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743 SERMONS. 744
fait sans en estre requis. Cependant nous voyons chacun fidèle pense de garder sa maison pure et
à, l'opposite que cela ne l'a pas empesché de faire nette de toutes polutions. Il est vray qu'auiourd'huy
hommage à Dieu. Et combien que ce fust une il n'y a plus ceste cérémonie que Dieu commandoit
chose odieuse (ainsi que nous avons monstre cy aux Iuifs, c'est assavoir, qu'ils dédiassent leurs
dessus) d'avoir une religion à part, et séparée de maisons devant qu'en user: mais la vérité nous de­
celle de ceux entre lesquels il conversoit: neantmeure, et la fin que Dieu a regardé, c'est assavoir,
moins si n'a-il point voulu défaillir qu'il ne fist quand nous sommes logez, que ce ne soit point une
confession de sa foy telle que Dieu luy avoit com­ cachette pour exclurre la presence de Dieu, que
mandée. Ainsi nous voyons, qu'envers Dieu et nous ne nous permettions point licence de cheminer
envers les hommes, il s'est tellement porté, qu'il selon nos appetis: mais d'autant que Dieu nous a
nous peut estre un exemple de vraye humilité, fait ce bien que nous ayons maison, et ne fust-ce
pour nous monstrer comment nous devons rendre qu'un petit anglet de retraite, qu'il soit honoré là,
buietion à ceux ausquels nous la devons: tellement et que le lieu soit dédié à son service. Or cela
toutesfois que cependant Dieu ait son empire sou­ n'est pas pour les parois et pour le toict: mais c'est
verain : et que si les hommes ont quelque supériorité pour la famille, c'est assavoir, que nous soyons du
et preeminence, cela ne derogue en rien à la maiesté tout siens, et que nous luy facions oblation de nos
celeste, laquelle doit obscurcir toute hautesse humaine. corps et de nos âmes, et mettions peine aussi que
Il est bien certain que si Abraham eust voulu gra­ tout le reste [pag. 222] ressemble et s'y conforme!
tifier à ses voisins, il se fust conformé à leurs Or un père de famille le doit commencer par sa
façons de faire, et n'eust pas declairé qu'il avoit personne: mais cependant si faut-il qu'il instruise
un Dieu lequel il vouloit adorer, renonçant à toutes sa femme. Si Dieu luy a donné des enfans, ou
les idolatries qui [pag. 220] avoyent desia la vogue, des serviteurs, que tout cela soit tenu en l'obéissance
et à toutes les superstitions desquelles la terre de Dieu. Voila donc, la façon de dédier les maisons,
estoit remplie et pollue. Mais quoy qu'il en soit, et par consequent d'invoquer le nom du Seigneur,
il proteste de vouloir servir et adorer Dieu pure­ selon qu'il en est ici parlé d'Abraham. Or c'est
ment. Et pour ceste cause, il a son autel, comme une chose mal practiquee. Car nous voyons comme
nous avons veu, auquel il fait hommage solennel chacun veut servir Dieu à sa poste: cependant
à Dieu, et par ce moyen renonce à tous les vices, Dieu n'est quasi rien. Si les maistres et les
et à toutes les corruptions qui estoyent entre ses maistresses tirent de }eurs serviteurs de la peine
voisins : comme s'il les condamnoit, et qu'il monstrast pour leur profit et commodité, ils se contentent de
qu'il n'y a qu'un seul vray service qui soit agréable cela. Si Dieu y est blasphémé, s'il y est mesprisé,
à Dieu: comme aussi il n'y a qu'un seul Dieti si la maison est profanée, qu'il n'y ait ni zèle ni
vivant, et que tout le reste n'est qu'imagination religion, cela passe et s'escoule. Or il est certain
fausse et tromperie. Auparavant desia combien que Dieu ne quittera pas ainsi son droit. AppVe-
qu'il n'eust nul arrest, et qu'il fust tracassé de costé nons donc, de tellement user des maisons où nous
et d'autre: si est-ce qu'il ne laissoit pas d'invoquer sommes logez, que Dieu y habite comme nostre
Dieu partout où il venoit, c'est à dire, de monstrer souverain, et que petis et grands se dédient à luy,
qu'il ne s'accordoit point à tous les erreurs qui et s'offrent non seulement d'ame, mais aussi de corps :
avoyent, pour ce temps-la, la vogue par le monde. me8mes ceux qui ne peuvent pas honorer Dieu pour
Mais ici il a une raison speciale pour invoquer danger de leur vie, ne sont pas excusez pourtant:
Dieu derechef en ce lieu-la: pource qu'il avoit plus car o'e8t une chose trop précieuse que l'honneur
de repos et de commoditez qu'auparavant. Car que nous luy devons. " Et ne faut pas alléguer, qu'il
iamais il n'a voit osé planter un arbre: il en plante ne nous est pas permis, et que nous n'avons pas
maintenant plusieurs, d'autant qu'il luy est permis la liberté." Car quoy qu'il en soit [pag. 223], ce qui
de demourer là. Et comme il a fait hommage au nous est ici recité d'Abraham; nous dpit servir
roy terrien, auquel le pays appartenoit: il veut d'instruction. Car nous savons qu'il est patron de
aussi monstrer, qu'il n'a pas oublié Dieu, qu'il n'a tous fidèles, d'autant qu'il est leur Père. Puis
pas refroidi le zèle qu'il avoit, qu'il [pag. 221] ne le qu'ainsi est donc, encores que nous fussions meslez
tiene tousiours pour son prince souverain, s'humilie parmi les ennemis de Dieu et de sa vérité, et que
sous luy, et vueille demourer en sa protection. là persecution fust prochaine, que nous facions con­
Voila donc pourquoy notamment Moyse recite, fession de nostre foy. Car il nous faut tousiours
qu'Abraham a invoqué le nom du Seigneur. La préférer ce qui est le principal à tous accessoires.
loy de dédier les maisons n'estoit pas encore es- Voila donc, ce que nous avons à retenir sur ce
crite, mais il n'a pas laissé de l'observer, c'est à passage. Qr notamment il est dit, qu'il invoque
dire, il a monstre par effet que le lieu de sa demeure le nom de l'Eternel, et Dieu du siècle, c'est à dire,
«stoit un temple de Dieu: comme il faut aussi que I du Dieu de tousiours. Ici Moyse fait .comme une