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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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<strong>la</strong> mère d’un enfant admis dans son céleste royaume. La douleur <strong>de</strong> sa perte ne<br />

trouble pas mon âme ; sorti <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong> avec <strong>la</strong> robe b<strong>la</strong>nche <strong>de</strong> son innocence,<br />

il se nourrira <strong>de</strong> <strong>la</strong> vue <strong>de</strong> Dieu pendant toute l’éternité1.<br />

L’année suivante, un autre fils, Clodomir, vint consoler les jeunes époux <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

perte <strong>de</strong> leur aîné. Malgré <strong>la</strong> catastrophe <strong>de</strong> l’année précé<strong>de</strong>nte, le roi, par<br />

loyauté ou par tendresse, ne s’opposa point à ce que Clodomir fût baptisé aussi.<br />

Mais l’épreuve <strong>de</strong> Clotil<strong>de</strong> n’était pas terminée. Comme si tout se fût conjuré<br />

pour abattre le cœur <strong>de</strong> <strong>la</strong> courageuse chrétienne, l’enfant commença à <strong>la</strong>nguir<br />

peu après son baptême, <strong>et</strong> Clovis revint à ses raisons. Pouvait-il lui arriver autre<br />

chose qu’à son frère ? dit-il. Il a été baptisé au nom <strong>de</strong> votre Christ, il faut donc<br />

bien qu’il meure. C<strong>et</strong>te sinistre prédiction ne se réalisa point. La foi <strong>de</strong> Clotil<strong>de</strong><br />

triompha <strong>de</strong> <strong>la</strong> tentation, <strong>et</strong> le Ciel accorda <strong>la</strong> guérison <strong>de</strong> l’enfant à ses ferventes<br />

prières.<br />

Voilà, dans toute sa simplicité un peu naïve, c<strong>et</strong>te page <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie domestique <strong>de</strong><br />

Clovis <strong>et</strong> <strong>de</strong> Clotil<strong>de</strong>. C’est <strong>la</strong> seule que nos sources nous aient conservée, <strong>et</strong> il<br />

n’y en a pas dans toute l’histoire <strong><strong>de</strong>s</strong> Francs qui présente autant d’intérêt.<br />

Combien elle est touchante dans son rôle d’épouse <strong>et</strong> <strong>de</strong> mère, c<strong>et</strong>te jeune<br />

femme catholique p<strong>la</strong>cée auprès du roi barbare comme son ange gardien, <strong>et</strong> qui<br />

doit disputer son mari à l’idolâtrie <strong>et</strong> son enfant à son mari ! Elle n’a d’appui que<br />

son Dieu, mais son Dieu <strong>la</strong> passe au creus<strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> douleurs les plus amères ; il<br />

semble vouloir briser son cœur <strong>et</strong> confondre sa foi, sans qu’elle cesse <strong>de</strong> le<br />

glorifier au milieu <strong>de</strong> ses tribu<strong>la</strong>tions, jusqu’à ce qu’enfin tant <strong>de</strong> vertu obtienne<br />

sa récompense ! Telle est c<strong>et</strong>te âme sainte <strong>et</strong> douce qui, éprouvée <strong>et</strong> bénie tour<br />

à tour, a été choisie pour ouvrir au peuple franc les portes du royaume <strong>de</strong> Dieu.<br />

Arrière les ineptes légen<strong><strong>de</strong>s</strong> qui profanent <strong>la</strong> beauté sacrée <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te noble<br />

physionomie, <strong>et</strong> qui m<strong>et</strong>tent sur <strong>la</strong> figure sereine <strong>de</strong> <strong>la</strong> sainte les passions <strong>de</strong><br />

l’héroïne <strong>de</strong> roman !<br />

La mère était consolée : l’épouse continuait d’attendre avec patience <strong>et</strong> avec foi.<br />

Clovis résistait toujours aux instances <strong>de</strong> sa femme. Ceux qui dédaignent <strong>de</strong><br />

s’intéresser à <strong>la</strong> vie religieuse <strong><strong>de</strong>s</strong> personnages historiques, <strong>et</strong> qui croient pouvoir<br />

interpréter toutes leurs actions par les calculs <strong>de</strong> l’ambition <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’intérêt, se<br />

trouveront bien embarrassés pour rendre compte <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te attitu<strong>de</strong>. Les raisons<br />

d’ordre politique qui ont pu déci<strong>de</strong>r Clovis à se faire chrétien ont existé <strong>de</strong> tout<br />

temps : pourquoi donc a-t-il fallu <strong><strong>de</strong>s</strong> événements extraordinaires pour l’amener<br />

à une mesure si profitable à ses intérêts ? La réponse à c<strong>et</strong>te question est bien<br />

simple : Clovis n’avait pas <strong>la</strong> foi, <strong>et</strong> il n’entendait pas s’agenouiller aux pieds d’un<br />

Dieu auquel il ne croyait pas. Comme Théodoric le Grand, comme Gon<strong>de</strong>baud,<br />

qui auraient sauvé leur dynastie <strong>et</strong> assuré l’avenir <strong>de</strong> leurs peuples s’ils avaient<br />

embrassé à temps <strong>la</strong> religion catholique, Clovis restait en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> l’Église parce<br />

que l’Église n’était pas pour lui l’épouse du Dieu vivant, parce que, comme le lui<br />

fait dire l’historien, Jésus-Christ n’était pas pour lui un Dieu. C’était sa conscience<br />

qui refusait <strong>de</strong> se rendre à <strong>la</strong> vérité ; tant qu’elle n’était pas illuminée par <strong>la</strong><br />

grâce, Clovis restait plongé dans les ténèbres du paganisme.<br />

C<strong>et</strong>te situation n’aurait pu se prolonger sans donner les plus légitimes<br />

inquiétu<strong><strong>de</strong>s</strong> à Clotil<strong>de</strong>. L’arianisme, qui avait déjà fait tant <strong>de</strong> victimes dans <strong>la</strong><br />

famille <strong>de</strong> son père, venait <strong>de</strong> pénétrer dans celle <strong>de</strong> son mari. Le mariage<br />

d’Aldoflè<strong>de</strong> avec l’arien Théodoric avait été précédé <strong>de</strong> <strong>la</strong> conversion <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />

princesse au christianisme ; peut-être <strong><strong>de</strong>s</strong> prêtres ariens étaient-ils venus <strong>la</strong><br />

1 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 29.

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