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Les Médecins au Cambodge - Odris

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père Canard” (ta tea, taTa) lorsqu'il sera assigné à la garde du troupe<strong>au</strong> de canards du<br />

village. Cette activité lui permet de survivre. “J'élevais les canards pour les kamaphibal<br />

[les cadres]. Ils pondaient vers deux heures du matin. Je pouvais voler quelques œufs<br />

avant le ramassage. On mangeait les oeufs crus puis on écrasait la coquille, on la broyait<br />

et on l'enterrait”. Il connaîtra cependant le camp de rééducation, enchaîné <strong>au</strong> sol par la<br />

cheville, pour avoir donné un caneton mort à sa femme.<br />

La seconde chance de Hing Kun Thuon, quand il essaie de comprendre<br />

pourquoi il a survécu – question qu'il se pose souvent –, c'est le soutien du “peuple<br />

ancien”. “Au début, les paysans manifestent de la haine à l'égard des gens de Phnom<br />

Penh car ils sont trompés par les Khmers Rouges. Ensuite, ils se rendent compte que ce<br />

sont des brigands. [...] Après quelques mois, les gens du village ont arrêté de soutenir<br />

les Khmers Rouges et nous ont aidés. Ils nous donnaient de la nourriture en cachette<br />

[car ils étaient mieux nourris et moins surveillés] et puis des conseils. [...] Je suis<br />

retourné un mois <strong>au</strong> <strong>Cambodge</strong> en 1996. Je suis allé dans ce village. <strong>Les</strong> gens du peuple<br />

sont accourus pour nous accueillir. On a parlé de cette période et on les a remerciés de<br />

leur aide, de leur soutien”. Enfin, Hing Kun Thuon pense qu'à Po Veal, les cadres<br />

étaient moins brut<strong>au</strong>x qu'ailleurs. “Ces gens connaissaient la ville. Ils y allaient et nous<br />

comprenaient. Dans les zones lointaines, montagneuses, les Montagnards cruels et le<br />

[paludisme] falciparum ont fait des ravages”.<br />

Au début de 1979, lorsque l'armée vietnamienne entre à Pursat, les<br />

soldats khmers rouges fuient en poussant la population civile vers la forêt, à l'Ouest. Le<br />

destin est encore une fois favorable à Hing Kun Thuon et sa femme. “Ils avaient reçu<br />

l'ordre de nous éliminer. Il y avait deux chefs, deux femmes. L'une a dit : 'il f<strong>au</strong>t les<br />

éliminer, sinon ils vont rejoindre les Vietnamiens'. L'<strong>au</strong>tre a dit : 'non, laissons-les<br />

partir'. C'est la seconde qui l'a emporté.” Après des jours de marche, de retour vers<br />

Pursat-ville, Hing Kun Thuon rencontre avec surprise les troupes vietnamiennes. “Nous<br />

pensions que c'était des Cambodgiens, nous avons trouvé des Vietnamiens. [Or], les<br />

Vietnamiens sont rusés, ils ne sont pas venus gratuitement”, pense-t-il. Il décide alors de<br />

fuir vers la frontière thaïlandaise sans retourner à Phnom Penh et passe sept mois dans<br />

les camps de réfugiés – dont celui de Sakeo I, abritant en majorité des Khmers Rouges.<br />

Il croise, dans l'un d'entre eux, un ancien confrère rallié <strong>au</strong> mouvement communiste. Il<br />

est finalement accueilli en France en mai 1980 où il reçoit l'aide d'anciens collègues

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