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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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emplirent <strong>la</strong> mission <strong>de</strong> l’État, que l’État ne remplissait plus. Partout où l’on peut<br />

j<strong>et</strong>er un regard sur leur activité, on les voit non seulement bâtir <strong><strong>de</strong>s</strong> églises <strong>et</strong><br />

enseigner les fidèles, mais organiser <strong>la</strong> charité, prési<strong>de</strong>r aux travaux publics,<br />

veiller à l’hygiène, se faire les protecteurs <strong>de</strong> leurs ouailles menacées, monter<br />

sur les murailles à l’heure où il s’agit <strong>de</strong> mourir1. Ce que <strong>la</strong> papauté fut pour <strong>la</strong><br />

ville <strong>de</strong> Rome menacée par les Lombards <strong>et</strong> abandonnée par les empereurs, les<br />

évêques <strong>de</strong> Gaule l’ont été pour leurs villes, non moins menacées <strong>et</strong> non moins<br />

abandonnées. L’histoire ne nous l’a pas dit, puisque en somme l’histoire ne dit<br />

plus rien ; mais ce<strong>la</strong> ressort <strong>de</strong> tous les faits, qui resteraient inexplicables<br />

autrement.<br />

Comment, dans ce <strong>pays</strong> <strong>de</strong> gouvernement, épiscopal, l’autorité <strong>de</strong> Clovis va-telle<br />

s’imp<strong>la</strong>nter ? Est-ce au moyen <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre, ou bien par <strong>la</strong> voie <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

négociations pacifiques ? Y a-t-il eu conquête, ou y a-t-il eu accord ? Encore une<br />

fois, nos annalistes gaulois sont mu<strong>et</strong>s. Mais on pense bien que le fils <strong>de</strong><br />

Childéric, né lui-même dans c<strong>et</strong>te Gaule centrale où son père a <strong>la</strong>issé <strong>de</strong> bons<br />

souvenirs, n’y est pas le premier venu. Il est puissant, il est irrésistible, il n’est<br />

pas l’ennemi <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion, il est bienveil<strong>la</strong>nt ; comment ne l’aurait-on pas reçu ?<br />

Un écrivain étranger, presque contemporain, Procope, qui se trompe<br />

naturellement sur les détails locaux, mais qui décrit avec n<strong>et</strong>t<strong>et</strong>é les situations<br />

générales, prononce ici une parole révé<strong>la</strong>trice : Les Francs, dit-il, ne pouvant<br />

avoir raison <strong><strong>de</strong>s</strong> Armoriques par <strong>la</strong> force, leur proposèrent l’alliance <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

mariages réciproques. Les Armoriques — c’est le nom sous lequel c<strong>et</strong> auteur<br />

désigne les popu<strong>la</strong>tions <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule occi<strong>de</strong>ntale — acceptèrent c<strong>et</strong>te proposition,<br />

car les <strong>de</strong>ux peuples étaient chrétiens, <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> sorte ils n’en formèrent plus<br />

qu’un seul <strong>et</strong> acquirent une gran<strong>de</strong> puissance2. Voilà le grand fait dans toute sa<br />

portée : un pacte d’égalité qui unit les Romains <strong>et</strong> les Francs, <strong>et</strong> bientôt après, <strong>la</strong><br />

conversion <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>rniers aidant, une parfaite fusion <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong>ux peuples, qui mêlent<br />

leur sang <strong>et</strong> leur nom dans une nationalité nouvelle.<br />

On a voulu contester le témoignage <strong>de</strong> Procope, <strong>et</strong> l’on a cru trouver, dans<br />

certaines inexactitu<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong> auteur, <strong>la</strong> preuve qu’il n’y a pas lieu d’y ajouter foi.<br />

Rien <strong>de</strong> plus contraire à une bonne métho<strong>de</strong> historique. Qu’on refuse <strong>de</strong> s’en<br />

rapporter à lui chaque fois qu’il s’agit <strong>de</strong> choses locales, difficiles à connaître pour<br />

qui ne les a vues <strong>de</strong> ses yeux, ou n’y a été mêlé en personne, c’est parfait. Mais<br />

soutenir que c<strong>et</strong> historien remarquable, qui est venu en Italie, qui a été en<br />

rapport avec les Francs, dont l’attention était en éveil sur <strong>la</strong> situation politique<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> barbares, <strong>et</strong> qui avait d’ailleurs le plus grand intérêt à étudier le peuple <strong>de</strong><br />

Clovis, n’ait pu connaître le fait le plus général <strong>et</strong> le plus fécond <strong>de</strong> sa carrière,<br />

ou qu’il l’ait inventé <strong>de</strong> toutes pièces sans ombre <strong>de</strong> vraisemb<strong>la</strong>nce, voilà une<br />

prétention qui doit être repoussée énergiquement.<br />

A supposer d’ailleurs que le témoignage <strong>de</strong> Procope n’existât point, les faits sont<br />

là, qui déposent avec une éloquence plus convaincante que <strong>la</strong> sienne. C<strong>et</strong>te<br />

parfaite égalité qu’il dit avoir existé en vertu d’un pacte entre les indigènes <strong>et</strong> les<br />

conquérants, nous savons qu’elle a existé en eff<strong>et</strong>, <strong>et</strong> ce<strong>la</strong> dès le premier jour <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> conquête franque. Ou, pour mieux dire, — car le mot d’égalité suppose<br />

l’existence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux êtres distincts, — il n’y avait plus aucune distinction, au<br />

moment où écrivit Procope, entre les uns <strong>et</strong> les autres : les <strong>de</strong>ux peuples<br />

s’étaient fondus en un seul, dont tous les membres revendiquaient avec le même<br />

1 Hauck, Kirchengeschichte Deutsch<strong>la</strong>nds, t. I, pp. 125-126.<br />

2 Procope, De bello gothico, I, XII, p. 63 (Bonn).

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