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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

d’ailleurs en français par le couple Č<strong>ep</strong>. De pareilles situations donnent l’occasion <strong>à</strong><br />

l’auteur <strong>de</strong> mettre en scène tout un défilé d’exilés, <strong>de</strong> saisir leur grouillement, <strong>de</strong> faire<br />

rencontrer leurs différents types, bons ou méchants, d’en tirer facilement les intrigues<br />

nécessaires au roman. Č<strong>ep</strong> lui aussi emploie la situation d’une célébration <strong>de</strong> la fête<br />

nationale par la diaspora <strong>de</strong>s émigrés <strong>à</strong> Paris pour en faire le point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong> son récit<br />

Devant la porte fermée. Pour Č<strong>ep</strong> qui n’écrit pas un roman, il s’agit moins <strong>de</strong> tramer<br />

une intrigue que d’évoquer une atmosphère ennuyeuse et malsaine qui règne au sein <strong>de</strong><br />

la communauté <strong>de</strong> l’émigration tchèque. Le lustre <strong>de</strong> la fête ne peut cacher non plus le<br />

dénuement matériel, la non-assurance existentielle <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s participants aussi<br />

bien que l’éparpillement et la dissension latente <strong>de</strong> la diaspora tchèque :<br />

On voyait <strong>de</strong>s manteaux <strong>de</strong> coupe parfaite, luisant <strong>de</strong> blancheur, et tout près <strong>de</strong>s habits élimés, <strong>de</strong>s<br />

cravates chiffonnées, <strong>de</strong>s cols avec <strong>de</strong>s traînés sales. Manifestement, ils ne sont pas tous partis dans<br />

les mêmes vêtements et dans les <strong>de</strong>rniers mois, ils ne dormaient pas toutes les nuits dans un lit. Les<br />

regards par lesquels ils se rencontraient et se fuyaient trahissaient déj<strong>à</strong> le soupçon, les récriminations,<br />

la jalousie. 410<br />

Dans les premiers moments d’euphorie Kříž écrivait <strong>à</strong> ses amis <strong>de</strong>s phrases pleines<br />

d’espoir et sa bonne volonté d’être utile dans le pays d’adoption. Il s’avère convaincu<br />

que la présence <strong>de</strong>s exilés ne restera pas « stérile » et portera ses fruits sous forme <strong>de</strong><br />

« semence d’une nouvelle communauté entre les pays et les nations » 411 . C<strong>ep</strong>endant<br />

bientôt il est contraint <strong>de</strong> s’avouer l’échec <strong>de</strong> cette mission en<br />

s’interrogeant douloureusement :<br />

Où sont les liens vivants qui l’attachent <strong>à</strong> cette ville, aux gens qui l’habitent ? Lui-même, n’est-il pas<br />

menacé <strong>de</strong> rester un élément étranger dans la chair <strong>de</strong> ce pays, une chose séparée pour toujours, <strong>de</strong><br />

plus en plus fatiguée et usée, que la botte d’un piéton distrait écartera finalement dans le caniveau ? 412<br />

Le nom propre <strong>de</strong> la personne est un trait <strong>de</strong> son individualité, il fait même partie <strong>de</strong><br />

son i<strong>de</strong>ntité. Or, celle-ci est en exil violemment foulée et humiliée. L’émigré Pavel Kříž<br />

n’est pas reconnu en tant qu’être libre et autonome, jouissant <strong>de</strong>s droits civiques, il est<br />

réduit au statut <strong>de</strong> détenteur d’un récépissé délivré par une autorité anonyme. L’exil<br />

410 « Bylo vidět kabáty bezvadného střihu, košile, které svítily bělostí, a vedle nich šaty ošumělé, kravaty<br />

pomačkané, límečky s čmouhami špíny. Neo<strong>de</strong>šli zřejmě všichni v stejných šatech, a za posledních<br />

několik měsíců nespali všichni každou noc v pos<strong>tel</strong>i. Pohledy, kterými se setkávali i kterými se vyhýbali,<br />

prozrazovaly už po<strong>de</strong>zření, výčitky, závist. », Œuvres III, p. 361.<br />

411 Œuvres III, p. 366.<br />

412 « K<strong>de</strong> jsou živá vlákna, která ho poutají k tomuto městu, k li<strong>de</strong>m, kteří v něm bydlí? Nehrozí jemu<br />

samému, že zůstane cizím tělesem v tkáni této země, věcí navždy oddělenou, čím dá tím unavenější a<br />

ošumělejší, kterou nakonec odhrne bota roztržitého chodce do rigola pod chodníkem? », Œuvres III,<br />

p. 366.<br />

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