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Les Médecins au Cambodge - Odris

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sympathisants qui n'ont pas exercé de fonction politique1. Il part pour la France, passe<br />

son examen d'équivalence de doctorat, suit une spécialité et travaille comme médecin<br />

hospitalier dans une petite ville. Moins que de l'amertune sur ce passé – il n'est jamais<br />

vindicatif concernant ses dirigeants de l'époque – ce qui ressort de l'entretien mené avec<br />

Lan Kim Chhean – de même qu'avec d'<strong>au</strong>tres intellectuels de Boeng Trabek – est la<br />

déception de l'échec collectif, attribué <strong>au</strong> manque de réflexion et de planification réaliste<br />

de la part du gouvernement.<br />

Dans la hiérarchie révolutionnaire, les médecins volontaires, rapatriés de<br />

l'étranger, occupent une place qui, à certains égards, est proche de celle de leurs<br />

confrères déportés. Ils se situent cependant en position légèrement privilégiée du fait de<br />

leur antécédent révolutionnaire, récent mais manifeste puisqu'ils ont de plein gré choisi<br />

le retour <strong>au</strong> pays. De ce fait, il est mis un soin particulier à leur rééducation – comme le<br />

prouvent la venue de Khieu Samphan en personne <strong>au</strong> camp et la tutelle exercée par Ieng<br />

Sary, le “Frère Numéro Deux” du régime. Une conséquence pratique en est qu'ils n'ont<br />

pas à subir les brimades et l'arbitraire des “petits chefs” qui ont fait tant de victimes<br />

parmi le “peuple du dix-sept avril”.<br />

La dernière catégorie qu'il convient d'évoquer est celle des biomédecins<br />

non ralliés <strong>au</strong> mouvement communiste et déportés vers les campagnes <strong>au</strong> moment de<br />

l'évacuation des villes. Ceux-là, dans la hiérarchie sociale, occupent le bas de l'échelle et<br />

connaissent les conditions de vie les plus pénibles car ils cumulent les stigmates<br />

soci<strong>au</strong>x : citadins et fonctionnaires des régimes précédents, ils n'ont pas participé à<br />

l'effort de guerre révolutionnaire et rentrent dans la catégorie du “peuple du dix-sept<br />

avril”. Entrepreneurs aisés, souvent d'ascendance chinoise plus ou moins proche, ils font<br />

partie des classes possédantes qui ont exploité les p<strong>au</strong>vres2. 1 Cette possibilité d'un départ “à l'amiable” nous est confirmée par une <strong>au</strong>tre personne dans la même<br />

situation, qui a rompu ses liens vers 1990 pour retourner vivre à Phnom Penh.<br />

2 Le schéma de la lutte des classes <strong>au</strong> <strong>Cambodge</strong> varie selon les groupes idéologiques représentés <strong>au</strong> sein<br />

du Parti Communiste cambodgien. Le problème est évidemment celui de la nature prolétarienne de la<br />

révolution, dans un pays majoritairement rural. Pol Pot, dans un discours de septembre 1977, perçoit la<br />

société cambodgienne comme divisée en cinq classes (ouvrière, paysanne, bourgeoise, capitaliste,<br />

féodale) et met l'accent sur les jeunes paysans p<strong>au</strong>vres comme noy<strong>au</strong> de la révolution. Voir Ben<br />

KIERNAN, “Pol Pot...”, art. cit., p. 199.

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