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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

Marcel lorsque ce <strong>de</strong>rnier médite sur la fidélité aux morts 543 , fidélité qui en dépit <strong>de</strong><br />

l’absence physique et objective ne cesse <strong>de</strong> se référer aux morts, <strong>de</strong> continuer en<br />

quelque sorte <strong>de</strong> vivre avec eux. La présence <strong>de</strong>s êtres aimés est incessante pour les<br />

<strong>de</strong>ux penseurs 544 .<br />

Achevons le développement sur la mort par un cas spécifique qu’est le suici<strong>de</strong>. Dans<br />

les proses <strong>de</strong> Č<strong>ep</strong> on rencontre <strong>à</strong> plusieurs r<strong>ep</strong>rises <strong>de</strong>s personnages qui se donnent la<br />

mort. Qu’il s’agisse d’un jeune valet dans le récit Kozlovice (Village Kozlovice) qui se<br />

suici<strong>de</strong> par pur blasphème ou <strong>de</strong> Martin Vrána <strong>de</strong> la nouvelle Husopas (le Gar<strong>de</strong>ur<br />

d’oies) qui porte les traits d’un possédé du diable ou encore <strong>de</strong> la maîtresse adultère<br />

dans Hoře z lásky (Chagrin d’amour) qui se pend <strong>de</strong>vant la porte <strong>de</strong> l’amant qui l’a<br />

r<strong>ep</strong>oussée, dans tous les cas, le suici<strong>de</strong> est un acte <strong>de</strong> révolte et <strong>de</strong> vengeance produit le<br />

plus souvent dans un état <strong>de</strong> désespoir ou <strong>de</strong> folie 545 . Au plus profond, un <strong>tel</strong> acte<br />

d’auto<strong>de</strong>struction ne peut s’expliquer que par <strong>de</strong>s circonstances tragiques, extrêmement<br />

funestes. L’échec <strong>de</strong> vie, la perte <strong>de</strong> l’être aimé, le sentiment du manque <strong>de</strong> sens <strong>de</strong> sa<br />

propre existence, sont <strong>de</strong> ru<strong>de</strong>s coups du sort mais n’annulent pas en l’homme le<br />

principe <strong>de</strong> vie en tant que <strong>tel</strong>, comme le fait celui qui commet l’acte <strong>de</strong> suici<strong>de</strong>. Pour<br />

Č<strong>ep</strong>, le suici<strong>de</strong> rime avec le dégoût <strong>de</strong> soi-même et le plus profond désespoir. C’est le<br />

« vertige du vi<strong>de</strong> intérieur », le « vertige <strong>de</strong> la chute précipitée » dont Č<strong>ep</strong> donne la<br />

<strong>de</strong>scription suivante :<br />

La tentation du dégoût profond <strong>de</strong> soi-même, qui menace l’homme s’érigeant sur les décombres <strong>de</strong> sa<br />

vie extérieure et intérieure, sur les ruines <strong>de</strong> ce qu’il voulait, espérait et aimait, sur les ruines <strong>de</strong> sa<br />

propre figure, qu’il a trahie, sur le désert du temps gaspillé, risque <strong>de</strong> nous amener au fond du néant et<br />

ouvre sous nos pas la voie <strong>à</strong> la fois obscure et étrangement enivrante du désespoir et <strong>de</strong> la mort. 546<br />

Le suici<strong>de</strong> peut bien évi<strong>de</strong>mment être une puissante tentation encore d’une autre<br />

manière. Prétendant maîtriser la vie et la mort et s’octroyant ainsi la place qui ne lui<br />

appartient pas, l’homme se croit égal <strong>à</strong> Dieu, l’acte <strong>de</strong> suici<strong>de</strong> lui donne le sentiment<br />

fallacieux <strong>de</strong> toute-puissance. Le suici<strong>de</strong> n’est qu’une révolte contre Dieu : « L’idée<br />

543 Cf. par exemple G. Marcel, Présence et Immortalité, Paris, Flammarion, 1959. En tchèque les textes<br />

choisis <strong>de</strong> Marcel fut publié sous le même titre : Přítomnost a nesmr<strong>tel</strong>nost, traduit du français<br />

P. Bendlová, Praha, Mladá fronta, 1998.<br />

544 Cf. la phrase célèbre que G. Marcel met dans la bouche d’Antoine dans Le Mort <strong>de</strong> Demain : « Aimer<br />

un être n’est-ce pas lui dire implicitement : ‘Toi tu ne mourras point ?’ ».<br />

545 Les trois récits cités se trouvent in : Œuvres I.<br />

546 « Pokušení hlubokého znechucení sebou samým, které ohrožuje člověka stojícího nad zříceninami<br />

svého života vnějšího i vnitřního, nad troskami toho, co chtěl, več doufal, co miloval, nad troskami své<br />

vlastní podoby, které se zpronevěřil, nad pouští zmrhaného času, nás hrozí rázem stáhnout na dno vlastní<br />

nicoty a otvírá pod našimi kroky temnou a zároveň podivně opojnou cestu zoufalství a smrti. »,<br />

Œuvres V, p. 56.<br />

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