volumen xxiii. - Archive ouverte UNIGE
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707 SERMONS. 708<br />
qu'il oublie et ensevelit toutes nos offenses par<br />
lesquelles nous sommes coulpables devant luy. Si<br />
ainsi est, il s'ensuit qu'il n'y a que mal-heur en<br />
nous iusques à ce que Dieu nous ait pardonné: et<br />
si nous sommes meschans, où sera nostre iustice?<br />
Car Dieu ne peut pas hair ce qui est convenable<br />
à sa nature, il est la fontaine de toute iustice: s'il<br />
trouvoit en nous quelque bien, encores quelque<br />
petit qu'il fust, il est certain qu'il l'accepteroit. Il<br />
faut, donc conclure d'autant que nous sommes<br />
malins, qu'il n'y a en nous qu'iniustice et iniquité<br />
et tout mal-heur, que nous ne pouvons pas estre<br />
bien-heureux que nous ne soyons aimez de Dieu.<br />
Or s'il nous aime, il faut quant et quant qu'il nous<br />
approuve: s'il nous approuve, il faut que nous<br />
soyons iustes. Toutes ces choses-la sont principes<br />
qui devoyent estre assez entendus. Mais encores<br />
si nous faut-il cognoistre que. nous ne pouvons<br />
estre bien-heureux sinon que Dieu nous aime: car<br />
cependant qu'il nous sera ennemi, helas, quelle est<br />
nostre condition? dont est-ce que depend nostre<br />
félicité? C'est quand Dieu nous [pag. 148] reçoit<br />
en son amour. Or maintenant regardons comment<br />
il nous aime: il faut qu'il nous approuve, comme<br />
i'ay dit, car il ne peut pas se renoncer soy-mesme.<br />
Et s'il nous reiette et que nous luy soyons détestables,<br />
comment sera-il reconcilié avec nous? Or<br />
venons au moyen : car Dieu ne se peut transfigurer,<br />
et si nous prétendons de le faire c'est en vain (dit<br />
sainct Paul) : car il demourera tousiours semblable<br />
à soy, et nous saura bien séparer avec tous nos<br />
mensonges, et nous racler de son rang: comment<br />
donc serons-nous approuvez de Dieu? Il faut que<br />
nous soyons iustes. Or ceste iustice-la, quelle<br />
est-elle? Ce n'est pas que nous l'ayons en nos<br />
oeuvres, que nous puissions nous acquitter envers<br />
luy, ni satisfaire à nostre devoir: il n'y a rien de<br />
tout cela. Quoy donc? Il faut que Dieu nous pardonne<br />
nos péchez, qu'il oublie nos iniquitez, qu'il<br />
ne nous impute point nos offenses. Et non sans<br />
cause David a usé de ces trois façons de parler:<br />
car on penseroit que ce langage seroit superflu:<br />
mais notamment il réitère cela, d'autant que ce<br />
n'est point seulement un abysme que la condition<br />
de l'homme en laquelle il naist, et en laquelle il<br />
est plongé iusqu'à ce que Dieu l'en retire, mais<br />
c'est l'abysme des abysmes: brief, c'est le profond<br />
d'enfer. Il faut donc que Dieu besongne [pag. 149]<br />
ici d'une façon singulière. Et voila pourquoy aussi<br />
il adiouste puis après, Et en l'Esprit duquel il<br />
n'y a point de fraude : car il faut que nous sentions<br />
combien la miséricorde de Dieu nous est nécessaire,<br />
d'autant que la grandeur de nos péchez est telle,<br />
que c'est pour empunaisir et ciel et terre, et non<br />
seulement pour provoquer nostre Dieu, mais les<br />
Anges, la lune et le soleil et toutes les creatures<br />
à rencontre de nous. Ainsi donc voila pourquoy<br />
David magnifie tant la remission des péchez. Et<br />
pour ceste cause mesme sainct Paul conclud que<br />
voila où gist toute nostre iustice, c'est que nos<br />
péchez nous soyent pardonnez. Et notons bien<br />
aussi, comme i'ay desia touché, que David met en<br />
l'Esprit duquel il n'y a point de fraude: car il<br />
monstre que nous ne pouvons recevoir la remission<br />
de nos péchez, combien qu'elle nous soit offerte<br />
alors de Dieu, iusqu'à ce que nous soyons du tout<br />
confus en nous mesmes, que nous soyons bien<br />
resveillez, qu'il n'y ait point d'hypocrisie ne de<br />
fiction qui nous face à croire ceci ou cela et qu'il<br />
n'y ait nul desguisement, que nous ne soyons point<br />
doubles, ni endormis en nostre non-chalance:i mais<br />
que nous soyons comme povres gens damnez et<br />
perdus, que le iugement de Dieu persecute, tellement<br />
que nous ne sachions que faire, et que nous<br />
soyons là comme si desia [pag. 150] nous voyons<br />
la mort présente, comme si nous voyons la main<br />
de Dieu armée pour exécuter la sentence de maiediction<br />
qu'il prononce à l'encontre de nous. Voila<br />
ce que nous avons à noter quant à ceste iustice<br />
pour en avoir une bonne definition. Or voila aussi<br />
pourquoy il est dit au quinzième chap, des Actes<br />
quand sainct Paul traitte des ceremonies qu'il faut<br />
que nous soyons iustifiez par nostre Seigneur Iesus<br />
Christ de toutes les choses dont la Loy de Moyse<br />
ne nous a peu iustifier. Ce mot ici emporte assez<br />
longue queue: car il faut savoir pourquoy S. Paul<br />
parle des ceremonies de la Loy notamment, quand<br />
il dit: Que les oeuvres ne peuvent rien faire, ne<br />
servir pour nous rendre agréables à Dieu. Les<br />
Papistes et mesmes beaucoup de gens anciens qui<br />
n'estoyent point exercez en l'Escriture, mais qui<br />
estoyent comme à demy Philosophes, se sont amusez<br />
à ce mot de la Loy, et ne pensent que S. Paul<br />
ne combat point pour les oeuvres moralles qu'on<br />
appelle, c'est à dire, qu'il ne veut pas nier que<br />
nous soyons iustes devant Dieu, quand nous vivrons<br />
chastement, sans faire tort à personne, que nous<br />
vivrons en temperance, en sobriété et en toutes<br />
autres vertus, ils estiment que S. Paul ne touche<br />
point à cela et qu'il veut bien que toutes ces<br />
oeuvres-la méritent salut en partie: mais ils entendent<br />
que les ceremonies de la [pag. 151] Loy ne<br />
pouvoyent profiter à iustifier. Or c'est une sottise<br />
par trop lourde: car en premier lieu S. Paul ne<br />
parle point tousiours des ceremonies de la Loy. Et<br />
voila en quoy ils se sont trop inconsidérément<br />
abusez: et qu'ainsi soit au passage du Pseau. que<br />
ie viens d'alléguer, David a situé la beatitude de<br />
l'homme en la seule remission des péchez sans<br />
aucune ouvre; et ce mot-la d'oeuvres comprend en<br />
soy toutes les vertus en general, lesquelles les<br />
hommes se peuvent attribuer, et d'où ils prenent