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IMG - Archipel - UQAM

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fusion de l'idéal et du réel, de l'idée et de la forme. C'est cette quête romantique de la « belle âme »,<br />

qui confine à prendre la vie de l'homme comme projet de création totale, que raille Hegel en<br />

dénonçant sa vanité, son « ironie ». Son grand œuvre s'impose ensuite comme un arbitrage dans les<br />

questionnements incessants, comme une consécration dépassée des propositions kantiennes pour<br />

fermement établir les repères de la réflexion esthétique et, en même temps, la pensée d'un sens de<br />

l'histoire. Mais c'est aussi la description d'un cheminement de l'esprit qui s'éloignerait de l'art à<br />

mesure qu'il pourrait mieux accéder au beau, défini dans et par l'unité du fini et de l'infini. En effet, à<br />

peine savait-on qu'il existait puisque, tant l'art que l'artiste avaient acquis un statut social, à peine<br />

avait-on initié un discours réflexif, théorique ou doctrinal, portant désormais spécifiquement sur l'art,<br />

sur sa nature, sur sa qualité, sur sa valeur, sur sa signification, que ces consécrations étaient mises à<br />

mal. Constatant la disparition progressive de la dimension « publique» de l'art, institutionnelle en<br />

quelque sorte, Hegel déclarait son caractère passé. Tout comme il me semble qu'on avait rapidement<br />

outrepassé l'objectif des sentences kantiennes, la démonstration hégélienne sera comprise comme<br />

l'annonce explicite de la mort de j'art. Alors que ce qu'anticipe le philosophe, c'est que tout comme<br />

l'individu, dans la société bourgeoise, trouve son refuge dans la sphère intime, c'est là que l'art doit<br />

trouver son espace d'épanouissement pleinement esthétique. C'est ce mouvement qui va s'affirmer de<br />

plus en plus au cours du XIX e siècle et ce que l'on appelle l'art moderne est en fait, selon Michel<br />

Freitag et en lien avec l'analyse hégélienne, porteur d'une dimension post-moderne destructrice de la<br />

correspondance, de la symétrie entre la spécificité intérieure de l'art et sa constitution ou son<br />

institution extérieure, « son identité sociétale 52 ».<br />

Il me paraît donc utile, au moment où dominent tellement les références et les héritages<br />

kantiens, de s'arrêter un peu sur cette œuvre pour mieux comprendre les raisons, souvent et<br />

volontairement déraisonnables, qui le récusent. La force et l'influence de la réflexion hégélienne sont<br />

au moins aussi grandes que les débats qu'elle suscite immédiatement. C'est évidemment bien plus<br />

largement qu'il définit sa remise en cause immoraliste mais Nietzsche inscrit son éloge de la rupture,<br />

de cette déchirure qui parcourt tout son œuvre, dans une opposition souvent exprimée à Hegel.<br />

Pourtant, l'éternel retour, la nécessaire violence dyonisiaque sont peut-être, à leur manière, des formes<br />

de conjuration de l'augure. Et cette posture de l'homme, écrivain artiste et philosophe à la fois,<br />

totalement présent dans ses écrits porteurs des rugissements de l'intime, ne confirme-t-elle pas ce<br />

tournant esthétique? Celte figure, comme volontairement maudite et errante, et ses œuvres, exacerbant<br />

la tentation fragmentaire, paraissent assumer un destin romantique: anticiper jusque dans leurs<br />

52 Michel Freitag, « La condition paradoxale de l'art dans la société post-moderne », loc. cit., p.1 08.<br />

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