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[tel-00462108, v1] L'exil de Jan ?ep : contribution à l ... - HAL-Inria

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<strong>tel</strong>-<strong>00462108</strong>, version 1 - 8 Mar 2010<br />

temps que l’autre apparaît <strong>à</strong> l’exilé comme défaillant, abandonnique, froid, indifférent, l’exilé se<br />

révèle <strong>à</strong> l’autre encombrant, maladroit, lourd, agaçant, décevant <strong>à</strong> son tour. 88<br />

Chez Č<strong>ep</strong>, toutefois, le sentiment <strong>de</strong> l’étrangeté <strong>de</strong> l’autre ne peut provenir <strong>de</strong><br />

l’ignorance du milieu, <strong>de</strong> la nouveauté <strong>de</strong> la « réalité française » puisqu’il la connaissait<br />

bien <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années comme peu <strong>de</strong> Tchèques <strong>à</strong> l’époque. Mais cette réalité française<br />

a c<strong>ep</strong>endant subi dans l’évolution d’après-guerre une transformation assez radicale qui,<br />

malgré toute la familiarité que celle-ci avait pour Č<strong>ep</strong>, lui <strong>de</strong>vient aliénante. Autrement<br />

dit, l’actualité <strong>de</strong> la France <strong>de</strong>s années d’exil <strong>de</strong> Č<strong>ep</strong>, ne correspond plus <strong>à</strong> la vision <strong>de</strong><br />

ce pays, <strong>tel</strong>le qu’il se l’était forgée avant la guerre.<br />

Ici faisons une petite parenthèse qui nous permettra <strong>de</strong> mieux voir cette<br />

incompatibilité <strong>de</strong> la France <strong>de</strong> Č<strong>ep</strong> et <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> l’après-guerre.<br />

Pour Č<strong>ep</strong> la France r<strong>ep</strong>résente en premier lieu le potentiel toujours vivant <strong>de</strong> la<br />

chrétienté universelle et le berceau <strong>de</strong> la culture européenne dite occi<strong>de</strong>ntale. Il en aime<br />

notamment la « tradition la plus profon<strong>de</strong>, chevaleresque et chrétienne », voit en elle<br />

« la Fille aînée <strong>de</strong> l’Eglise, foyer <strong>de</strong> l’esprit chrétien et <strong>de</strong> la culture européenne qui<br />

rayonne <strong>de</strong> son moyen âge glorieux et naïf, croyant et fier, sur les arts et la vie <strong>de</strong> tous<br />

les pays et <strong>de</strong> tous les siècles » 89 . C’est la France qui a donné au mon<strong>de</strong> d’innombrables<br />

saints dont saint Louis, l’un <strong>de</strong>s favoris <strong>de</strong> Č<strong>ep</strong>. C’est également la France qui tient la<br />

plus haute place dans la littérature d’orientation spirituelle, avec ce renouveau<br />

prodigieux <strong>de</strong>puis le <strong>de</strong>rnier tiers du XIX e siècle atteignant <strong>de</strong>s sommets incarnés par<br />

Péguy, Clau<strong>de</strong>l et Bernanos 90 .<br />

Ainsi les liens attachant Č<strong>ep</strong> <strong>à</strong> la France sont-ils d’ordre spirituel, même en<br />

littérature. Sa famille d’esprit embrasse Bernanos (qu’il « aime <strong>de</strong> tout son cœur » et en<br />

qui il sent « quelque chose <strong>de</strong> vraiment vivant, une source spirituelle fraîche et<br />

profon<strong>de</strong> » 91 ) comme Clau<strong>de</strong>l (pour qui il éprouve un « sentiment <strong>de</strong> gratitu<strong>de</strong> filiale et<br />

d’affection chaleureuse » 92 ), aussi bien qu’Alain-Fournier (qui lui est « <strong>de</strong>venu<br />

88 Ibid., p. 126.<br />

89 J. Č<strong>ep</strong>, « Lettre d’un catholique tchèque <strong>à</strong> Paul Clau<strong>de</strong>l », La Revue française <strong>de</strong> Prague,<br />

le 15 décembre 1938, p. 82-87. Nous citons la r<strong>ep</strong>roduction in : Clau<strong>de</strong>l diplomate, Paris, Gallimard<br />

(Cahier Paul Clau<strong>de</strong>l n° 4), 1962, p. 169.<br />

90 Cf. « J’ai lu un peu Storia di Cristo par Papini pour m’entraîner <strong>à</strong> l’italien. […] Il y a <strong>de</strong> belles pages<br />

dans Papini, mais ce n’est pourtant pas Bloy. Rien <strong>à</strong> faire, dans la soi-disant littérature catholique<br />

mo<strong>de</strong>rne les Français ont toujours le <strong>de</strong>ssus. Que cela soit la garantie <strong>de</strong> l’avenir <strong>de</strong> cette nation – et <strong>de</strong> la<br />

nôtre. », J. Č<strong>ep</strong> <strong>à</strong> J. Zahradníček, le 10 août 1936.<br />

91 J. Č<strong>ep</strong> <strong>à</strong> G. Bernanos, le 6 s<strong>ep</strong>tembre [1933 ?].<br />

92 J. Č<strong>ep</strong> <strong>à</strong> P. Clau<strong>de</strong>l, le 13 janvier 1939.<br />

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