volumen xxiii. - Archive ouverte UNIGE
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705 SERMONS. 70S<br />
nos a apportez, et du salut que nous avons par sa<br />
mort et resurrection. Les uns se persuadent valloir<br />
quelque chose [pag. 143], et là dessus despitent<br />
Dieu en leur orgueil: comme ceux qui ont quelque<br />
beau lustre de iustice, ces dévots qui contrefont<br />
une grande saincteté, et comme Angélique, ceux-là,<br />
di-ie, se ferment la porte, et n'ont entree aucune<br />
à Iesus Christ: car ils le repoussent aussi bien<br />
loin d'eux. Il y en a d'autres qui sont nonchalans<br />
et ne cuident point estre iustes. Et pourquoy?<br />
Les uns sont paillards, les autres seront larrons,<br />
les autres seront gens yvrongnes, dissolus, contempteurs<br />
de Dieu, en sorte que les petis enfans<br />
peuvent estre leurs iuges. Ceux-là donc ne sont<br />
pas deceus par orgueil et outrecuidance, mais ils<br />
sont tellement enyvrez de Sathan, qu'ils ne pensent<br />
point à la vie éternelle, ils s'abrutissent du tout.<br />
Et voila pourquoy il est dit par Salomon, Bien<br />
heureux est l'homme qui solicite son coeur. Et<br />
qui s'induit à crainte et qui se reveille pour cognoistre<br />
ses fautes et povretez. Ainsi donc nous voyons<br />
que la Loy n'a esté donnée après la promesse<br />
pour autre raison que pour nous condamner, à fin<br />
que nous cerchions toute nostre iustice en Dieu et<br />
que toute la louange de nostre salut luy soit rendue,<br />
comme elle luy appartient. Notons bien donc ceste<br />
cause finale, car voila aussi pourquoy sainct Paul<br />
au premier chapitre desEphesiens [pag. 144] déduit<br />
ceste matière tout au long. Car il ne passe point<br />
cela en un mot, mais il déduit ce mesme propos,<br />
comme s'il le vouloit entonner en nos aureilles,<br />
Afin, dit-il, que la gloire de Dieu fut cogneue, et<br />
que luy seul soit glorifié, que luy seul soit cognu<br />
iuste, à fin que nous cognoissions que c'est de luy,<br />
que nous tenons tout. Il faut, dit-il, que nous<br />
cognoissions que sans sa pure grace nous estions<br />
tous péris. Voila en somme à quoy Dieu pretend<br />
quand il nous despouille de toute opinion de nos<br />
vertus, c'est qu'il veut estre luy seul cognu iuste,<br />
et que nous soyons perdus et damnez en nousmesmes.<br />
Et ainsi ceux qui s'attribuent tant peu<br />
que ce soit de iustice, comme s'ils avoyent aidé à<br />
Dieu, comme les Papistes s'appelent cooperateurs,<br />
il est certain que ceux-là commettent un crime<br />
plus detestable que tous les larrons du monde.<br />
Qu'est-ce d'avoir ravi à un homme or et argent et<br />
toute sa substance, au pris de ravir à Dieu son<br />
honneur et le principal qu'il demande et qu'il se<br />
veut reserver? C'est que luy seul soit cognu iuste:<br />
et quand des povres creatures mortelles ou des<br />
vermines de terre, où il n'y a qu'infection et<br />
puantise, se voudront mettre au lieu de Dieu pour<br />
dire: Tu n'es point tout quant à l'oeuvre de nostre<br />
salut, mais nous y avons aidé. Ne voila point un<br />
blaspheme [pag. l£5] execrable, quand les hommes<br />
présument d'apporter quelque portion de leur iustice<br />
Calvini opera. Vol. XXIII.<br />
devant Dieu? Or nous avons à retenir ce qui fut<br />
hier traitté, c'est assavoir, que le mot de Iustifier<br />
n'emporte pas que nous soyons faits iustes, c'est à<br />
dire, que Dieu nous renouvelle tellement que nous<br />
soyons des Anges: mais il emporte qu'il nous<br />
accepte et approuve par sa pure bonté, encores<br />
que nous soyons povres pécheurs. Et voila pourquoy<br />
aussi Moy8e en ce passage a couché le mot<br />
de Reputer, comme s'il disoit que cela depend de<br />
la faveur gratuite de Dieu, et qu'il ne faut point<br />
s'enquérir si la iustice est au regard de l'homme,<br />
ou s'il a esté digne d'estre accepté. Rien de tout<br />
cela, mais contentons-nous que Dieu nous accepte<br />
pour iustes encores que nous ne le soyons pas. Et<br />
voila aussi pourquoy la iustice de la foy exclud<br />
les oeuvres: car nous prenons de Iesus Christ ce<br />
qui nous deffaut. le ne di pas en partie, comme<br />
les Papistes s'embrouillent, mais nous empruntons<br />
la iustice de Iesus Christ, d'autant qu'il n'y en a<br />
point une goutte ni un seul grain en nous. Il<br />
faut donc que les oeuvres soyent abatues, quand<br />
nous cerchons nostre iustice ailleurs. Car s'il y<br />
en avoit seulement une portion en Iesus Christ et<br />
une partie en nous, il ne seroit pas le tout: et<br />
comment s'accompliroit [pag. 146] ce qui est dit<br />
que toute plenitude de graces a esté en luy, et que<br />
cela a esté donné par le sainct Esprit, à fin qu'il<br />
nous en distribue à un chacun selon sa mesure?<br />
Car ce sont choses opposites d'acquérir et de recevoir<br />
de Dieu: et quand Dieu nous iustifie c'est par<br />
son adoption, d'autant que de nature nous sommes<br />
enfans d'ire, il nous adopte et nous retient pour<br />
ses enfans. Et qu'est-ce qu'il trouve en nous?<br />
Rien qui soit pour l'induire à nous bien faire.<br />
Ainsi donc l'héritage que nous espérons de nostre<br />
salut, et lequel nous est promis en l'Evangile,<br />
vient de ceste adoption de Dieu, et ny a rien du<br />
nostre: car si nous pouvons acquérir quelque chose,<br />
il est certain qu'alors nous entrerions en partage<br />
avec Dieu, ainsi que les Papistes y viennent: mais<br />
d'autant que Dieu besongne en telle sorte qu'il n'y<br />
a rien de nostre costé, voila comme il doit estre<br />
luy seul glorifié. Or maintenant nous voyons en<br />
somme que la iustice de laquelle il est ici parlé,<br />
n'emporte que la remission des péchez, et l'adveu<br />
que nous avons au nom de nostre Seigneur Iesus<br />
Christ, d'estre iustes parle mérite de son obéissance:<br />
mais encores quand sainct Paul nous veut enseigner<br />
rudement selon nostre petisse *, il ameine seulement<br />
la remission des péchez, et argue en telle sorte,<br />
Nous ne pouvons estre iustifiez par nos oeuvres:<br />
pourquoy? [pag. 147] Car il est escrit, Bien<br />
heureux est l'homme à qui Dieu pardonne les<br />
péchez, duquel les iniquitez sont remises, et auquel<br />
les fautes ne sont point imputées. Voila, dit-il,<br />
toute nostre félicité, quand Dieu nous reçoit à merci,<br />
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