Car il y en a
. plusieurs qui n'ont pas grand cure de bien faire, s'ilz ne voyentles
vertuz estre recompensées par quelque honneur. Et d'autrepart la
concupiscence des mauvais ne se peut refréner, s'il? ne voyent la
20 vengeance et punition preste. Etaussices deux parties sont prinsesdu
Prophète, en ce qu'il commande aux Roys et autres supe- J ere - %%•
rieurs, de faire jugement et justice. Justice est de recevoir les
Innocens en leur sauvegarde : les maintenir, deffendre,soustenir,
etdelivrer. Jugement, est de résister à la hardiesse des meschans,
25 réprimer leurs violences, et punir leurs delictz.-
Mais icy s'esmeut une question haulte et difficile : à scavoir,
s'il est point deffendu à tous Chrestiens d'occire. Car si
Dieu par sa Loy le deffend : et si le Prophète prédit, de l'Eglise Exod. 20.
de Dieu, que en icelle on n'affligera point, et né fera on mal Deut. 5.
30 à aucun : comment peuvent les Magistratz, sans offense de pie- Matth. S.
té, espandre sang humain? Mais d'autre part si nous enten- lésa. 14.et
dons que le Magistrat, en punissant, ne faict rien de soy, ains
que seulement il execute les Jugemens mesmes dé Dieu : ce
scrupule ne nous agitera pas fort. Vray est, que la Loy de Dieu,
35 deffend d'occire. Aucontraire aussi à fin que les homicides ne demeurent
impuniz : Le Seigneur met le glaive en la main de ses
ministres, pour en user contre les homicides. Et il n'appartient
pas aux fidèles d'affliger ne faire nuysance. Mais aussi cela
n'est pas faire nuysance ne affliger, de venger, par le mande-