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Les Médecins au Cambodge - Odris

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La seconde partie du massage – faite d'étirements – nous ne l'avons pas<br />

rencontrée dans l'univers domestique khmer. Peut-être est-elle d'origine vietnamienne.<br />

Le client est allongé sur le ventre tandis que la masseuse reste debout. Celle-ci étire les<br />

jambes du client en les poussant du pied vers les omoplates, soit l'une après l'<strong>au</strong>tre<br />

(jambe droite vers omoplate g<strong>au</strong>che et inversement), soit en les croisant ; technique<br />

brutale mais qui fait sourire de satisfaction les clients de Sophea entre deux grimaces de<br />

douleur.<br />

L'intérêt de “faire les sasay” ou de faire koh khyol est multiple et l'on<br />

pressent là une accumulation de représentations du corps d'origines probablement<br />

variées : théorie humorale de la circulation des fluides corporels (activation des sasay,<br />

stimulation des vents), exercice d'assouplissement mais également théorie microbienne<br />

car koh khyol permet de faire remonter à la surface de la pe<strong>au</strong> les déchets (theat poul,<br />

ZatuBul, litt. “le poison”) par l'intermédiaire de la transpiration 1, contenant, dit Sophea<br />

des “microbes” (me rok, emeraK 2). Enfin, le service produit une sensation de détente et<br />

<strong>au</strong>gmente la “force” (komlang, kmø aMg), <strong>au</strong>tre notion très importante dans la perception<br />

cambodgienne du corps.<br />

La dernière spécialité de Sophea, commerciale celle-là, est la pose de<br />

ventouses, pratique peut-être introduite par les Français sous le Protectorat. La jeune<br />

femme applique sur le dos, la poitrine, les bras et le front des clients (qui le souhaitent)<br />

vingt-quatre petits verres. A l'aide d'une tige de fer (un rayon de bicyclette) <strong>au</strong> bout de<br />

laquelle est entortillé un chiffon imbibé d'essence puis enflammé, elle crée le vide sous<br />

les verres qui collent immédiatement à la pe<strong>au</strong> dans un mouvement d'aspiration. Ces<br />

ventouses laissent une marque circulaire rouge de cinq centimètres de diamètre pendant<br />

plus d'une semaine et produisent le même effet que le grattage à la pièce.<br />

1 Cette explication n'est pas nouvelle puisque, dans le “Traité pour attraper les vents” (Martine PIAT, op.<br />

cit.), il est également question de saisir les vents (en saisissant la partie du corps ou le vent s'est logé)<br />

jusqu'à ce que le patient transpire, signe de guérison.<br />

2 Mé rok signifie “principe de la maladie”. Mé désigne en premier lieu la mère, le chef, ce qui est à<br />

l'origine de quelque chose. Dans le langage courant, mé rok il désigne les microbes et les germes<br />

invisibles provoquant les maladies. Une histoire du terme serait intéressante à faire.

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