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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

affaiblie, les répliques seraient <strong>de</strong>venues banales. De surcroît, les segments français<br />

peuvent, involontairement, exciter le comique dans la vie réelle <strong>de</strong>s exilés. Ceci, lorsque<br />

après la parution du recueil Les Tziganes, Vladimír Peška « se plaint » que leurs femmes<br />

« incultes » [comprends la femme <strong>de</strong> Peška et la future <strong>de</strong> Č<strong>ep</strong>] ne font que piocher <strong>de</strong>s<br />

expressions qu’elles comprennent et « s’en moquent perfi<strong>de</strong>ment ». Et il n’oublie pas<br />

d’exhorter Č<strong>ep</strong> pour qu’il « écrive la prochaine fois quelque chose qu’elles comprennent<br />

[l’œuvre en français] » 418 .<br />

La scission linguistique ne se révèle pas seulement dans le matériau linguistique <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux récits, elle se manifeste également dans leur thématique. De ce point <strong>de</strong> vue le<br />

thème <strong>de</strong> la communication, <strong>de</strong> ce qu’elle est possible ou non, est très significatif.<br />

D’une part la communication <strong>de</strong>s personnages exilés avec les Français se limite aux<br />

dialogues conventionnels, composés <strong>de</strong> banalités plates qui ne disent rien. C’est le cas<br />

<strong>de</strong> la rencontre <strong>de</strong> Pavel Kříž avec les dames Lecoq et Vernier : « ‘Et vous,’<br />

<strong>de</strong>mandèrent-elles <strong>à</strong> Pavel <strong>de</strong> temps <strong>à</strong> autre, ‘ça va ?’ Pavel répondait : ‘Merci, ça va,’ et<br />

dans ses oreilles résonnait le mot qu’il avait entendu un moment plus tôt dans la salle :<br />

‘Cela donne le cafard’ » 419 . Ou bien, la communication ne peut pas aboutir du tout en<br />

raison <strong>de</strong> sa complexité et <strong>de</strong> l’incapacité <strong>à</strong> éluci<strong>de</strong>r par exemple la situation politique<br />

dans le pays natal pour les personnes qui n’en possè<strong>de</strong>nt que <strong>de</strong>s informations<br />

superficielles, voire déformées. Une scène <strong>de</strong> l’Ile <strong>de</strong> Ré où le voisin alsacien tente au<br />

cours <strong>de</strong>s dîners dans le restaurant d’hô<strong>tel</strong> d’entr<strong>ep</strong>rendre avec le narrateur <strong>de</strong>s<br />

entretiens au sujet <strong>de</strong> la politique l’illustre fort bien :<br />

« Chez vous, il y a <strong>de</strong>s Russes, <strong>à</strong> présent ? » <strong>de</strong>manda-t-il. Je commençai <strong>à</strong> expliquer, mal avec<br />

dégoût. Il m’écouta un instant, puis il posa une question innocente : « Y a-t-il une chance qu’une<br />

insurrection va éclater chez vous ? » – Ah, que c’est loin <strong>de</strong> Mulhouse <strong>à</strong> Prague ! Je crois, que j’ai<br />

seulement hoché la tête, et puis nous ne parlions plus <strong>de</strong> la politique. 420<br />

La communication est perturbée, vouée <strong>à</strong> l’échec non pas parce que l’émigré ne<br />

parlere pas la langue <strong>de</strong>s autochtones, mais parce que son expérience interne (le pouvoir<br />

418 V. Peška <strong>à</strong> J. Č<strong>ep</strong>, le 20. novembre 1953.<br />

419 « ‚Et vous,‘ ptaly se občas Pavla, ‚ça va?‘ Pavel odpovídal: ‚Merci ça va,‘ a v uších mu znělo slovo,<br />

které zaslechl před chvílí v sále: ‚Cela donne le cafard.‘ », Œuvres III, p. 362.<br />

420 « ‚U vás jsou teď Rusové?‘ ptal se. Začal jsem vysvětlovat, špatně a s nechutí. Chvíli mě poslouchal,<br />

a potom se z<strong>ep</strong>tal nevinně: ‚Je naděje, že u vás vypukne povstání?‘ – Ach, jak je daleko z Mulhouse do<br />

Prahy! Myslím, že jsem jenom zakroutil hlavou, a potom jsme už o politice nemluvili. », Œuvres III,<br />

p. 371.<br />

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