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Les Médecins au Cambodge - Odris

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C – Ethique du don contre philosophie du développement<br />

Finalement, les humanitaires se situent, comme nous l'avons montré,<br />

dans une logique de gestion de la p<strong>au</strong>vreté, laquelle s'insère dans une philosophie<br />

plus générale du développement qui suppose que chacun ⎯ et en premier lieu les<br />

Cambodgiens ⎯ “retrousse ses manches” pour le bien collectif et paie de sa<br />

personne avec d'<strong>au</strong>tant plus de ferveur que le support matériel de l'activité<br />

hospitalière est faible. Cette conception se renforce de considérations économiques<br />

car les O.N.G. sont elles <strong>au</strong>ssi contraintes par les limites de leur budget ⎯ surtout<br />

lorsqu'elles sont de taille modeste ⎯ et cherchent, dans les négociations, à impliquer<br />

leurs partenaires cambodgiens dans les dépenses de santé pour que le poids financier<br />

du fonctionnement hospitalier ne pèse pas uniquement sur leurs ép<strong>au</strong>les.<br />

“Relever ses manches”, payer de sa personne : ces discours rappellent,<br />

toutes proportions gardées, les heures encore proches du travail collectif sous la<br />

République Populaire du Kampuchea. <strong>Les</strong> Cambodgiens, quant à eux, souhaitent voir<br />

les organismes humanitaires jouer un rôle de bienfaiteurs. Ce rôle, traditionnellement<br />

défini, consiste pour le “riche” à fournir des dons <strong>au</strong> “p<strong>au</strong>vre”. Le Roi Sihanouk, de<br />

même que tous les h<strong>au</strong>ts fonctionnaires du régime se livrent ainsi périodiquement,<br />

devant les caméras, à cette activité obligatoire, associée à un statut social élevé, qui<br />

consiste à distribuer sacs de riz et pièces de vêtements à une foule de paysans<br />

respectueusement accroupis, lors de fêtes nationales ou de catastrophes naturelles<br />

telles que les inondations, nombreuses <strong>au</strong> <strong>Cambodge</strong>. Cette redistribution<br />

traditionnelle des richesses – fonction que l'Etat n'assume plus – est la forme laïque<br />

de l'offrande bouddhique qui consiste, pour les fidèles, à faire des dons <strong>au</strong>x bonzes<br />

en de nombreuses occasions – <strong>au</strong>mônes quotidiennes <strong>au</strong>x bonzes mendiant leur<br />

nourriture, fêtes nationales ou familiales. L'offrande <strong>au</strong>x bonzes est, dans le<br />

bouddhisme theravada pratiqué <strong>au</strong> <strong>Cambodge</strong>, la principale source d'acquisition de<br />

mérites (bon) permettant, dans les existences ultérieures, d'améliorer le cours de la<br />

vie selon la théorie de la rétribution des mérites (karma) 1.<br />

1 <strong>Les</strong> adeptes du bouddhisme recherchent en principe l'extinction, c'est-à-dire leur sortie de la samsara<br />

(le cycle où les forces vitales s'incarnent, improprement traduit par “renaissance”). Mais la religion<br />

bouddhique populaire cambodgienne a adapté et adouci ses objectifs <strong>au</strong>ssi <strong>au</strong>stères que lointains.

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