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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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était un poste <strong><strong>de</strong>s</strong> plus précieux à gar<strong>de</strong>r ou à conquérir. Écoutons le récit <strong>de</strong><br />

Grégoire <strong>de</strong> Tours :<br />

Du temps <strong>de</strong> Clovis, <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Nantes fut assiégée par les barbares. Déjà<br />

soixante jours s’étaient écoulés pour elle dans <strong>la</strong> détresse, lorsque au milieu <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> nuit apparurent aux habitants <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>hommes</strong> qui, vêtus <strong>de</strong> b<strong>la</strong>nc <strong>et</strong> tenant <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

cierges allumés, sortaient <strong>de</strong> <strong>la</strong> basilique <strong><strong>de</strong>s</strong> bienheureux martyrs Rogatien <strong>et</strong><br />

Donatien. En même temps, une autre procession, semb<strong>la</strong>ble à <strong>la</strong> première,<br />

sortait <strong>de</strong> <strong>la</strong> basilique du saint pontife Similien. Quand ces <strong>de</strong>ux processions se<br />

rencontrèrent, elles échangèrent <strong><strong>de</strong>s</strong> salutations <strong>et</strong> prièrent ensemble, puis<br />

chacune regagna le sanctuaire d’où elle était venue. Aussitôt toute l’armée<br />

ennemie se débanda, en proie à <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong> terreur. Lorsque vint le jour, elle<br />

avait entièrement disparu, <strong>et</strong> <strong>la</strong> ville était délivrée. Le miracle eut pour témoin un<br />

certain Chillon, qui était pour lors à <strong>la</strong> tête <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te armée. Il n’était pas encore<br />

régénéré par l’eau <strong>et</strong> par l’Esprit-Saint, mais, sans tar<strong>de</strong>r, il se convertit à Dieu<br />

dans <strong>la</strong> componction <strong>de</strong> son cœur, <strong>et</strong> né à une vie nouvelle, il proc<strong>la</strong>ma à haute<br />

voix que le Christ est le Fils du Dieu vivant1.<br />

Ainsi les Saxons étaient restés le fléau <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule, <strong>et</strong> l’on peut croire que s’ils<br />

avaient eu une base d’opération plus soli<strong>de</strong>, c’est-à-dire s’ils avaient gardé<br />

contact avec les masses profon<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Germanie, ils auraient disputé avec<br />

quelque chance <strong>de</strong> succès <strong>la</strong> domination <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule au peuple franc. Essayèrentils<br />

<strong>de</strong> lui résister lorsqu’ils virent apparaître les soldats <strong>de</strong> Clovis dans les vallées<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> Seine <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire ? Ou bien, reconnaissant dans les conquérants <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

frères, <strong>et</strong> heureux <strong>de</strong> se m<strong>et</strong>tre sous l’autorité d’un roi puissant <strong>de</strong> leur race,<br />

entrèrent-ils dans <strong>la</strong> nationalité franque au même titre <strong>et</strong> avec les mêmes droits<br />

que tous les autres peuples gallo-romains ou germaniques ? L’histoire ne nous en<br />

dit rien ; toutefois, si l’on peut s’en rapporter à quelques indices, il y a lieu <strong>de</strong><br />

croire à un accord pacifique bien plutôt qu’à un règlement <strong>de</strong> comptes par les<br />

armes. Les Saxons gardèrent fidèlement, pendant c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>, leurs usages <strong>et</strong><br />

leurs mœurs. Ceux du Bessin sont, <strong>de</strong> tous les groupes <strong>et</strong>hniques <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule<br />

franque, celui qui a le mieux conservé sa nationalité au sixième siècle, <strong>et</strong> encore<br />

au neuvième siècle, le <strong>pays</strong> qu’ils habitaient était désigné par leur nom2. Les<br />

traces si nombreuses que l’immigration barbare a <strong>la</strong>issées dans <strong>la</strong> Normandie<br />

doivent être en bonne partie attribuées aux Saxons, <strong>et</strong> les Normands, qui<br />

pénétrèrent dans ce <strong>pays</strong> au dixième siècle, n’ont fait qu’y ranimer une vitalité<br />

germanique alors sur le point <strong>de</strong> s’épuiser. Quant aux Saxons <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire, rien ne<br />

perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> supposer qu’ils aient été troublés dans <strong>la</strong> paisible possession <strong>de</strong> leurs<br />

1 Grégoire <strong>de</strong> Tours, Gloria martyrum, c. 59. Dans <strong>la</strong> première édition <strong>de</strong> ce livre, j’avais<br />

admis avec Ruinart, note à Grégoire <strong>de</strong> Tours, l. c., que Chillon était un Franc, ainsi que<br />

son armée. Après plus mûr examen, je me suis convaincu que c<strong>et</strong>te opinion n’est guère<br />

soutenable. Grégoire <strong>de</strong> Tours n’a pu penser à nous présenter <strong>la</strong> délivrance <strong>de</strong> Nantes du<br />

joug <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs comme un bonheur ; il était Franc lui-même, <strong>et</strong> très loyaliste, comme<br />

d’ailleurs tout le mon<strong>de</strong> au sixième siècle en Gaule. De plus, <strong>de</strong>vait-il considérer comme<br />

un miracle une délivrance qui n’en était pas une, puisqu’en fait Nantes tomba <strong>et</strong> resta<br />

sous l’autorité franque comme toute <strong>la</strong> Gaule ? Les termes mêmes employés, tempore<br />

regis Clodovechi, semblent bien indiquer que l’événement n’a avec Clovis qu’un rapport<br />

chronologique. Combien, au contraire, tout l’épiso<strong>de</strong> s’illumine vivement si l’on adm<strong>et</strong><br />

que les barbares qui essayent <strong>de</strong> prendre Nantes, mais qui en sont chassés<br />

miraculeusement, sont les Saxons du voisinage, les éternels ennemis ! Cf. Meillier, Essai<br />

sur l’histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> comtes <strong>de</strong> Nantes, publié par L. Maître, (Nantes. 1872, p.<br />

25), <strong>et</strong> Arth. <strong>de</strong> <strong>la</strong> Bor<strong>de</strong>rie, Histoire <strong>de</strong> Br<strong>et</strong>agne, t. I, p. 329.<br />

2 Otlingua Saxonia. Capitu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> 853.

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