27.06.2013 Views

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Ce qui a valu à Clodion une p<strong>la</strong>ce dans les annales du mon<strong>de</strong> naissant, c’est qu’il<br />

a su profiter <strong><strong>de</strong>s</strong> circonstances qui s’offraient à lui. Le moment était propice pour<br />

qui savait oser. Il n’y avait plus d’Empire. L’autorité <strong>de</strong> Rome n’arrivait plus<br />

même jusqu’à <strong>la</strong> Loire : elle s’usait à disputer fiévreusement le midi <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule<br />

aux Visigoths <strong>et</strong> aux Burgon<strong><strong>de</strong>s</strong>. Quant au nord, on l’avait abandonné. La<br />

préfecture du prétoire <strong><strong>de</strong>s</strong> Gaules avait reculé d’un coup jusqu’à Arles, <strong>et</strong> l’on ne<br />

sait s’il restait encore dans le <strong>pays</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> magistrats supérieurs recevant<br />

directement les ordres du préf<strong>et</strong>1. Les Francs al<strong>la</strong>ient-ils <strong>la</strong>isser au premier venu<br />

les belles contrées, désormais sans maître, pour <strong>la</strong> possession <strong><strong>de</strong>s</strong>quelles ils<br />

versaient leur sang <strong>de</strong>puis <strong><strong>de</strong>s</strong> siècles ? Ils avaient sans doute <strong><strong>de</strong>s</strong> traités avec<br />

l’Empire, mais envers qui ces traités pouvaient-ils encore les obliger ? D’ailleurs,<br />

ils n’étaient pas <strong>hommes</strong> à se <strong>la</strong>isser arrêter par <strong>la</strong> foi jurée, à en croire<br />

l’unanimité <strong><strong>de</strong>s</strong> écrivains romains : <strong>la</strong> perfidie franque était passée en proverbe<br />

au cinquième siècle. Il ne fal<strong>la</strong>it pas s’attendre à les voir rester à <strong>la</strong> frontière,<br />

l’arme au bras, gardant pour le compte d’un maître disparu l’opulent héritage<br />

qu’ils avaient si longtemps convoité. C’est en transportant leurs foyers <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

marécages <strong>de</strong> <strong>la</strong> F<strong>la</strong>ndre dans les fertiles contrées <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule qu’ils pouvaient<br />

<strong>de</strong>venir un grand peuple. Sur l’Escaut, ils appartenaient au passé barbare ; sur <strong>la</strong><br />

Seine, ils <strong>de</strong>venaient les ouvriers <strong>de</strong> l’avenir.<br />

L’intérêt <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> Clodion est dans <strong>la</strong> promptitu<strong>de</strong> <strong>et</strong> dans l’énergie avec<br />

lesquelles il a répondu à l’appel <strong>de</strong> <strong>la</strong> fortune. A vrai dire, il ne dut pas avoir<br />

grand’peine à entraîner son peuple à sa suite. Les Francs étaient toujours prêts<br />

aux aventures, <strong>et</strong> ne se p<strong>la</strong>ignaient que du repos. Or, il y avait longtemps qu’ils<br />

n’avaient plus été à <strong>la</strong> fête <strong><strong>de</strong>s</strong> épées, <strong>et</strong> leurs <strong>de</strong>rniers combats, livrés<br />

péniblement contre <strong><strong>de</strong>s</strong> agresseurs <strong>de</strong> même nation, ne leur avaient valu ni<br />

triomphe ni butin. Il dut y avoir <strong><strong>de</strong>s</strong> c<strong>la</strong>meurs <strong>de</strong> joie <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> bruits <strong>de</strong> boucliers<br />

entrechoqués dans l’assemblée où le roi, conformément à <strong>la</strong> coutume, vint<br />

proposer à ses guerriers une expédition en terre romaine. Car <strong>la</strong> terre romaine,<br />

<strong>la</strong> terre <strong><strong>de</strong>s</strong> belles cultures <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong> riches cités, ne cessait d’être <strong>la</strong> tentation du<br />

barbare relégué sur un sol pauvre <strong>et</strong> dans une nature inculte. Toujours ses désirs<br />

<strong>et</strong> ses rêves le portaient vers le sud, où le ciel plus clément faisait tomber en<br />

abondance dans <strong>la</strong> main <strong>de</strong> l’agriculteur les fruits qu’il fal<strong>la</strong>it arracher au sol <strong>de</strong><br />

sa patrie.. C’est là, <strong>de</strong>rrière les murailles <strong><strong>de</strong>s</strong> vieilles villes opulentes, qu’on<br />

trouverait l’or rouge <strong>et</strong> <strong>la</strong> riche vaisselle que les habitants, il est vrai, enterraient<br />

à l’approche <strong><strong>de</strong>s</strong> barbares, mais qu’on saurait bien les forcer à rendre.<br />

L’expédition, sans nul doute, fut décidée d’enthousiasme.<br />

Tel est le triste état <strong>de</strong> l’historiographie <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te époque, que nous ne savons<br />

qu’à vingt ans près <strong>la</strong> date <strong>de</strong> l’expédition conquérante <strong>de</strong> Clodion. Tout ce qu’on<br />

peut affirmer, c’est qu’elle se p<strong>la</strong>ce entre 431 <strong>et</strong> 451. Les historiens hésitent<br />

entre ces <strong>de</strong>ux termes extrêmes : les premiers adm<strong>et</strong>tent 431, en se fondant sur<br />

un passage d’Idacius qui p<strong>la</strong>ce en c<strong>et</strong>te année une expédition d’Aétius contre les<br />

Francs2 ; les autres penchent pour 445 ou une année postérieure, parce que<br />

1 Peut-on adm<strong>et</strong>tre avec Pétigny, Étu<strong><strong>de</strong>s</strong>, I, p. 356, que le Julius d’Autun, mentionné<br />

dans <strong>la</strong> vie <strong>de</strong> saint Germain d’Auxerre (Acta Sanct., 31 juill<strong>et</strong>, t. VII, p. 202 D) avec les<br />

titres <strong>de</strong> reipublicæ rector, <strong>et</strong> <strong>de</strong> gubernator Galliæ, <strong>et</strong> quelques lignes plus bas avec<br />

celui <strong>de</strong> præfectus, soit réellement un magistrat chargé du gouvernement <strong>de</strong> toute <strong>la</strong><br />

Gaule au nord <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire ? La question mérite d’être posée ; elle n’est pas résolue.<br />

2 A<strong>et</strong>ius a fait sa première guerre contre les Francs en 428 ; il leur reprit les contrées<br />

voisines du Rhin : c’est donc avec les Ripuaires qu’il se trouva aux prises (Cassiodori<br />

Chronicon, éd. Mommsen, p. 652 ; Prosper Aquitanus ; Jordanès, c. 84). Une <strong>de</strong>uxième

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!