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possible relève alors de la doxa, opinion commune qui le cantonne et qui, repose sur le fait d'être<br />

crédible pour le plus grand nombre. Aristote nous dit: « Il faut préférer l'impossible vraisemblable au<br />

possible incroyable 247 ». Car cette activité humaine se singularise dans le fait qu'elle produit en vue<br />

d'une fin extérieure à l'existence même du produit de l'action, qui la dépasse: la catharsis. Elle relève<br />

du plaisir, un plaisir que l'on pourrait dire thérapeutique puisqu'il s'agit d'abord d'un terme médical<br />

qui désigne une forme d'épuration du mal et qui soulage. Il y a donc, comme le note Anne Cauquelin,<br />

l'implicite d'une double dimension dans cette démonstration. D'une part, la virtualité de la fiction fait<br />

que l'art ajoute aux choses existantes et « achève la nature». Et ensuite, le plaisir propre à l'art de la<br />

mimesis qui, notamment dans la tragédie, « consiste à suspendre un moment les affections de l'âme<br />

par où elle pâtit le plus souvent [...] rend, l'espace d'un moment, tout destin tragique à son<br />

illusion 248 ». On sent bien alors que c'est un modèle qui se construit devant nous. « Dans ce modèle,<br />

les acteurs sont en place: l'artiste et sa liberté vis-à-vis de la réalité des faits, le public et ses attentes,<br />

la doxa qui contraint la fiction à respecter le vraisemblable, le vraisemblable lui-même et les moyens<br />

de son exercice, enfin la finalité de la mimésis qui est le plaisir, ou achèvement de l'œuvre dans la<br />

jouissance esthétique 249 ». À la manière, évidemment logique, d'Aristote, il nous permet à la fois<br />

d'observer et d'espérer comprendre notre sujet. Ce qu'il définit finalement, ce sont les injonctions dans<br />

lesquelles pourront se situer les œuvrcs de l'art qui est lui-même encore à venir. On est alors dans les<br />

firmaments techniques et sensibles de la période hellénistique mais cet achèvement est aussi la fin<br />

d'une époque pour Faure. Son récit est la métaphore ou la synthèse brillante d'une évolution qui<br />

102<br />

humanise la statue, la sculpture, en fait un être et donc le symbole de l'individu qui se construit, s'isole<br />

et constitue son rapport et sa distance avec le monde. Il note que la dissolution de l'unité citoyenne<br />

dans l'individualisme grandissant correspond à celle de l'énergie de cette création, maintenant<br />

pleinement (seulement ?) humaine.<br />

Le centre d'attraction des masses n'est plus seulement perdu. Le sculpteur ne sait plus que ce<br />

centre existait jadis et qu'il déterminait la forme entière [...], la petite sensibilité et la sensation<br />

médiocre tentent de substituer leurs cris et leur emphase au puissant sentiment global qui<br />

unissait, dans la forme monumentale, la connaissance et l'amour de l'objet et la croyance que<br />

l'objet fait partie d'un ensemble saint dont la religion, la cité, la famille, la guerre, la paix,<br />

l'aliment, la naissance et la mort sont les manifestations solidaires. On dirait que les<br />

gesticulations et les grimaces de l'idole clament son unité perdue. Ce n'est d'ailleurs plus une<br />

idole, c'est un article de bazar 25o .<br />

Ce qui est posé dans ces fondements ce sont quelques pôles qui paraissent consolider la matière<br />

instable de notre sujet. Bien que cette réflexion antique se concentre sur le beau et ne concerne pas ce<br />

247 Aristote. 1997. Poétique. trad. Barbara Gernez. Paris: Les Belles Lettres, 24, 1460a.<br />

248 Anne Callquelin, Les théories de l'art, op. cil., pA7.<br />

249 Ibid., pA8.<br />

250 Élie Faure, L'esprit des formes, op. cit., p.54.

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