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Les Médecins au Cambodge - Odris

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vapeur, en pirogue, à cheval ou à dos d'éléphant, l'intrépide médecin progresse<br />

un peu <strong>au</strong> hasard, mal informé des implantations villageoises, dont la dispersion<br />

a de quoi surprendre les habitués des villages “annamites” bien groupés. Il<br />

connaît des succès variés. En Kompong Thom où son équipe s'arrête à chaque<br />

village pour expliquer le but de la visite, il doit supplier les parents de laisser<br />

inoculer leurs enfants en échange de cade<strong>au</strong>x, et pratique péniblement quatre cent<br />

soixante-quatre inoculations.<br />

L'entreprise se heurte à des difficultés multiples : méfiance des<br />

Cambodgiens qui connaissent pourtant bien la variolisation1 ; peur de se voir ainsi<br />

inoculer une “sorte de francisation, dont ils ne veulent à <strong>au</strong>cun prix ; car, de ce fait, ils<br />

perdraient leur caractère national” 2 ; indifférence de certains résidents provinci<strong>au</strong>x<br />

comme celui de Kompong Thom qui a surnommé sa province la “Sibérie tropicale” ;<br />

hostilité des médecins traditionnels, enfin, qui tirent de la variolisation une source de<br />

revenu3. De meilleurs résultats sont obtenus dans d'<strong>au</strong>tres endroits, avec le concours des<br />

<strong>au</strong>torités cambodgiennes. Le Dr Nogué peut ainsi vacciner malgré tout plus de 21 000<br />

enfants en une année. <strong>Les</strong> vaccinations progressent encore. 1899 est une année<br />

exceptionnelle avec 114 516 vaccinations4 contre 40 430 en 1901 et près de 400 000<br />

trente ans plus tard5. Seule ombre <strong>au</strong> table<strong>au</strong>, le contrôle des pustules à fin de<br />

vérification est presque impossible car les parents négligent de ramener leurs enfants.<br />

En 1936, sur les 568 000 vaccinations pratiquées (dont 357 000 revaccinations), 92 000<br />

ont pu être contrôlées et 35 000 s'avéraient positives. Si la recherche microbiologique<br />

est largement, alors, une science coloniale, en revanche la lutte contre les épidémies ne<br />

semble pas avoir pris la tournure <strong>au</strong>toritaire et presque militariste qu'elle a pu prendre<br />

dans les territoires africains de l'empire colonial français6. 1 La variolisation consiste le plus souvent à inoculer les enfants à partir d'une croûte de pustule desséchée<br />

ou de pus frais. Le procédé est considéré dangereux car la virulence n'est pas toujours atténuée comme<br />

elle l'est avec le vaccin. Selon les écrits de médecins coloni<strong>au</strong>x, la variolisation est anciennement<br />

pratiquée <strong>au</strong> <strong>Cambodge</strong>. Certains d'entre eux pensent que les Chinois ou les Malais installés dans le pays<br />

ont répandu la pratique. Mais d'<strong>au</strong>tres ont vu de vieilles femmes inoculer des enfants dans les villages.<br />

2 J. NOGUE, “Contribution à la géographie médicale. Missions de vaccine <strong>au</strong> <strong>Cambodge</strong>”, Annales<br />

d'Hygiène et de Médecine Coloniales, avr.-mai 1898, I, p. 187.<br />

3 ANGIER, op. cit., p. 57.<br />

4 Gustave MARTIN, “Service de la vaccine <strong>au</strong> <strong>Cambodge</strong>”, Annales d'Hygiène et de Médecine<br />

Coloniales, 1902, p. 499.<br />

5 René MORIZON, op. cit., p. 210.<br />

6 Jean-Pierre DOZON, “Quand les pastoriens traquaient la maladie du sommeil”, art. cit.

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