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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

ce ‘pays <strong>de</strong> personne’ » 467 . La légèreté et le ton <strong>de</strong> gaillardise et <strong>de</strong> défoulement sont<br />

remplacés par un décor angoissant : « Tout espace fut creusé par l’abîme du silence<br />

mort. Le sentiment d’intemporalité et d’absence <strong>de</strong> tout chemin <strong>de</strong>vint<br />

insupportable. » 468<br />

Si l’errance dans les récits d’exil fut l’image et même le symbole <strong>de</strong> la vie d’un<br />

émigré, d’un déraciné dont les traits parlants étaient l’étrangeté, l’exclusion, le<br />

délaissement, ici l’errance r<strong>ep</strong>résente autre chose. Le fait qu’Antonín s’égare dans son<br />

propre pays natal comporte une teinte d’absurdité, <strong>de</strong> ridicule. Si Karel semble être<br />

fâché contre l’indigène et scandalisé par cet égarement incompréhensible, Jiří par contre<br />

connaît ce sentiment d’aliénation <strong>de</strong>s choses les plus proches, mise en doute <strong>de</strong>s<br />

certitu<strong>de</strong>s les plus sûres. Se perdre dans le pays que l’on connaît le plus intimement lui<br />

paraît tout <strong>à</strong> fait possible :<br />

N’y a-t-il pas, en fait, en tout lieu <strong>de</strong>ux paysages dont les chemins s’entrecroisent mystérieusement ?<br />

Si nous nous écartons, cela ne signifie-t-il pas que nous étions captés dans un réseau d’un <strong>de</strong> ces<br />

carrefours, et que nous marchons déj<strong>à</strong> sur les chemins <strong>de</strong> l’autre paysage, sans savoir <strong>à</strong> quel moment<br />

nous avons franchi la borne invisible ? » 469<br />

Et un moment plus tard, la nuit et la fatigue lui suggèrent l’impression <strong>de</strong> se trouver<br />

« <strong>à</strong> la frontière même entre la conscience et la non-conscience, entre l’être et le non-<br />

être » :<br />

« Est-ce encore moi, tant que je supposais me connaître, ou bien ai-je déj<strong>à</strong> traversé cette borne,<br />

<strong>de</strong>rrière laquelle je me retrouverai <strong>tel</strong> que je suis vraiment ? 470<br />

Nous y retrouvons donc le dualisme fondamental qui se manifeste sous diverses<br />

variantes : double paysage, double temps (jour et nuit) qui préfigurent pour Č<strong>ep</strong> un<br />

double mo<strong>de</strong> d’existence : terrestre (imparfaite) et celle où l’on entre <strong>à</strong> travers l’abîme<br />

<strong>de</strong> la mort (vraie, accomplie). On pourrait même aller plus loin dans l’interprétation <strong>de</strong><br />

467<br />

« neohraničená tma », « beztvará tma na všechny strany », « tma a nezvučnost jako by si odpovídaly »,<br />

« hodina nočního bezčasí, uprostřed krajiny bez cest a beze směru » (352), « ticho noční tmy », « pocit, že<br />

tma vyrůstá ze země, že země je hlubokým zdrojem tmy », « propast » (353), « tahle noční opuštěnost,<br />

tohle noční bezčasí, tento ’kraj nikoho’ » (354).<br />

468<br />

« Celý prostor byl vyhlouben propastí mrtvého ticha. Pocit naprostého bezčasí a bezcestí se stal<br />

nesnesi<strong>tel</strong>ným. », Œuvres III, p. 355.<br />

469<br />

« Nejsou vlastně na každém místě krajiny dvě, jejichž cesty se tajemně kříží ? Zabloudíme-li,<br />

neznamená to, že jsme byli chyceni do sítě jedné z takových křižovatek, a že j<strong>de</strong>me už po cestách krajiny<br />

druhé, aniž víme, kdy jsme překročili nevidi<strong>tel</strong>nou mez ? », Œuvres III, p. 352.<br />

470<br />

« Jsem to ještě já, tak jak jsem se domníval, že se znám, anebo jsem už překročil onu mez, za kterou<br />

potkám sám sebe takového, jaký opravdu jsem? », Œuvres III, p. 354.<br />

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