RELIGION CHRESTIENiNE - Archive ouverte UNIGE

. DE LA VIE CHRESTIENNE. 821
proffité en cest endroit, à grand'peine pourra-il rien avoir en
quoy il s'approve Disciple de Christ. -Car oultre que plusieurs
autres vices suyvent la cupidité des choses terriennes, il advient
quasi tousj ours que celuy qui endure impatiemment •pbvreté,
monstre un vice contraire à abondance. Par cela j'enténdz que s
celuy qui aura honte d'une meschanté robbe, se glorifiera en une
pretieuse : celuy qui n'estant point content d'un maigre repas, se
tormentera du désir d'un meilleur : ne se pourra contenir en soli
rieté, quand use trouverra en bon appareil : celuy qui ne se pourra
tenir en basse condition ou privée, mais en sera molesté et fas- 10
ché : ne se pourra pas garder d'orgueil et arrogance, s'il parvientà
quelques honneurs. Parqùoy tous ceux qui veulent servir à Dieu
sansfainctise, se doivent éstudier, a l'exemple de l'Apostre,de povoir
porter abondance et indigence : c'est de se tenir modérément
en abundance : et avoir bonne patience en povreté. L'Escriture ha 15
encores une troisiesme reigle, pour modérer l'usage des chosesterriènnes
: de laquelle nous avons brièvement touché en traictant
les préceptes de charité. Car elle monstre que toutes choses
nous sont tellement données par la bénignité de Dieu, et destinées
en nostre utilité, qu'elles sont comme en depoz : dont il 20
nous fauldra une fois rendre raison. Pourtant il nous les fault dispenser
enteile sorte, que nous 1 ayons tousjours memoire de ceste
sentence qu'il nous fault rendre compte de tout ce que nostre Seigneur
nous a baillé en charge. D'avantage nous avons à penser qui
c'est qui nous appelle à compte, à savoir Dieu : lequel comme ilnous 20
a tant recommandé abstinence, sobriété, temperance et modestie:
aussi il ha en execration toute intemperance, orgueil, ostentation
et vanité : auquel nulle dispensation n'est approvée, sinon celle
qui est compassée à charité, lequel eage a condamné de sa bouche
toute délice dont le cœur de l'homme est destourné de chas- 30
teté et pureté, ou son entendement rendu stupide.
Nous avons aussi à observer diligemment, que Dieu commande
à un chascun de nous, de regarder sa vocation en toutes
les actions de sa vie. Car il congnoist combien l'entendement
de l'homme bruslè d'inquiétude, de quelle légèreté il est porté cà 33
et là : et de quelle ambition, et cupidité il est sollicité à embrasser
plusieurs choses diverses tout ensemble. Pourtant de
peur que nous ne troublissions toutes choses par nostre folie et
témérité, distinguant les estatz et manières' de vivre : il a ordonné