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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

Il ne connaissait pas un pays au mon<strong>de</strong>, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> son propre pays, vers qui son cœur se penchait<br />

par un mouvement aussi naturel que celui-ci. Et pourtant, il avait le sentiment embarrassant comme si<br />

quelqu’un pourrait lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>à</strong> chaque moment : « Mon ami, comment es-tu venu ici ? » 439<br />

La désillusion s’accroît dans la mesure où l’émigré perd le sens <strong>de</strong> son exil, où il<br />

s’aperçoit <strong>de</strong> ce qu’il est l<strong>à</strong> pour rien, que personne ne lui prête l’oreille, n’écoute ce<br />

qu’il a <strong>à</strong> dire, que tout le mon<strong>de</strong> reste indifférent <strong>à</strong> son témoignage. L’amour voué au<br />

pays d’adoption semble irréfutablement perturbé et la vie <strong>de</strong> bonne aloi impossible.<br />

Ainsi le seul lieu <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>meure pour le héros č<strong>ep</strong>ien le pays d’enfance :<br />

« C’est seulement dans le paysage <strong>de</strong> l’enfance que ce sentiment effrayant le quittait.<br />

L<strong>à</strong>, personne ne pouvait dénier son droit au chez-soi (domov) ; l<strong>à</strong>, il avait vraiment le<br />

droit d’être. » 440<br />

Ici et l<strong>à</strong>-bas, la France et le pays d’enfance ; il y a une vraie dialectique entre ce<br />

« double chez soi » concrétisé. L’exilé peut-il rester stable dans ce va-et-vient incessant<br />

entre les <strong>de</strong>ux réalités ? Comme nous l’avons déj<strong>à</strong> dit, le fantasme du retour rêvé ou<br />

imaginé dans le pays d’enfance (le premier chez-soi) est fallacieux, possible seulement<br />

pour un court moment et racheté par un réveil amer. D’autre part l’actualité cruelle du<br />

second chez-soi peut renverser les racines (l’i<strong>de</strong>ntité) mêmes <strong>de</strong> l’exilé. C’est<br />

uniquement dans un entrelacement, dans une superposition <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux chez-soi, que<br />

l’exilé est en mesure <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r la continuité, sa cohérence intérieure et en même temps<br />

<strong>de</strong> rester ouvert au moment présent et aux perspectives <strong>de</strong> l’avenir. Ainsi est-il très<br />

significatif que ce soit précisément par cet entrelacement <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux pays, adoptif et natal,<br />

que Č<strong>ep</strong> dénoue les <strong>de</strong>ux récits. Par ce procédé d’entrelacement, qui en réalité s’avère<br />

double, concret (les <strong>de</strong>ux pays dans le sens disons géographique) et abstrait (le<br />

quotidien et le transcendant), les <strong>de</strong>ux conclusions, et <strong>de</strong> ce fait les récits en tant que<br />

<strong>tel</strong>s, sont pourvus d’une profon<strong>de</strong> tension sémantique, d’une forte impulsion spirituelle.<br />

A la fin <strong>de</strong> Devant la porte fermée, Pavel Kříž, somnolent et épuisé, se trouve <strong>à</strong> la fois<br />

« ici » et « l<strong>à</strong>-bas », il marche sur le boulevard parisien, croise <strong>de</strong>s passants matinaux et,<br />

simultanément, il sent l’o<strong>de</strong>ur amère <strong>de</strong>s feuilles <strong>de</strong> noyers, entend le grincement <strong>de</strong> la<br />

petite porte paysanne, voit sa mère et se joint <strong>à</strong> sa prière muette (communion) :<br />

439 « Neznal na světě zemi, kromě své vlastní, ke které by tíhlo jeho srdce pohybem tak přirozeným jako<br />

k této. A přece měl tísnivý pocit, jako by se ho mohl někdo každou chvíli z<strong>ep</strong>tat: „Pří<strong>tel</strong>i, jak jsi sem<br />

přišel? », Œuvres III, p. 362.<br />

440 « Jenom v krajině jeho dětství ho opouštěl ten ošklivý pocit. Tam mu nemohl nikdo upírat právo na<br />

domov; tam měl doopravdy právo být. », Œuvres III, p. 365.<br />

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