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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

pertes causées par elle peuvent être en quelque sorte récupérées (« Il faut prier pour que<br />

nous nous retrouvions tous dans le Ciel, chez le Bon Dieu » 729 , lui dit le père.).<br />

VI.2.4.2. Angoisse et étonnement – mysterium mundi<br />

Une autre source <strong>de</strong> l’angoisse č<strong>ep</strong>ienne peut r<strong>ep</strong>oser dans l’énigme <strong>de</strong> l’univers et<br />

dans la place <strong>de</strong> l’homme au sein <strong>de</strong> cet univers. Ici Č<strong>ep</strong> est un semblable <strong>de</strong> Pascal<br />

effrayé <strong>de</strong>vant la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s mystères du mon<strong>de</strong>. Č<strong>ep</strong> s’aperçut très tôt <strong>de</strong> sa<br />

différence avec les autres qui consistait surtout en ce qu’il voyait et sentait plus que ses<br />

camara<strong>de</strong>s. Du reste cette différence, plus précisément la prise <strong>de</strong> conscience <strong>de</strong> cette<br />

différence par rapport aux autres, pouvait être elle-même d’une nature angoissante. Car<br />

cette découverte (<strong>de</strong> la différence) inflige au garçon une contradiction fondamentale :<br />

celle d’être et <strong>de</strong> paraître. Le garçon se sait différent, « privilégié » dit-il, il se rend<br />

compte qu’il recèle en lui « un mon<strong>de</strong> incommunicable » mais en même temps, il cache<br />

tout cela <strong>de</strong>vant les autres et préfère acc<strong>ep</strong>ter jouer un rôle, prétendre être comme eux.<br />

Déj<strong>à</strong> l’enfant porte donc ses secrets douloureux, son univers regorge <strong>de</strong> questions <strong>à</strong><br />

<strong>tel</strong> point qu’il cherche <strong>à</strong> personnifier son sentiment d’angoisse. L’écrivain qu’il <strong>de</strong>vient<br />

invente <strong>de</strong>s métaphores et <strong>de</strong>s synesthésies pour concrétiser l’angoisse qu’il éprouve<br />

face aux mystères <strong>de</strong> l’univers. C’est la couleur bleue et la voix nostalgique du coucou<br />

qui sont, <strong>à</strong> travers toute son œuvre, <strong>de</strong>s symboles <strong>de</strong> cette angoisse. En racontant les<br />

escapa<strong>de</strong>s « au bois » avec d’autres gamins, Č<strong>ep</strong> ne peux pas ne pas y revenir dans son<br />

essai autobiographique :<br />

[L]a voix d’un coucou qui porte si loin dans le crépuscule, sous les arbres touchait la sensibilité<br />

naissante du garçon que j’étais par sa couleur nostalgique, son appel <strong>de</strong> je ne sais quels lointains<br />

perdus. Il aurait juré que cette voix avait une couleur, et que cette couleur était du bleu, un bleu foncé,<br />

l’angoisse <strong>de</strong> l’infini, la profon<strong>de</strong>ur du mystère insondable. 730<br />

L’angoisse <strong>de</strong>vant le mon<strong>de</strong> peut être bien illustrée par l’anecdote du « trou noir »<br />

caché dans un coin obscur du jardin familial. Elle est la suivante :<br />

C’était l<strong>à</strong> le coin le plus sauvage, le plus ombragé, où foisonnaient <strong>de</strong> hautes orties, <strong>de</strong>s bardanes aux<br />

feuilles larges, un fourré <strong>de</strong> framboises et <strong>de</strong> roses <strong>à</strong> cent pétales. Mais le mystère <strong>de</strong> ce lieu respirait<br />

par un trou noir, s’enfonçant sous la terre – les restes d’une cave comblée, disaient les parents.<br />

Quelques pierres <strong>de</strong> voûte, couvertes <strong>de</strong> mousse et d’herbes courtes, enflaient un peu le sol comme le<br />

729 Ma Sœur l’angoisse, op. cit., p. 13.<br />

730 Ibid., p. 22.<br />

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