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Les Médecins au Cambodge - Odris

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<strong>au</strong> régime politique : l'absence de liberté dans la vie privée ou professionnelle ; la<br />

suspicion liée à la présence d'opposants à l'intérieur du pays, en contact avec les camps<br />

de résistants de la frontière ; l'omniprésence des experts vietnamiens dans les ministères<br />

et la prison politique pour ceux qui manifestent une opposition1. Pour les médecins<br />

survivants comme pour les futurs praticiens qui restent <strong>au</strong> <strong>Cambodge</strong>, donc, pratiquer la<br />

médecine signifie entrer <strong>au</strong> service de l'Etat, accepter les directives du Parti, obéir.<br />

Mais la répression n'est pas le seul instrument de gouvernement.<br />

L'adhésion des médecins – totale ou partielle car, dans le système de pensée<br />

cambodgien comme dans d'<strong>au</strong>tres, l'on peut croire “un peu” ou adhérer “un peu” –existe<br />

et prend forme <strong>au</strong>tour de plusieurs thèmes, martelés par une propagande intensive : la<br />

peur du retour de “Pol Pot”, la crainte de la disparition totale du peuple khmer avec,<br />

comme remède, la reconstruction nationale.<br />

Répondant <strong>au</strong> tollé occidental suscité par l'occupation étrangère, la<br />

République Populaire du Kampuchea s'efforce de construire – sans succès – sa<br />

légitimité extérieure en référence <strong>au</strong>x crimes commis sous le régime khmer rouge dont<br />

elle a libéré le peuple cambodgien. L'analogie s'organise, dans le vocabulaire, <strong>au</strong>tour du<br />

régime nazi. <strong>Les</strong> charniers font partie du circuit de visite guidée des rares visiteurs<br />

étrangers admis, en particulier les journalistes, tandis que la prison politique de Tuol<br />

Sleng à Phnom Penh est transformée en musée du génocide, avec l'aide de muséologues<br />

d'Europe de l'Est. On peut notamment y découvrir une carte macabre du <strong>Cambodge</strong>,<br />

entièrement composée de crânes humains.<br />

Parallèlement, la propagande intérieure insiste sur la culpabilité<br />

personnelle de la “clique génocidaire” de Pol Pot, Ieng Sary et Khieu Samphan qui<br />

avaient confisqué le pouvoir à leur seul avantage. Cela permet, d'une part, de limiter les<br />

responsabilités et de focaliser le ressentiment des Cambodgiens sur un nombre limité de<br />

coupables, évitant peut-être des représailles de grande envergure. Cela est d'<strong>au</strong>tant plus<br />

1 LY Den, un pharmacien nommé Directeur Général du Département Pharmaceutique du ministère de la<br />

Santé, a publié son témoignage (“<strong>Les</strong> détenus politiques sous le gouvernement Heng Samrin”, ASEMI,<br />

<strong>Cambodge</strong> I, 1982, XIII, 1-4, pp. 249-265). Il raconte comment il a été arrêté en juillet 1979 (avec onze<br />

<strong>au</strong>tres personnes dont deux collègues du ministère de la Santé) pour avoir protesté contre le responsable<br />

politique de son service, un ancien médecin révolutionnaire khmer rouge, qui volait des médicaments<br />

dans les entrepôts de l'Etat et les revendait <strong>au</strong> marché noir. Il passe neuf mois en prison <strong>au</strong> cours desquels<br />

il subit les interrogatoires de “conseillers” vietnamiens qui orientent les questions vers son hostilité envers<br />

les Vietnamiens (qu'il nie). Libéré en avril 1980, il se réfugie en France.

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