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personnes que 1'« épuration» et c'est celle qui amène une disqualification radicale de l'humanisme:<br />

celui des artistes mais aussi celui des scientifiques et c'est en son nom que se forgèrent d'autres<br />

propositions telles que celles de la cybernétique et ses modalités opérationnelles systémiques.<br />

305<br />

À de multiples égards, on sent dans la réflexion de Mounier les prémices de ces évolutions.<br />

Pour lui le «mal du siècle» s'exprime dans «l'individualisme, les tyrannies collectives. Ils sont<br />

aujourd'hui à leur maximum de virulence, et leurs effets s'ajoutent, car ils ne sont que deux phases<br />

d'un même mal 940 ». Et s'il faut que la «personne» se retrouve pleinement, qu'elle dépasse<br />

définitivement les limites que l'idéalisme de l'individu lui avait imposées, il faut en passer par une<br />

révolution. Elle repose sur une conception du politique qui en refuse le primat, tout comme celui des<br />

institutions car «elles peuvent beaucoup pour l'oppression, et c'est pourquoi nous sommes<br />

révolutionnaires contre celles qui oppriment ». Plus encore, les politiques profitent de la lâcheté d'un<br />

citoyen - statut auquel l'homme est réduit - qui refuse sa responsabilité. C'est en fait un plaidoyer<br />

pour un État minimal issu d'une révolution institutionnelle qui «désembourbera la machine publique»<br />

et ne lui accordera, à côté de l'effort et de l'investissement de chacun à sa place, que le rôle d'un<br />

« coup de main [... ] occasionnel et dépendant94 1 ». Sa réflexion anticipe aussi les modalités de mise en<br />

œuvre de telles orientations. Si chacun doit avoir sa place, veiller à celle de tous suppose des<br />

compétences qui « comportent la prise de position sur les grandes directions idéologiques du régime, la<br />

défense contre la lourdeur des pouvoirs et la collaboration aux organismes communautaires ». Mais<br />

«un petit nombre d'hommes a vocation de gouvernement, de l'échelle communale à l'échelle<br />

nationale, comme d'autres ont vocation de mécanicien et d'instituteur. [...] La chose politique fait un<br />

peu trop parler d'elle [... ] c'est précisément pour que l'État ne fasse plus ce tintamarre, pour que la<br />

puissance se laisse oublier et qu'on puisse enfin, hormis les spécialistes, se livrer à d'autres soins, pour<br />

la meilleure part de son temps, que les fonctions de police 942 ». Ce qui se dessine est le passage subtil<br />

d'un concept d'élite responsable, et d'abord politiquement responsable, à celui d'une expertise<br />

spécialisée qui prend en charge la gestion de la chose publique en tant que puissance publique. On<br />

pressent alors, toute la familiarité qui existera entre ces positions et celle d'un après-guerre occidental<br />

qui recherche une troisième voie et privilégie une approche purement opérationnalisée de la chose<br />

publique faisant légitimement craindre le plus pervers des totalitarismes. En effet, comme le précise<br />

Michel Freitag, «Le monopole du pouvoir (tant sous sa forme traditionnelle que moderne) ne<br />

représente en aucune façon un critère déterminant du totalitarisme, puisque celui-ci, tout en se<br />

présentant comme une « hyperpolitisation » de toute la vie sociale, comporte finalement l'abolition<br />

940 Ibid., p.SI.<br />

941 Ibid., p.204, ainsi que pour les deux citations précédentes.<br />

942 Ibid., p.20S, ainsi que pour les deux citations précédentes.

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