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IMG - Archipel - UQAM

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dont rêvait SchOffer. N'est-ce pas de l'égarement qui s'empare de nos sens, égare notre jugement,<br />

l'empêche même simplement et, comme le prédit Brecht ou comme dans le tableau d'Edvard Munch,<br />

ce cri n'est-il pas qu'un assourdissant silence douloureux? Une science pour les scientifiques devenus<br />

techniciens, tout comme il y aurait un « art pour les artistes 1250 » devenus brillants « artificiers », c'est­<br />

à-dire experts en artifices expressifs: cela supposerait en fin de compte qu'ils ne seraient plus fait, et le<br />

monde 1251 avec eux, pour la compréhension de tous. Si José Ortega y Gasset a tort dans le jugement<br />

qu'il porte sur la puissance des créations des «jeunes artistes H du temps où il rédige son court essai<br />

sur la « déshumanisation de l'art H, il me semble avoir raison dans l'analyse de ce qui est en train de se<br />

passer alors. Il a raison de penser que l'incompréhension face aux œuvres va bien au-delà de ce<br />

rapport. C'est une perte de compréhension face au projet humaniste porté par j'idée même de j'art, de<br />

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la science, de la politique et de la société, ce projet humaniste qui les liait encore entre eux dans un<br />

même projet commun et virtuellement universel. Il me semble donc que ce n'est pas un hasard si<br />

Ortega y Gasset est un des rares philosophes à rappeler la mémoire de Jean-Marie Guyau comme il le<br />

fait pour introduire sa propre réflexion. À l'enthousiasme du jeune français qui parlait si souvent de<br />

« sympathie» pour décrire ce qu'il ressentait d'un « ait au point de vue sociologique », de ses<br />

nécessaires relations et effets face à une société en train de reconstruire le monde, répond l'écho<br />

pessimiste de l'espagnol. Même si l'on peut lui reprocher de ne pas assez mettre en évidence notre<br />

relation ontologique, notre participation à la contingence du monde, et notamment un monde de<br />

formes, je crois que cela est implicite dans sa pensée. Au-delà de cette étape, il explique que la relation<br />

entre notre esprit et les choses tient au fait que « we think the things 1252 », que nous nous formons des<br />

idées à leur propos. Selon lui, elles constituent tout ce que nous possédons de la réalité, elles sont<br />

comme un belvédère à partir duquel nous pouvons voir le monde, mais cette modestie s'oublie vite.<br />

« Ifwe now invert the natural direction ofthis process; if, turning back on alleged reality, we take the<br />

ideas for what they are - mere subjective patterns - and make them live as such, lean and angular,<br />

but pure and transparent; in short, if we deliberately propose to "realize" our ideas l253 - then we have<br />

dehumanized and, as it were, derealized them. For ideas are really umeal. To regard them as reality is<br />

an idealization, a candid falsification. On the other hand, making them live in their very unreality is ­<br />

let us express it this way - realizing the umeal as such. In this way we do not move from the mind to<br />

the world. On the contrary, we give three-dimensional being to mere patterns, we objectify the<br />

subjective, we "worldify" the immanent l254 ». Les références des uns ne sont pas celles des autres: il<br />

1250 Jose Ortega y Gasset, The Dehumanization ofArt, op. cit., p.20.<br />

1251 Qu'ils le questionnent directement ou non, importe peu alors.<br />

1252 Ibid., p.37.<br />

1253 Ce que nous pouvons désormais comprendre comme leur opérationnalisation directe.<br />

1254 Ibid., p.37-38.

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