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IMG - Archipel - UQAM

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démonstration que fait Hegel de son application montre bien quelles dérives elle peut imprimer à<br />

l'esprit même de la quête. Si le principe est que tout homme cherche à se réaliser et qu'il y parvient par<br />

sa vie, l'artiste doit alors vivre en artiste et donner à sa vie une forme artistique. Cela induit que ses<br />

actions ne sont pour lui que des apparences, les formes que leur impose sa propre puissance et qu'il ne<br />

peut donc "prendre au sérieux". N'est-ce pas alors la vanité de la vie même, fut-elle vie d'artiste, qui<br />

est postulée et ce doute ne nous habite-t-il pas encore de nos jours? « Si le romantisme est bien la crise<br />

de la conscience moderne à laquelle il devient manifeste, collectivement et en masse (c'est-à-dire non<br />

seulement pour nous qui philosophons), que la réalité n'existe pas en elle-même, mais ne reçoit son<br />

sens, par essence, qu'en étant rapportée à la vie, il se pourrait et il y aurait lieu de craindre que nous ne<br />

sortions pas de sitôt du «romantisme »428». Il y avait, chez ces suiveurs de Kant, un besoin<br />

d'approfondissement né de l'intuition de quelques inaboutis. Il me semble qu'il résultait aussi d'un<br />

désir de se rassurer ou de créer l'espace d'un espoir. En effet, Kant énonce que même « le meilleur des<br />

hommes» renverse l'ordre de «la maxime universelle du libre-arbitre» qui devrait résulter de la loi<br />

morale. Ce qui s'exprime implicitement alors, c'est que ce renversement est lié à sa constitution en tant<br />

qu'individu et la conception de la liberté qui en découle sous le «mobile de l'amour de soi ». «Or, s'il<br />

y a, dans la nature humaine, un penchant qui la pousse à procéder ainsi, c'est qu'il y a dans l'homme<br />

un penchant naturel au mal; et ce penchant lui-même est moralement mauvais, puisque, en définitive,<br />

c'est dans un libre arbitre qu'il doit être cherché, puisque, par suite, il peut être imputé. C'est un mal<br />

radical, parce qu'il pervertit le principe de toutes les maximes et que, d'autre part, en tant que<br />

penchant naturel, il ne peut pas être détruit par les forces humaines, pour cette raison que sa<br />

destruction ne pourrait qu'être l'œuvre de bonnes maximes et qu'elle est impossible si le principe<br />

subjectif suprême de toutes les maximes est présupposé corrompu; et néanmoins il faut que ce<br />

penchant puisse être surmonté, puisque l'homme, en qui il se trouve, est un être libre dans ses<br />

actions 429 ». On ressent une conception fataliste - comme un cercle vicieux duquel il semble<br />

impossible de sortir - qui fut beaucoup débattue, voire critiquée par ses contemporains. Encore<br />

qu'une fois de plus la traduction de l'allemand radikal Bose soit délicate en français, le mal n'est-il pas<br />

radical parce qu'il est originel et non pas absolu? Si tel avait été le cas pour le philosophe, le mot<br />

aurait été employé puisqu'on ne s'en privait pas à l'époque. Pour répondre à la question posée par<br />

Kant, il aurait fallu trouver le moyen d'établir ce que Pato6ka nomme une «réconciliation» qui<br />

permette de prendre le risque de cet agir qui confirme l'être. Elle aurait été une «délimitation et une<br />

reconnaissance du mal en tant que mal [mais aussi] de ce qu'on pourrait appeler la situation limite de<br />

428 Ibid., p. 140-141.<br />

429 Emmanuel Kant, La Religion dans les limites de la Raison, op. cit., p.36-38.<br />

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