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UNIVERSITÉ PARIS-SORBONNE Le paradoxe chez ... - e-Sorbonne

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l’inexistence et non au réel puisqu’il ne fait que reproduire, recréer mentalement dans un<br />

discours discursif un événement réel perçu de façon instantané :<br />

que las colinas, la vastedad del silencio y de los árboles,<br />

a cuyos pies las pitas languidecen,<br />

no son colinas ya, ni silencio, ni árboles,<br />

sino pequeños altos sobre los promontorios<br />

del pensamiento, bruma<br />

que la norma recubre, y es lenguaje. 287<br />

<strong>Le</strong> paysage décrit dans cet extrait du poème Ceremonias est immédiatement nié : les<br />

collines et les arbres n’existent pas réellement, elles n’ont qu’une existence langagière<br />

coupée du réel. Nous retrouvons là la distinction linguistique fondamentale entre le référant<br />

inscrit dans la réalité et le signe linguistique composé du signifiant/signifié qui est inscrit<br />

dans le langage 288 . Ce rejet du réel qu’induit le langage revêt de plus dans le poème talensien<br />

un caractère spécifique : le langage est en effet associé à la norme, c’est-à-dire à une idée<br />

d’organisation fixe (la syntaxe principalement, mais aussi les relations paradigmatiques) qui<br />

est le propre du langage. Or si le réel n’est pas le langage, alors cette citation laisse entendre<br />

que ce réel ne partage pas nécessairement la norme, la fixité langagière. En cela le langage ne<br />

peut pas tant constituer un élément du réel qu’un obstacle au réel parce qu’il traduit dans une<br />

organisation fixe et discursive un événement mouvant et instantané 289 .<br />

Que le langage soit définitivement coupé du réel par cette différence de nature entre le<br />

référent et le signe linguistique se perçoit donc <strong>chez</strong> Jenaro Talens par le carcan de la fixité<br />

normative ainsi que par la linéarité du langage. Or ce dernier point amène à rejeter dans le<br />

champ de l’inexistence des notions prises comme réelles par la doxa, à savoir l’histoire, la<br />

mémoire, et de façon générale le temps 290 . Ce rejet d’existence réelle est exprimé<br />

explicitement dans la troisième et quatrième partie du poème Faro Sacratif :<br />

Toda historia es ficción.<br />

287 CS, p. 88.<br />

288 Cette notion aujourd’hui tout à fait commune a été proposée par Emile Benveniste qui, reprenant les études de<br />

Saussure, ne voit plus l’arbitraire du signe linguistique dans sa relation entre le signifiant et le signifié, mais<br />

entre ce couple signifiant/signifié et le réel, c’est-à-dire le référent : « Entre le signifiant et le signifié, le lien<br />

n’est pas arbitraire ; au contraire, il est nécessaire. (…) Ce qui est arbitraire, c’est que tel signe, et non tel autre,<br />

soit appliqué à tel élément de la réalité, et non à tel autre », Emile Benveniste, Problèmes de linguistique<br />

générale, nrf, Paris, 1966, pp. 51-52. <strong>Le</strong> divorce entre le réel et le langage est alors sans équivoque possible.<br />

289 René Jara le relève de la même façon : « la desconfianza de Talens en la estabilidad del referente o en la<br />

presencia fantasmática de una red de sentido estable y precisa, una especie de supercódigo que organice la<br />

significación de los códigos más inmediatos. » , La modernidad en litigio, Sevilla, Alflar, 1989, p. 11.<br />

290 Pour plus de précisions sur les <strong>paradoxe</strong>s du temps, voir le chapitre dédié à ce sujet.<br />

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