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UNIVERSITÉ PARIS-SORBONNE Le paradoxe chez ... - e-Sorbonne

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L’identité première étant donc indéfinie et mouvante, fondamentalement paradoxale,<br />

reliée au temps paradoxal et à l’espace paradoxal, il n’en reste pas moins qu’elle doit être<br />

appréhendable pour être ressentie comme telle. Or elle ne pourra pas l’être par le biais de<br />

l’esprit, de l’intellect puisque celui-ci est fait de langage et que le langage induit la séparation<br />

du toi, du moi en tant que mots. La voie d’accès sera alors ce qui dans le sujet reste en deça<br />

du langage : le corps.<br />

2. <strong>Le</strong>s <strong>paradoxe</strong>s du corps comme socle de l’identité<br />

Selon la doxa, le corps est une origine fondamentale du sentiment d’identité. Il est en<br />

effet le support physique de l’être où le moi prend place, et par lequel il est inscrit dans le<br />

monde. Par ailleurs, le corps est un élément de ce monde, ce qui signifie qu’il en est séparé et<br />

pourra alors être identifié par rapport aux autres pour avoir des caractéristiques physiques<br />

particulières. Il est donc une unité isolée et indivisible. Enfin, le corps constitue la connexion<br />

du moi au monde par le phénomène de la perception. En résumé, il est un élément unique au<br />

monde permettant de se différencier par son aspect et sa capacité à percevoir ces différences.<br />

<strong>Le</strong> corps représente alors l’aspect visible et tangible du moi, il en devient un socle de<br />

l’identité.<br />

<strong>Le</strong> corps talensien ne partage aucun de ces aspects. Loin de l’indivisibilité et de<br />

l’unité qui le définissent dans la doxa, il est ici un corps fragmentaire pour reprendre le terme<br />

utilisé par Jenaro Talens qui en fera d’ailleurs le titre d’un recueil et du dernier poème de<br />

celui-ci publié en 1978. La fragmentation du corps est ainsi un constat sans appel dans<br />

l’œuvre poétique, ce qui le situe de facto dans le champ du <strong>paradoxe</strong>.<br />

<strong>Le</strong> <strong>paradoxe</strong> du corps part donc de son caractère fragmentaire : le corps n’est qu’un<br />

amalgame de fragments sans rapport d’unité évidente entre eux qui peuvent surgir dans le<br />

cadre du moi ou hors de celui-ci 399 . La notion de rhizomes proposée par Deleuze et<br />

Guattari 400 s’y applique parfaitement en ce que les fragments pour être séparés n’en sont pas<br />

moins des éléments d’une essence commune souterraine : ils sont tout à la fois identiques et<br />

différents.<br />

399<br />

<strong>Le</strong> corps de Frankenstein est l’exemple type du corps fragmentaire. Juan Carlos Fernández Serrato le relève :<br />

« El mito del « monstruo » de Frankenstein es, desde luego, una acertada metáfora de ese cuerpo fragmentario,<br />

producto de un sujeto discursivo que ya se sabe habitado por la alteridad esencial », « Introducción », TALENS,<br />

J., Cantos Rodados, Madrid, Cátedra, 2002, p. 86. Domingo Sán<strong>chez</strong>-Mesa Martínez y fait référence de la même<br />

façon dans « La mirada qu escribe o de poesía y cine. Relaciones intermediales en la poesía de Jenaro Talens »,<br />

in Mi oficio es la extrañeza, FERNADEZ SERRATO (ed.), Madrid, Biblioteca Nueva, 2007, p. 95.<br />

400<br />

DELEUZE, Gilles, GUATTARI, Félix, « rhizome » in Capitalisme et schizophrénie 2 : mille plateaux, Ed.<br />

Minuit, Paris, 1976.<br />

179

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