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IMG - Archipel - UQAM

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concrètement les lois de la nature, il rend possible la liberté humaine; il permet à l'homme de briser<br />

les liens qui l'enchaînent traditionnellement à la nature et d'organiser rationnellement sa vie en vue de<br />

fins réfléchies. D'autre part, en tant que métaphysique qui prétend rendre raison de la totalité, il<br />

paralyse l'initiative humaine, prêchant une résignation et une capitulation plus complète encore que la<br />

vision pré-mécaniste 4lO ». C'est à celui qui me paraît le moins « français» des auteurs de l'époque que<br />

Patocka réfère à propos de la scission qui s'opère entre le cœur et l'esprit, l'homme et le citoyen.<br />

« [Rousseau] est le premier à poser concrètement la question de l'aliénation de l'homme moderne, la<br />

question de son déchirement et de son artificialité. Dans tout cela, il dévoile la source de la<br />

déshumanisation de l'homme et, par voie de conséquence, de son incapacité à parvenir à la clarté et à<br />

la vérité sur le monde et sur lui-même41 1 ». Kant lui-même n'avait pas résolu ce dilemme qui fait au<br />

final que « l'abstraction l'emporte sur le concret, à la fois dans le savoir et dans la vie 412 ». Comme le<br />

dit Schiller: « C'est ainsi que graduellement la vie individuelle concrète est anéantie, afin que la<br />

totalité abstraite puisse prolonger son indigente existence, et l'État demeure éternellement étranger aux<br />

citoyens, parce que le sentiment ne se découvre nulle part 413 ». Pourtant, comme on l'a vu, le poète­<br />

philosophe considère cette situation comme transitoire. Il ressent qu'il « doit y avoir quelque chose qui<br />

transforme en une interaction féconde le conflit irréconciliable de Fichte, cette opposition qui fait<br />

159<br />

apparaître la vie comme une lutte sans relâche entre l'objectivité qui veut nous dominer et notre propre<br />

aspiration à nous rendre maîtres de l'objet. Cet état harmonieux est l'idée d'humanité, idéal que<br />

l'homme ne peut réaliser que par approximation 414 ». Il ouvre ainsi un grand espoir mais aussi peut­<br />

être son impossible deuil. « Hèilderlin sera le premier à redécouvrir, au-delà de l'apparence, la vérité<br />

propre au phénomène esthétique: l'amour en tant que ce qui ouvre les finitudes fermées, la beauté en<br />

tant que cette ouverture, la vie en tant qu'être créateur, être un, bien qu'articulé. Pendant ce temps,<br />

Schelling emichit la doctrine fichtéenne en lui apportant, dans la philosophie de la nature, un miroir<br />

objectif, s'engageant pour sa part dans la voie de l'identité absolue du subjectif et de l'objectif l5 ».<br />

Pour ce qui concerne le sujet, c'est en 1801, avec la parution de son Exposition de mon système<br />

de la philosophie que Schelling prend ses distances avec Fichte. La nuance, presque timidement<br />

affirmée, allait grandir entre la théorie de la science du premier et la philosophie de la nature de celui<br />

qui avait d'abord été son disciple. Finalement, ce qui les oppose, tient à la question de savoir si la<br />

métaphysique au sens traditionnel du terme est possible ou non, c'est-à-dire la possibilité même d'un<br />

410 Ibid. p.180-181.<br />

411 Ibid. p.184.<br />

412 Ibid. p.185.<br />

413 Friedrich von Schiller, « Lettres sur l'éducation esthétique de l'homme », loc. cit., p.190.<br />

414 Jan Patocka, L'art et le temps, op. cit., p.l91.<br />

415 Ibid., p.307.

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