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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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d’influence sur le cours <strong><strong>de</strong>s</strong> événements, <strong>et</strong> d’interpréter <strong>la</strong> supériorité du<br />

royaume <strong>de</strong> Tournai par celle <strong>de</strong> ses rois.<br />

Le premier <strong>de</strong> ceux-ci, Mérovée, a eu l’honneur <strong>de</strong> donner son nom à <strong>la</strong> dynastie<br />

royale <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs. Il y eut même un moment où le peuple tout entier portait,<br />

comme ses souverains, le nom <strong>de</strong> Mérovings, c’est-à-dire d’<strong>hommes</strong> <strong>de</strong><br />

Mérovée1. Pendant bien longtemps, dans les âges crépuscu<strong>la</strong>ires qui ouvrent<br />

l’histoire Mo<strong>de</strong>rne, les chants poétiques <strong><strong>de</strong>s</strong> Germains ont redit ce nom glorieux<br />

<strong>et</strong> redouté. Et pourtant nous ne savons rien du héros éponyme <strong>de</strong> <strong>la</strong> race<br />

franque. Il est pour nous bien plus inconnu que son père Clodion. Des <strong>de</strong>ux<br />

chroniqueurs qui nous perlent <strong>de</strong> lui, l’un se borne à le nommer, l’autre à<br />

raconter sur lui une légen<strong>de</strong> mythologique2. Nous ne parvenons pas même à<br />

<strong>de</strong>viner <strong>la</strong> raison qui a valu à son nom l’illustration refusée à sa mémoire, <strong>et</strong><br />

pourquoi le même homme est à <strong>la</strong> fois si célèbre <strong>et</strong> si inconnu. Dans le désespoir<br />

que leur cause le mutisme <strong>de</strong> <strong>la</strong> tradition, plusieurs historiens ont imaginé <strong>de</strong><br />

reléguer Mérovée lui-même parmi les fictions <strong>de</strong> l’imagination épique. Il aurait<br />

été simplement inventé pour rendre compte du nom <strong>de</strong> Mérovingien ; ou du<br />

moins, à supposer qu’il eût existé un, Mérovée, il faudrait reculer son existence<br />

au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> Clodion, dans le passé lointain où s’é<strong>la</strong>borent les légen<strong><strong>de</strong>s</strong><br />

nationales3.<br />

Ce scepticisme historique est exagéré. Il a existé un Mérovée, père <strong>de</strong> Childéric :<br />

on ne peut contester là-<strong><strong>de</strong>s</strong>sus le témoignage formel <strong>de</strong> Grégoire <strong>de</strong> Tours. Et ce<br />

Mérovée est bien, dans <strong>la</strong> pensée du vieil écrivain, le fils <strong>de</strong> Clodion. Ceux qui<br />

soutiennent le contraire tirent argument <strong>de</strong> <strong>la</strong> formule dubitative par <strong>la</strong>quelle le<br />

chroniqueur indique c<strong>et</strong>te filiation : Certains, dit-il, affirment que Mérovée était<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> race <strong>de</strong> Clodion. Mais Grégoire <strong>de</strong> Tours a l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> mentionner ses<br />

sources orales avec <strong><strong>de</strong>s</strong> réserves semb<strong>la</strong>bles, surtout lorsque, comme ici, elles<br />

contenaient <strong><strong>de</strong>s</strong> légen<strong><strong>de</strong>s</strong> mythologiques contre lesquelles protestait sa<br />

conscience d’évêque. S’il n’avait pas cédé à sa répugnance pour les récits <strong>de</strong> ce<br />

genre, il nous eût sans doute communiqué <strong>la</strong> fable franque sur l’origine <strong>de</strong><br />

Mérovée, qu’un chroniqueur postérieur, moins scrupuleux que lui, a reproduite<br />

en l’altérant quelque peu4. D’après c<strong>et</strong>te fable, un jour d’été que Clodion était<br />

assis sur le rivage <strong>de</strong> <strong>la</strong> mer avec sa femme, celle-ci voulut prendre un bain dans<br />

1 G. Kurth, Histoire poétique <strong><strong>de</strong>s</strong> Mérovingiens, p. 521.<br />

2 De hujus (sc. Chlodionis) stirpe quidam Merovechum regem fuisse adserunt cujus fuit<br />

filius Chil<strong>de</strong>ricus. Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 9. Pour le passage <strong>de</strong> Frédégaire auquel il est fait<br />

allusion, le voir ci-<strong><strong>de</strong>s</strong>sous.<br />

3 Cf. Histoire poétique <strong><strong>de</strong>s</strong> Mérovingiens, p. 153.<br />

4 C<strong>et</strong>te explication du <strong>la</strong>ngage <strong>de</strong> Grégoire <strong>de</strong> Tours, que j’ai développée plus<br />

longuement dans l’Histoire poétique <strong><strong>de</strong>s</strong> Mérovingiens, pp. 151-153, a été contestée. Il<br />

n’en a été que plus agréable pour moi <strong>de</strong> <strong>la</strong> trouver confirmée <strong>de</strong> tout point, <strong>de</strong>puis<br />

bientôt <strong>de</strong>ux siècles, dans le célèbre mémoire par lequel Frér<strong>et</strong> a renouvelé, en 1714,<br />

l’étu<strong>de</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> origines franques : Le récit que fait Frédégaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> fabuleuse tradition qui<br />

donnait pour père à Mérovée une divinité marine qui était <strong>de</strong>venue amoureuse <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

femme <strong>de</strong> Clodion en <strong>la</strong> voyant se baigner toute nue dans <strong>la</strong> mer, ce récit, dis-je, peut<br />

servir à expliquer Grégoire <strong>de</strong> Tours, qui se sera contenté d’indiquer les doutes que<br />

plusieurs personnes formaient sur <strong>la</strong> légitimité <strong>de</strong> Mérovée, <strong>et</strong> qui n’aura pas voulu<br />

s’engager dans un détail trop puéril, mais encore peu convenable à <strong>la</strong> pur<strong>et</strong>é <strong>de</strong> son<br />

caractère épiscopal, <strong>et</strong>c. (Frér<strong>et</strong>, Œuvres complètes, t. VI, p. 115.)

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