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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

L’apercevant, il craint tout <strong>à</strong> coup « qu’il ne fût mort, ébloui <strong>de</strong> lumière et assourdi par<br />

le carillon ». Arrachant le vieillard <strong>à</strong> sa contemplation, celui-ci dit comme pour<br />

s’excuser : « Je me suis oublié [je ne sais comment]. » [Nějak jsem se zapomněl]. La<br />

réplique apparemment anodine est dans son contexte investie <strong>de</strong> diverses connotations.<br />

Elle fait penser au recueillement du vieillard <strong>de</strong>vant le tabernacle et fait <strong>de</strong>viner d’ores<br />

et déj<strong>à</strong> ce qui se passe <strong>à</strong> l’intérieur <strong>de</strong> lui (métamorphose spirituelle) et ce qui se<br />

révèlera un peu plus tard dans son dialogue avec Procope. La réplique peut être<br />

interprétée également dans le sens plus prosaïque comme le signe <strong>de</strong> la déchéance<br />

progressive du vieillard, <strong>de</strong> sa perplexité et <strong>de</strong> sa confusion mentale. La plupart <strong>de</strong> ces<br />

interprétations sont rendues impossibles par la traduction française <strong>de</strong> la réplique réduite<br />

<strong>à</strong> son aspect temporel par une formule plate : « J’ai oublié l’heure. »<br />

Un autre exemple, tiré d’un dialogue entre le vieillard et son petit-fils, est situé<br />

quelques pages plus loin. Le grand-père annonce <strong>à</strong> Procope qu’après sa mort il lui<br />

lèguera tout ce qui lui reste – « cette bicoque et ce bout <strong>de</strong> champ <strong>de</strong>rrière le jardin ».<br />

Quelques lignes après, le récit continue ainsi dans la version française : « Procope sourit<br />

lui aussi et le vieillard r<strong>ep</strong>rit, re<strong>de</strong>venu soudain sérieux : ‘Autrement tu n’auras pour ton<br />

héritage que ces quelques morts, <strong>de</strong>rrière l’église.’ » 866 . Or dans l’original, une phrase<br />

énigmatique prolonge la réplique du grand-père : « Et <strong>à</strong> toute église appartient la<br />

morgue. » Que veut-il dire par l<strong>à</strong> ? Faut il rapprocher la morgue <strong>de</strong> la maison du<br />

vieillard qui ne fut plus qu’une « cadavre ambulante » ? Le fait que la traduction<br />

française coupe une <strong>tel</strong>le phrase diminue le mystère et l’ambiguïté qui est pour chaque<br />

livre un ingrédient précieux.<br />

Arrêtons l<strong>à</strong> notre analyse. Il est impossible <strong>de</strong> recenser toutes les différences et<br />

complications entre l’original et la traduction. Il serait d’ailleurs utile et méritoire <strong>de</strong><br />

consacrer une étu<strong>de</strong> particulière <strong>à</strong> l’analyse minutieuse <strong>de</strong>s rares traductions françaises<br />

<strong>de</strong> Č<strong>ep</strong>. Aussi bien qu’il serait louable d’effectuer l’étu<strong>de</strong> stylistique approfondie <strong>de</strong> la<br />

langue č<strong>ep</strong>ienne, cette fois-ci bien sûr maternelle, qui fait jusqu’<strong>à</strong> présent défaut aux<br />

recherches č<strong>ep</strong>iennes. Dans ce chapitre nous voulions simplement démontrer <strong>à</strong> l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

quelques exemples concrets les difficultés qu’encoure le traducteur potentiel <strong>de</strong> l’œuvre<br />

<strong>de</strong> Č<strong>ep</strong>.<br />

866 La Frontière <strong>de</strong> l’ombre, op. cit., p. 155.<br />

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