26.06.2013 Views

IMG - Archipel - UQAM

IMG - Archipel - UQAM

IMG - Archipel - UQAM

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

David Bohm l18J y voit le fruit du développement de la pensée scientifique fragmentaire, elle-même<br />

issue des conceptions mécanistes et atomistes qui dominent la science moderne. Il met bien en<br />

évidence le processus par lequel la « pensée» s'accapare conceptuellement de la réalité aux fins d'une<br />

expérience qui est implicitement construite dans le but de confirmer le fallacieux isolement des<br />

éléments sur lesquels elle se penche. Il montre ensuite comment cette approche s'est disséminée bien<br />

au-delà de la sphère scientifique en contribuant de plus en plus irréductiblement à la fragmentation de<br />

notre conception du monde réel. J'admets que je fais ici une présentation naïve de son approche mais<br />

376<br />

j'aimerais relever le fait qu'il accorde une place très privilégiée, trop privilégiée à mon sens, à la<br />

dynamique scientifique dans sa proposition. Il me semble en effet que l'art, dans ses multiples<br />

questionnements de la représentation, joue aussi pleinement son rôle et, qu'une fois encore, les deux<br />

domaines sont associés pour même fusionner par la grâce des nouvelles technologies de l'information<br />

et de la communication. Le propos n'est pas ici de savoir quelle influence fut la plus forte ou celle qui<br />

laisse le plus de traces. On le sait à mon avis depuis toujours: c'est la parole ou les mots qui<br />

demeurent encore le véhicule privilégié de la diffusion des idées et notamment celles de la<br />

connaissance. « Comprise comme le résultat d'une recherche réfléchie et systématique, [elle] remonte<br />

en effet à la naissance même de la philosophie en Grèce, à ce moment où s'est produite une mutation<br />

du concept de logos, par l'inversion de son sens immédiatement objectif (la parole du monde, la parole<br />

mythique) en un sens nouveau impliquant j'intervention critique de la subjectivité réfléchissante, le<br />

logos comme theoria d'une réalité devenue problématique, exigeant le détour de la méthode l184 ».<br />

Cette méthode contribue maintenant à la fragmentation des plus coriaces de nos représentations<br />

ontologiques. Ceci peut amener par exemple de nombreux auteurs à reprendre sans aucune réserve une<br />

proposition de Michel Serres. Considérant l'espace culturel «où tel groupe demeure, travaille, vit et<br />

raisonne ou parle », il le déclare « espace des isomorphies. L'ensemble des relations fidèles réunissant<br />

les opérations et les éléments de chacun des espaces reconnus comme différents. Il n'habite pas son<br />

histoire, ou sa religion, ou ses mythes, ou sa science, ou sa technologie, ou sa structure familiale, il<br />

niche dans les ponts qui font communiquer ces îles. La culture, sa culture n'est plus un espace ou des<br />

espaces qualifiés, elle est, précisément, l'espace des isomorphies entre ces espaces nommés" 85 ». Dans<br />

cette définition, je retiens particulièrement le mot île, présenté comme une autre évidence et soutenant<br />

toute la force de la démonstration. Il porte bien entendu le poids d'une image d'abord construite dans<br />

la poésie ou la littérature: l'archipel, et cette métaphore pourrait alors signifier que les humains sont<br />

1183 David Bohm, La plénitude de l'Univers, [1980],.rrad. et ad. Tchalaï Unger, Monaco, Éd. Le Rocher, 1987.<br />

1184 Michel Freitag, Le naufrage de l'université et autres essais d'épistémologie politique, Québec, Éditions Nota<br />

Bene, 1998, p.33.<br />

1185 Michel Serres, Esthétiques sur Carpaccio, Paris, Hermann, 1978, p.102-1 03.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!