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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

Enfin, il y a <strong>de</strong>s écrivains comme Julien Green qui sont pour Č<strong>ep</strong> avant tout <strong>de</strong>s<br />

« créateur[s] <strong>de</strong> l’espace du silence » 626 , ce qui n’est pas pour Č<strong>ep</strong> une chose<br />

insignifiante, <strong>à</strong> l’ « époque <strong>de</strong>s records <strong>de</strong> vitesse et du vacarme assourdissant <strong>de</strong> la<br />

propagan<strong>de</strong> idéologique et politique ». Il est intéressant <strong>de</strong> voir comment, même dans<br />

un genre aussi objectif que le compte rendu, Č<strong>ep</strong> arrive <strong>à</strong> introduire un souvenir tout<br />

personnel, s’il entre dans la logique <strong>de</strong> sa pensée. De ce tapage <strong>de</strong> la société mo<strong>de</strong>rne lui<br />

revient la phrase dont se servaient les parents afin <strong>de</strong> calmer la « marmaille » criar<strong>de</strong> :<br />

« Ne criez pas autant, on ne s’entend pas parler». Et il développe l’analogie avec la<br />

situation présente : « Nous pourrions dire que par tout ce bruit, nous n’entendons plus<br />

nos propres paroles, et encore moins nos propres pensées, ni la pensée ni le sentiment<br />

d’autrui. » 627 Pour conclure son compte rendu, il souligne encore une fois l’importance<br />

et la nécessité d’un moment silencieux, propice <strong>à</strong> la méditation, dans un mon<strong>de</strong> qui ne<br />

fait que s’accélérer, voire se défaire :<br />

Il est sans doute suprêmement utile pour la santé spirituelle <strong>de</strong> l’homme mo<strong>de</strong>rne qu’il existe <strong>de</strong>s<br />

écrivains qui ne crient pas et qui ne se hâtent pas. Le regard attentif, la parole apaisante, qui se place<br />

comme un doigt sur une chose ont dans notre situation le poids et l’importance d’un acte. Nous<br />

péririons d’étouffement si, autour <strong>de</strong> certaines personnes <strong>de</strong> notre époque, ne s’étendaient <strong>de</strong>s oasis<br />

contemplatives, si certains esprits n’étaient pas capables non seulement <strong>de</strong> voir les choses dans leur<br />

mouvement vertigineux mais aussi <strong>de</strong> les peser dans ce qui ne passe pas. 628<br />

Toutes les œuvres traitant un sujet religieux ne sont pas aussi paisibles que le Journal<br />

d’un Julien Green. Č<strong>ep</strong> est tenté aussi par <strong>de</strong>s livres dans lesquels le problème religieux<br />

626 Déj<strong>à</strong> en 1949, ayant lu <strong>de</strong>s extraits du Journal <strong>de</strong> Green dans la Table Ron<strong>de</strong>, Č<strong>ep</strong> apprécia sa voix<br />

tranquille et en fut enthousiasmé au point d’écrire <strong>à</strong> l’auteur une lettre personnelle, une sorte <strong>de</strong><br />

remerciement. Dans la lettre on peut lire aussi ces paroles : « Je suis persuadé que je ne suis pas seul<br />

parmi vos lecteurs non-français qui vous suis particulièrement reconnaissant d’écrire et <strong>de</strong> publier ce<br />

journal, au milieu <strong>de</strong> notre univers rempli <strong>de</strong> vacarme inhumain et d’où sont bannis toute intimité, tout<br />

soliloque, toute contemplation qui mettent l’homme face <strong>à</strong> face avec Dieu et avec sa création humiliée et<br />

souillée. […] Vous avez un art <strong>de</strong> créer le silence par votre parole attentive, un silence bienheureux qui se<br />

pose comme un baume sur les cœurs endoloris et dans lequel se rencontrent les âmes <strong>de</strong> ceux qui, tout en<br />

aimant la création <strong>de</strong> Dieu d’une tendresse nostalgique se savent <strong>de</strong> peregrini in terra et tâchent <strong>de</strong> vivre<br />

tamquam nihil habentes et omnia possi<strong>de</strong>ntes. Et ce sont ceux- l<strong>à</strong>, finalement, qui sauveront le mon<strong>de</strong>, si<br />

Dieu veut qu’il soit encore sauvé, et qui contribueront <strong>à</strong> renouveler cette gran<strong>de</strong> communauté humaine<br />

dont les tentatives <strong>de</strong>s réformateurs et révolutionnaires sociaux obsédés par l’idée d’une humanité divisée<br />

par sa propre force ne réussissent <strong>à</strong> réaliser que <strong>de</strong>s caricatures monstrueuses. », Cf. Journal, le 10 mars<br />

1949.<br />

627 « ‘Nekřičte tolik, vždyť tu není slyšet vlastního slova,’ říkávali v mém kraji rodiče dětem. Mohli<br />

bychom říci, že pro sám hluk, neslyšíme ani my svého slova, tím mémě vlastní myšlenku, nebo myšlenku<br />

a cit druhého člověka. », J. Č<strong>ep</strong>, « J. Green : Deník VI », Livre <strong>de</strong> la semaine, le 8 mai 1955, p. 7.<br />

628 « Je zajisté svrchovaně potřebné k duchovnímu zdraví mo<strong>de</strong>rního člověka, aby existovali spisova<strong>tel</strong>e,<br />

kteří nekřičí a nespěchají. Pozorný pohled, tiché slovo, které se položí jako prst na věc, mají v naší situaci<br />

váhu a význam činu. Zahynuli bychom udušením, kdyby se okolo některých lidí naší doby nešířily<br />

kontemplativní oasy, kdyby nebyli někteří duchové schopni nejenom vidět věci v jejich závratném<br />

pohybu, ale zároveň je vážit v tom, co z nich n<strong>ep</strong>omíjí. », J. Č<strong>ep</strong>, « J. Green : Deník VI », Livre <strong>de</strong> la<br />

semaine, le 8 mai 1955, p. 7.<br />

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