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IMG - Archipel - UQAM

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pouvoir en jouir. Elles sont comme un catalogue qui diffuse des produits qui ne tarderont pas à devenir<br />

objets d'un commerce touchant un public élargi. Tout cela converge pour s'associer à un mouvement<br />

auquel on a souvent donné trop de poids, celui du tropisme romain, chrétien bien sûr mais surtout<br />

antique. Les influences entre le Nord et le Sud, les Pays-Bas et l'Italie qui sont les repères les plus<br />

florissants de cette époque, sont réciproques et le caravagisme constitue l'un de ses plus beaux<br />

exemples. Comme le remarque Michel Freitag, les cités du Nord de l'Europe rivalisent avec celles de<br />

l'Italie du Nord mais leur structure est toute autre, bien qu'elles soient les unes et les autres, situées sur<br />

des terres d'Empire. Les cités flamandes et les grandes villes portuaires du nord, même si elles<br />

développent leurs activités commerciales et bancaires notamment, demeurent à l'image de la commune<br />

bourgeoise médiévale, dans une orientation communautaire et démocratique. Leur richesse s'accentue<br />

et la bourgeoisie construit une élite de plus en plus forte qui mobilise les rênes du pouvoir. Les cités<br />

italiennes, au contraire, sont des cités-états patriciennes, à tendance individualiste et hiérarchique. Si le<br />

pouvoir des familles aristocratiques qui les gouvernent n'est pas toujours très vieux, il est pourtant de<br />

nature princière au sens machiavélien de sa construction et de son exercice. La protection des arts<br />

constitue un de ses attributs et les œuvres qu'il finance servent sa grandeur. Le mécénat n'est pas<br />

moins indispensable pour l'artiste du Nord que pour celui du Sud. L'indépendance de leur statut ne<br />

leur donne pas pour autant les moyens d'une liberté totale et ils demeurent des clients au scns romain<br />

du terme. Les commandes religieuses restent une source essentielle mais elle évolue. D'une part, elles<br />

se tarissent dans les zones où l'humanisme de Érasme (v.1469-1536), par exemple, et ensuite les<br />

ouvrages des penseurs de la Réforme, prônent un retour vers les Écritures. Ils bâtissent un rappolt au<br />

divin qui devient de plus en plus personnel, réfutent le spectaculaire des symboles, prohibent même les<br />

images comme dans la plupart des religions monothéistes. Ils situent la foi dans une dimension idéelle<br />

qui récuse le besoin d'une quelconque traduction, y compris artistique: Soli Deo, sola fides, sola<br />

scriptura, selon la formule de Luther. L'Église catholique, de son côté, professe à la suite du concile de<br />

Trente (J 545), une contre-réforme confirmant les trois dogmes traditionnels: la trinité, l'incarnation et<br />

la rédemption. Parmi ces mystères indémontrables, l'incarnation est celui qui a la force probante la<br />

plus grande puisque le verbe s'est fait chair et Dieu s'est fait homme pour le démontrer. Il s'agit d'une<br />

réappropriation par le fait du mystère le moins hypothétique pour les croyants et il sera le plus influent<br />

sur l'esthétique issue de la contre-réforme. Le moto en est la formule hic et nunc qui légitime la<br />

transsubstantiation, donne tout le poids sacramentel du ministère et induit ce que j'appellerais un<br />

« vitalisme» dans la représentation. L'espace de l'église, en tant que bâtiment, se transforme avec le<br />

baroque en scène d'un théâtre total où la simulation devient vérité par la grâce mais aussi l'œuvre de<br />

J'artiste. Celle-ci est message divin, tant par son caractère exceptionnel que par l'inspiration directe<br />

dont elle est porteuse. Pourtant, cet art, s'il est toujours religieux au sens le plus fort, n'est plus<br />

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