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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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légen<strong><strong>de</strong>s</strong> formé autour <strong>de</strong> son nom atteste <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>rité dont ce confesseur a joui<br />

<strong>de</strong> son vivant auprès <strong><strong>de</strong>s</strong> fidèles <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule1.<br />

Ajoutons ici une réserve importante. Ce serait une erreur <strong>de</strong> se figurer <strong>la</strong> Gaule<br />

septentrionale comme totalement chrétienne. Au quatrième siècle, le<br />

christianisme y occupait <strong>la</strong> même situation qu’y avait eue <strong>la</strong> civilisation romaine<br />

au <strong>de</strong>uxième <strong>et</strong> au troisième. Il possédait les villes <strong>et</strong> leurs environs immédiats, il<br />

rayonnait plus ou moins dans les bourga<strong><strong>de</strong>s</strong>, il n’avait pénétré que faiblement<br />

dans les campagnes. Au cœur <strong>de</strong> <strong>la</strong> France, il y avait <strong><strong>de</strong>s</strong> régions entières où<br />

personne n’avait encore reçu le baptême2. Les sanctuaires païens s’élevaient<br />

partout, ombragés <strong>de</strong> vieux arbres <strong>et</strong> <strong><strong>de</strong>s</strong>servis par <strong><strong>de</strong>s</strong> prêtres qui vivaient du<br />

culte proscrit3. Les popu<strong>la</strong>tions rurales continuaient <strong>de</strong> porter les statues <strong>de</strong> leurs<br />

dieux en procession à travers les champs, enveloppées <strong>de</strong> voiles b<strong>la</strong>ncs4 ; les<br />

<strong>la</strong>cs sacrés recevaient toujours leurs habituelles offran<strong><strong>de</strong>s</strong>, <strong>et</strong> les multiples lois<br />

rendues par les empereurs contre les sacrifices idolâtriques étaient restées l<strong>et</strong>tre<br />

morte. Si <strong>de</strong> tels spectacles nous sont donnés par <strong><strong>de</strong>s</strong> régions centrales comme<br />

le Berry <strong>et</strong> <strong>la</strong> Bourgogne, combien ne -<strong>de</strong>vait-on pas rencontrer d’éléments<br />

païens dans les solitu<strong><strong>de</strong>s</strong> incultes <strong>de</strong> l’Ar<strong>de</strong>nne <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Campine, <strong>et</strong> dans tous ces<br />

cantons dépeuplés où l’Empire n’avait ramené un peu <strong>de</strong> vie qu’en y versant <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

multitu<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong> barbares ? Étrangers à <strong>la</strong> civilisation romaine, ces nouveaux colons<br />

l’étaient plus encore à sa religion, <strong>et</strong> leur paganisme germanique rivalisait avec<br />

celui <strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>pays</strong>ans indigènes pour fermer <strong>la</strong> porte à <strong>la</strong> doctrine du Christ. Il restait<br />

donc un immense champ d’action pour les évêques <strong>et</strong> pour les missionnaires. Il<br />

est bien probable qu’ils y ont prodigué leur activité, mais l’histoire n’a pas<br />

conservé le souvenir <strong>de</strong> leurs méritoires <strong>la</strong>beurs ; elle a en quelque sorte noyé<br />

leur mémoire <strong>et</strong> leurs œuvres dans le rayonnement prodigieux d’un nom qui<br />

résume pour <strong>la</strong> Gaule toutes les gloires <strong>de</strong> l’aposto<strong>la</strong>t <strong>et</strong> toutes les austérités <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> vie monastique. Ce nom, c’est celui du grand thaumaturge saint Martin <strong>de</strong><br />

Tours.<br />

Martin était ce soldat venu <strong>de</strong> Pannonie, dont tout l’Occi<strong>de</strong>nt connaissait le nom,<br />

<strong>de</strong>puis l’héroïque inspiration <strong>de</strong> <strong>la</strong> charité qui lui avait fait partager son manteau<br />

en plein hiver avec un pauvre, aux portes <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville d’Amiens. Avi<strong>de</strong> d’une gloire<br />

plus haute <strong>et</strong> plus pure que celle <strong><strong>de</strong>s</strong> armes, il avait échangé le service <strong>de</strong><br />

l’empereur contre celui <strong>de</strong> Jésus-Christ, <strong>et</strong> il était venu se faire, à Poitiers, le<br />

disciple <strong>de</strong> saint Hi<strong>la</strong>ire, le plus illustre pontife <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule. La première <strong>de</strong> ses<br />

œuvres, ce fut <strong>la</strong> fondation du ministère <strong>de</strong> Ligugé près <strong>de</strong> Poitiers, qui a fait <strong>de</strong><br />

lui l’initiateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie monastique en Gaule <strong>et</strong> le patriarche <strong><strong>de</strong>s</strong> moines<br />

d’Occi<strong>de</strong>nt avant saint Benoît. Appelé quelques années après au siège épiscopal<br />

<strong>de</strong> Tours, Martin resta un moine sous les habits du pontife ; il combina en sa<br />

personne <strong>de</strong>ux caractères qui, aux yeux <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> chrétiens, passaient<br />

alors pour opposés, presque pour contradictoires. Le monastère <strong>de</strong> Marmoutier,<br />

fondé par lui dans le voisinage <strong>de</strong> sa ville épiscopale, resta son séjour <strong>de</strong><br />

prédilection ; il y accorda à <strong>la</strong> vie monastique tous les instants qu’il put dérober<br />

aux absorbantes fonctions <strong>de</strong> l’épiscopat. La vie <strong>de</strong> c<strong>et</strong> homme étonnant, écrite<br />

par son disciple Sulpice Sévère, est un tissu <strong>de</strong> miracles qui ont eu, comme ceux<br />

<strong>de</strong> saint Bernard, le privilège d’être racontés par <strong><strong>de</strong>s</strong> contemporains. Lui même<br />

1 Grégoire <strong>de</strong> Tours, II, 5, <strong>et</strong> Gloria confessorum, c. 71.<br />

2 Ante Martinum pauci admodum, immo pæne nulli in illis regionibus Christi nomen<br />

receperant. Sulpice Sévère, Vita sancti Martini, c. 13.<br />

3 Id., ibid., c. 13 <strong>et</strong> 14.<br />

4 Id., ibid., c. 14.

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