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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

Or, comme cela s’est révélé plus tard, un seul <strong>de</strong>s passants – on l’appellera par exemple Georges,<br />

s’aperçut que ce champ, un petit paysan le labourait. Et le petit paysan qui laboure, n’omet pas le<br />

sentier, que les pieds <strong>de</strong>s passants doivent frayer après chaque labourage. Sans le sentier égratigné, je<br />

n’aurais rien <strong>à</strong> vous raconter. C’est comme avec tout ce qui nous arrive dans la vie : nous avons pu<br />

aller dans un certain moment <strong>à</strong> droite ou <strong>à</strong> gauche ; nous avons pu saluer une <strong>de</strong>moiselle ou ne pas<br />

saluer ; quel diable (si nous disons « diable », nous voulons seulement dire par l<strong>à</strong> : quel mouvement<br />

intérieur, quel démon dans le sens <strong>de</strong> Socrate) nous a poussé <strong>à</strong> la saluer. Difficile <strong>de</strong> faire tourner les<br />

roues du temps en arrière, inutile <strong>de</strong> se dire, ce qui serait, s’il n’avait pas été. Notre <strong>de</strong>stin s’engage<br />

dans une autre et décisive direction au moment <strong>de</strong> notre plus gran<strong>de</strong> distraction.<br />

Mais j’ai trop digressé ; je voulais seulement dire que lorsque nos passants traversaient le champ, le<br />

sentier n’était pas encore tout <strong>à</strong> fait labouré ; ç<strong>à</strong> et l<strong>à</strong> seulement ils <strong>de</strong>vaient déj<strong>à</strong> enjamber les mottes,<br />

or ceci pour ainsi dire échappa <strong>à</strong> leur attention. 460<br />

Voyons d’abord la situation du narrateur. Celui-ci confirme son omniscience en<br />

révélant sa connaissance <strong>de</strong> la suite <strong>de</strong> l’histoire (« comme cela s’est révélé plus tard »)<br />

aussi bien que sa domination du récit (l’arbitraire <strong>de</strong> dénommer un personnage<br />

Georges). L’intrigue ainsi dévoilée – au retour les passants perdront l’orientation <strong>à</strong><br />

cause du sentier entre-temps labouré par un paysan – lui arrache une digression pseudo-<br />

philosophique sur le <strong>de</strong>stin humain. L’évocation du diable et le passage<br />

métalinguistique précisant la signification <strong>de</strong> la notion n’est évi<strong>de</strong>mment pas chargé ici<br />

<strong>de</strong> connotations religieuses, et n’incombe nullement au domaine métaphysique. Il s’agit<br />

plutôt d’un clin d’œil discret <strong>à</strong> Gi<strong>de</strong> (diable <strong>de</strong>s Faux-Monnayeurs) mais plus encore <strong>à</strong><br />

Pourrat dont Č<strong>ep</strong> venait <strong>de</strong> lire Le Sage et son démon. Enfin, la tournure avec le<br />

« diable » fait partie <strong>de</strong>s locutions idiomatiques relevant du langage populaire.<br />

Le lexique employé dans le passage cité contribue également <strong>à</strong> mettre en relief la<br />

narration plutôt que l’histoire narrée. Spécialement le diminutif « sedláček » (petit<br />

paysan) en combinaison avec la forme verbale archaïque « oře » (laboure) renvoie au<br />

domaine <strong>de</strong>s chansons populaires. De même que la sentence « tourner en arrière les<br />

roues du temps » (ou la tournure <strong>de</strong> « diable » citée plus haut). Il est indéniable que<br />

l’extrait choisi comporte un caractère ludique, amusant, savoureux tant pour le lecteur<br />

qui y découvre <strong>de</strong>s allusions et <strong>de</strong>s jeux <strong>de</strong> mots relevant du registre par exemple <strong>de</strong> la<br />

460 « Ale jak se později ukázalo, všiml si jediný z pocestných – bu<strong>de</strong>me mu říkat třeba Jiří, že to pole<br />

sedláček oře. A sedláček, který oře, nevynechává pěšinu, kterou musejí nohy pocestných po každém orání<br />

znovu vyšlapat. Nebýt té zorané pěšiny, neměl bych vám o čem vypravovat. Je to jako se vším, co nás<br />

potkává v životě: mohli jsme jít jednu chvíli vpravo nebo vlevo; mohli jsme pozdravit slečnu, nebo<br />

n<strong>ep</strong>ozdravit; který čert (říkáme-li „čert“, chceme tím jenom říci: jaké vnitřní hnutí, jaký démon ve smyslu<br />

Sokratově) nás pudil, abychom ji pozdravili. Těžko vracet nazpátek kola času, zbytečné si říkat, co by<br />

bylo, kdyby nebylo bývalo. Náš osud se dává jiným a rozhodujícím směrem ve chvíli naší největší<br />

roztržitosti.<br />

Ale to jsem příliš odbočil; chtěl jsem jenom říci, že když šli naši pocestní přes to pole, pěšina ještě nebyla<br />

docela zorána; jenom sem tam už museli překračovat hroudy, ale to jaksi ušlo jejich pozornosti. »,<br />

Œuvres III, p. 348-349.<br />

170

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