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clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée

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<strong>de</strong>rnière <strong>de</strong>meure <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te triste victime <strong><strong>de</strong>s</strong> mariages politiques1. Mais <strong>la</strong> France<br />

<strong>de</strong>vait plus tard venger cruellement sur Brunehaut les griefs <strong>de</strong> Clotil<strong>de</strong>.<br />

Toute <strong>la</strong> tendresse <strong>de</strong> <strong>la</strong> mère éplorée se reporta sur ses p<strong>et</strong>its-fils, lès orphelins<br />

<strong>de</strong> Clodomir. Ils étaient le lien qui rattachait à <strong>la</strong> vie c<strong>et</strong>te âme sur <strong>la</strong>quelle<br />

l’infortune semb<strong>la</strong>it s’acharner ; ils furent, sans le savoir, <strong>la</strong> cause <strong>de</strong> ses<br />

suprêmes douleurs. Son fils Chil<strong>de</strong>bert s’émut <strong>de</strong> l’affection dont elle les<br />

entourait. Prévoyant que, quand ils auraient grandi, elle voudrait les faire<br />

couronner, <strong>et</strong> qu’alors leurs oncles seraient mis en <strong>de</strong>meure <strong>de</strong> leur restituer leur<br />

royaume, il s’aboucha avec Clotaire, qu’il manda à Paris. Là, il y eut entre les<br />

<strong>de</strong>ux frères un colloque sinistre dans lequel fut décidée <strong>la</strong> mort <strong><strong>de</strong>s</strong> malheureux<br />

enfants.<br />

Pendant ce temps, ils faisaient courir <strong>la</strong> rumeur que leur entrevue avait pour but<br />

d’élever leurs neveux sur le trône. Puis, ne craignant pas <strong>de</strong> se jouer <strong>de</strong> leur<br />

mère, ils lui mandèrent <strong>de</strong> leur rem<strong>et</strong>tre ses p<strong>et</strong>its-fils, parce qu’ils avaient<br />

l’intention <strong>de</strong> les faire proc<strong>la</strong>mer rois. Clotil<strong>de</strong>, remplie d’allégresse, fit venir les<br />

enfants, leur donna à boire <strong>et</strong> à manger, puis se sépara d’eux en leur disant :<br />

Il me semblera que je n’ai pas perdu mon fils, lorsque je vous verrai prendre sa<br />

p<strong>la</strong>ce.<br />

Les enfants partirent joyeux : ils al<strong>la</strong>ient à <strong>la</strong> mort. A peine arrivés au pa<strong>la</strong>is <strong>de</strong><br />

Chil<strong>de</strong>bert, qui se trouvait dans <strong>la</strong> Cité, ils furent brutalement séquestrés <strong>et</strong><br />

séparés <strong>de</strong> leur suite. Peu <strong>de</strong> temps après, Clotil<strong>de</strong> voyait arriver chez elle un<br />

grand seigneur clermontois attaché à <strong>la</strong> personne du roi <strong>de</strong> Paris ; c’était<br />

Arcadius, p<strong>et</strong>it-fils <strong>de</strong> Sidoine Apollinaire <strong>et</strong> arrière-p<strong>et</strong>it-fils <strong>de</strong> l’empereur Avitus.<br />

Ce fier patricien, transformé en val<strong>et</strong> <strong>de</strong> bourreau, portait d’une main <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

ciseaux <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’autre une épée nue.<br />

Je suis chargé par les rois, dit-il à Clotil<strong>de</strong>, <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ce qu’il faut faire<br />

<strong>de</strong> vos p<strong>et</strong>its-enfants : les tondre ou les m<strong>et</strong>tre à mort ?<br />

Folle <strong>de</strong> douleur <strong>et</strong> d’épouvante, <strong>et</strong> ne sachant ce qu’elle disait, <strong>la</strong> malheureuse<br />

femme <strong>la</strong>issa échapper dans son délire ces paroles irréfléchies :<br />

J’aime mieux les voir morts que tondus.<br />

Arcadius ne lui <strong>la</strong>issa pas le temps <strong>de</strong> reprendre ce propos ; il courut dire aux<br />

<strong>de</strong>ux rois que Clotil<strong>de</strong> consentait à <strong>la</strong> mort <strong>de</strong> ses p<strong>et</strong>its-fils. Alors se passa dans<br />

le pa<strong>la</strong>is <strong>de</strong> Chil<strong>de</strong>bert une <strong><strong>de</strong>s</strong> scènes les plus déchirantes dont l’histoire ait<br />

gardé le souvenir. Les malheureux enfants <strong>de</strong> Clodomir, à l’expression <strong>de</strong><br />

physionomie <strong>de</strong> leurs oncles, aux armes qu’ils brandissaient, <strong>de</strong>vinent le sort<br />

dont ils sont menacés ; ils courent à travers <strong>la</strong> chambre pour échapper aux<br />

royaux assassins, mais Clotaire, empoignant l’aîné par le bras, lui plonge le<br />

couteau dans le f<strong>la</strong>nc. Pendant que l’enfant agonise, son cad<strong>et</strong> se j<strong>et</strong>te aux<br />

genoux <strong>de</strong> Chil<strong>de</strong>bert, qui, épouvanté du drame monstrueux qu’il a mis en scène,<br />

s’attendrit sur l’innocente victime <strong>et</strong> supplie son frère <strong>de</strong> l’épargner. Mais Clotaire<br />

a respiré l’o<strong>de</strong>ur du sang, il a maintenant l’ivresse du meurtre ; il s’emporte,<br />

reproche à l’autre sa lâch<strong>et</strong>é, menace <strong>de</strong> le frapper lui-même s’il prétend m<strong>et</strong>tre<br />

obstacle à l’exécution du proj<strong>et</strong> commun. Alors Chil<strong>de</strong>bert mollit ; il repousse<br />

l’enfant qui s’était j<strong>et</strong>é dans ses bras <strong>et</strong> l’abandonne aux mains homici<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>de</strong><br />

Clotaire, qui lui fait subir le même sort qu’à son aîné. Après quoi, par un inutile<br />

raffinement <strong>de</strong> cruauté, le gouverneur <strong>et</strong> toute <strong>la</strong> suite <strong><strong>de</strong>s</strong> enfants royaux furent<br />

1 Grégoire <strong>de</strong> Tours, III, 10.

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