volumen xxiii. - Archive ouverte UNIGE

TROIS SERMONS SUR L'HISTOIRE DE MELCHISEDEC.
PREMIER SERMON
ayons veu qu'il luy a falu tracasser ça ou là, pource
DE L'HISTOIRE DE MELCHISEDEC. - * qu'il n'e8toit pas gueres humainement receu: quel­
AUQUEL EST AUSSI TRAITTÉE LA DELIVRANCE que part qu'il vint, on le chassoit. Vray est que
DE LOT, JFAITË'PÀR ABRAM.
Dieu luy a bien commandé de circuir la terre au
long et au large, pour l'exercer: mais au paravant
Genese Chap. 14.
desia il avoit esté contrainct par nécessité. H n'y
13. Quelqu'un qui estait eschappê le dit à Abram a donc nulle doute que ses vertus ne luy ayent
Ebrieu qui liabitoit vers les chesnes de Mamré, lequel acquis quelque authorité, en sorte qu'on l'a receu,
'estoit Amorréen, frère d'Escol et frère d'Aner, qui et que ceux qui estoient [pag. 15] comme chefs de
avoyent alliance avec Abram. 14. Abram ayant ouy ce pais-la, l'ont tenu pour leur amy, et ont fait
que son parent estoit pris, tira de sa maison trois cens alliance ensemble pour se maintenir l'un l'autre.
et dixhuit serviteurs, enseignez sous sa main, et pour-
Il est vray que toutes les vertus du monde n'apsuyvit
les ennemis iusques en Ban. 15. Et s'estant
porteront pas souvent un tel bien: mais il y a deux
divisé luy et ses serviteurs de nuict, frappa les enne­
choses conioinctes: l'une est que ceux qui se pormis,
les poursuyvant iusques en Hobah, qui est à
tent droitement et en intégrité, tascheront en premier
lieu de conformer leur vie à la volonté de
la gauche de Damas. 16. Et ramena toute la su-
Dieu, mais en servant Dieu, ils monstreront aussi
stance, etc.
une affection humaine envers leurs prochains, et
Nous avons à poursuyvre l'histoire qui fut hier ceux-là rachèteront souvent la paix, et rompront
commencée de la délivrance de Lot. Et en premier la malice de ceux qui autrement estoyent prests à
lieu nous voyons comme Dieu a declairé sa bonté
les fascher. Et de fait S. Pierre aussi demene cest
et faveur envers Abram, quand il luy a donné
argument-la, quand il exhorte les serviteurs à bien
[pag. 14] moyen d'aller à la recousse. Et voyla
faire, et à servir à ceux qu'ils devront: il dit que
pourquoy Moyse dit notamment, (qu'un qui estoit
par ce moyen ils pourront obtenir qu'on ne les
picque point, et qu'on ne se rue point sur eux,
eschappê est venu vers Abram Ebrieu). Il est vray
Mais (dit-il) quoy qu'il en soit, s'il vous faut en­
que ce mot n'est point mis par ignominie: car la durer en bien faisant, vous avez à glorifier Dieu
lignée d'Eber a eu ce nom-la: et Eber estoit de­ en cela, que vostre conscience ne vous redargue
scendu de Sem (comme nous avons declairé ey point. Voila donc ce que nous avons à noter. Or
dessus) tellement qu' Abram estoit desia comme le second est, que Dieu bénit ceux qui cheminent
séparé de Dieu, pour n'estre point polu parmi les en telle droiture, et amollit les coeurs de hommes.
Chananéens. Mais quoy qu'il en soit, Moyse luy Quand donc il est ici recité qu'Abram a esté allié,
attribue ce nom, comme s'il disoit qu'il estoit il est certain qu'on l'a veu tel, que son amitié a
estranger, et qu'il estoit venu habiter en pais loin­ esté désirée par ceux mesmes qui luy pouvoyent
tain en ceste terre de Canaan. Or nous savons porter inimitié au paravant, ou bien qui l'eussent
qu'il povoit estre mesprisé, d'autant qu'il n'avoit là voulu gourmander et piller: ceux-là [pag. 16] ont
ne parens ny amis: tant y a qu'encores Dieu luy esté enclins à se ioindre avec luy. Mais c'a esté
fait ceste grace et privilege, qu'en temps et en une alliance pour un temps tant seulement. Car
lieu il est adverti du mal qui est avenu à son il est certain qu'Abram ne s'est iamais meslé parmi
neveu pour y secourir. Or Moyse aiouste, qu'il ceux que Dieu avoit desia condamnez, combien qu'iL
estoit allié avec ses voysins. Par cy devant nous
Calvini opera. Vol. XXIII.
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