volumen xxiii. - Archive ouverte UNIGE
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715 SERMONS. 716<br />
dit, qu'il nous faut estre asseurez que Dieu nous<br />
aime, qu'il nous reçoit, et que nous luy sommes<br />
agréables comme si nous estions iustes. Et par quel<br />
moyen obtenons-nous un tel privilege? Il faut venir<br />
à ce que dit sainct Paul au dixième chap, des<br />
Romains. C'est que nous iettons la veue sur nostre<br />
Seigneur Iesus Christ. Car quand on nous parle<br />
de nostre salut, d'un costé le [pag. 164] ciel nous<br />
e8tonne: car sommes-nous dignes d'approcher de<br />
là? Et puis nous voyons l'enfer qui est devant nous<br />
tout ouvert pour nous engloutir, d'autant que nous<br />
sommes povres pécheurs. Nous demanderons donc<br />
d'un costé, et qui est-ce qui montera au ciel? Car<br />
nous ne pouvons pas estre capables d'y venir: où<br />
sont les ailes pour monter si haut: Et puis comme<br />
i'ay dit, le gouffre d'enfer nous est appresté, voire<br />
si Dieu nous veut iuger: nous dirons donc, et que<br />
savons-nous si nous sommes quittes et absous, que<br />
Dieu ne nous abysme? Or là dessus sainct Paul<br />
respond, et ameine le remède, qu'il ne nous faut<br />
point douter du ciel. Et pourquoy?, Car en la<br />
personne de nostre Seigneur Iesus Christ, nous<br />
savons qu'il a esté ouvert. C'est arracher Iesus<br />
Christ, dit-il, quand nous demanderons plus avec<br />
doute, qui montera? Car nous savons que le<br />
Fils de Dieu a protesté qu'il y a plusieurs logis<br />
en la maison de son Père, et qu'il n'y a pas<br />
esté receu pour son profit particulier, mais que c'a<br />
esté à fin de nous recueillir à soy comme ses<br />
cohéritiers. Touchant des enfers, il y est descendu:<br />
car il a souffert les angoisses qui nous estoyent<br />
apprestees, il a souffert les horribles tormens de la<br />
malediction de Dieu, iusqu'à dire, Mon Dieu, mon<br />
Dieu pourquoy m'as-tu laissé? Ainsi donc quand<br />
nous prenons la certitude de nostre [pag. 165] salut,<br />
voila comme nous sommes asseurez. Et c'est aussi<br />
ce qu'il entend au huitième chap, des Romains.<br />
Qui accusera contre les eleus de Dieu? dit-il: Il<br />
despite là et Satan et tout ce qui nous est contraire,<br />
comme s'il disoit, moyennant que nous ayons renoncé<br />
à toute arrogance, et que nous n'imaginions point<br />
de rien pouvoir venans à Dieu sachans que pource<br />
qu'il nous a eleus par sa bonté gratuite, comme il<br />
nous a aussi appelez à soy par l'Evangile, qu'on<br />
accuse tant qu'on voudra, si seront-nous iustifiez et<br />
absous de luy: et comment? Car voila nostre<br />
Seigneur Iesus Christ qui intercede, dit-il, et en<br />
vertu de ceste prière, d'autant qu'il est nostre advocat<br />
pour appaiser l'ire de Dieu son Père, voila<br />
comme nous sommes absous. Et c'est la certitude<br />
de laquelle il parle au quatrième chap, des Rom.<br />
comme nous avons desia touché. Et cela aussi<br />
nous est déclaré en la personne du povre Publicain<br />
c'est à dire du receveur des tailles qui estoit reietté<br />
de tout le peuple, quand il se présente à Dieu. Il<br />
n'y vient point la teste levée, il est vray qu'il a<br />
bien conceu pleine fiance que Dieu le recevra à<br />
mercy: et en cela il est hardi comme il nous le<br />
faut estre aussi, selon qu'il est escrit au troisième<br />
chapitre des Ephesiens. Mais quand il se regarde,<br />
il baisse la teste, il est confus, et ne demande sinon<br />
pardon: et Iesus Christ [pag. 166] dit, qu'à ce seul<br />
mot il a esté iustifié. Voila cependant le Pharisien<br />
qui est reietté, d'autant qu'il a apporté ceste folle<br />
presumption de ses oeuvres. Et le Publicain qui<br />
confesse purement et simplement qu'il est un povre<br />
damné, le voila iuste devant Dieu: et toutesfois le<br />
Pharisien ne s'estoit point attribué la louange de<br />
ses mérites, il n'a pas dit, i'ay fait ceci et cela, et<br />
Dieu en est tenu à moy: mais tant seulement,<br />
Seigneur ie te rends graces de ce que ie ne suis<br />
point larron, ne brigand, ne un homme dissolu, et<br />
mesmes comme est cestuy-ci. Voila une belle entree<br />
ce semble quand il se remet du tout à Dieu, et<br />
proteste que tout le bien et toutes les vertus qu'il<br />
a vienent de pur don de son sainct Esprit: mais<br />
quoy? Il ne laisse pas d'estre enflé de ceste outrecuidance,<br />
que par ses mérites il est approuvé. Ainsi<br />
donc voila pourquoy Dieu le condamne : car il faut<br />
bien qu'il soit stupide tant et plus, quand il pense<br />
à tenir Dieu obligé à cause de ses oeuvres. H ne<br />
reste donc sinon d'avoir nostre refuge à la pure<br />
miséricorde de Dieu, et alors nous serons asseurez<br />
qu'il nous aimera, quand, di-ie, nous cercherons<br />
tous nos mérites en Iesus Christ, et que nous ne<br />
laisserons point d'invoquer Dieu quelque indignité<br />
qu'il y ait en nous, d'autant que ce n'est point à<br />
cause de nos personnes [pag. 167] ne de nos oeuvres<br />
qu'il nous a adoptez, mais que c'est sa pure et<br />
gratuite miséricorde: voila comme nous serons<br />
asseurez de nostre salut. Or il est bien vray que<br />
nous aurons tousiours quelques scrupules, comme<br />
la foy n'est iamais parfaicte en nous: mais tant y<br />
a qu'encores tousiours l'asseurance surmonte, quand<br />
nous combatous vertueusement et que nous embrassons<br />
les promesses de Dieu, que nous en faisons<br />
bouclier à l'encontre de toutes tentations, et de toutes<br />
les deffiances que le diable nous propose. Quand<br />
donc nous parlons de ceste certitude de foy, nous<br />
n'entendons pas qu'il n'y ait rien pour nous<br />
esbranler, et que quelque fois nous n'ayons de<br />
grandes perplexitez et destresses en nous : mais nous<br />
entendons qu'en la fin nous concluons quoy qu'il en<br />
soit que Dieu aura pitié de nous, et l'invoquons<br />
sur cest arrest-la. C'est donc ce. que maintenant nous<br />
avons à retenir. Or par cela nous voyons aisément que<br />
ceux qui ont pris ce mot de iustifier, pour dire que<br />
Dieu nous change, et qu'il nous gouverne par son<br />
sainot Esprit, à fin que nous le servions, se sont<br />
trop lourdement abusez: car il y en a bien qui<br />
confesseront que nous ne sommes point iustes par<br />
nos mérites, que nous n'avons point une seule goûte