clovis - L'Histoire antique des pays et des hommes de la Méditerranée
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désignation même <strong>de</strong>vint superflue le jour où tolu les <strong>hommes</strong> libres, quelle que<br />
fût leur nationalité, jouirent sous le sceptre <strong>de</strong> Clovis d’une parfaite égalité <strong>de</strong><br />
droits. Aussi ne <strong>la</strong> verra-t-on plus employée par les auteurs contemporains, qui<br />
n’ont pour tous, Romains ou barbares, que l’appel<strong>la</strong>tion générique <strong>de</strong> Francs.<br />
Outre ces groupes épars, trop faibles pour échapper à l’absorption même s’ils<br />
l’avaient voulu, l’Entre-Seine-<strong>et</strong>-Loire contenait <strong>de</strong>ux autres peuples plus<br />
compacts, plus nombreux, <strong>et</strong> qu’il n’était pas si facile <strong>de</strong> priver <strong>de</strong> leur<br />
indépendance. C’étaient les Saxons <strong>et</strong> les Br<strong>et</strong>ons. Les uns <strong>et</strong> les autres<br />
constituaient <strong>de</strong> vraies nationalités fort distinctes <strong><strong>de</strong>s</strong> Gallo-romains, avec<br />
lesquels ils n’avaient rien <strong>de</strong> commun que <strong>la</strong> participation au même sol. Quelles<br />
furent les re<strong>la</strong>tions <strong>de</strong> Clovis avec eux ?<br />
Les Saxons étaient répandus tout le long du littoral <strong>de</strong> <strong>la</strong> Manche, <strong>de</strong>puis <strong>la</strong><br />
Belgique jusqu’aux confins <strong>de</strong> <strong>la</strong> Br<strong>et</strong>agne ; au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te presqu’île, ils<br />
occupaient encore les rivages <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire à son embouchure. Toutes ces régions<br />
portaient dès le premier siècle, dans les documents <strong>de</strong> l’Empire, le nom <strong>de</strong><br />
Rivage saxonique. Nous distinguons sur c<strong>et</strong>te vaste étendue trois groupes <strong>de</strong> ces<br />
barbares. Le premier était formé par les colonies saxonnes établies en grand<br />
nombre dans le Boulonnais <strong>et</strong> aux abords du Pas-<strong>de</strong>-Ca<strong>la</strong>is : ils avaient été<br />
incorporés dans le royaume franc, selon toute apparence, dès le temps <strong>de</strong><br />
Clodion. Un second groupe, plus considérable, occupait le Bessin <strong>et</strong> avait pour<br />
centres les villes <strong>de</strong> Bayeux <strong>et</strong> <strong>de</strong> Coutances. Ici, les Saxons étaient tellement<br />
nombreux qu’ils semblent avoir formé <strong>la</strong> majorité <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion1. Encore à <strong>la</strong><br />
fin du sixième siècle, nous voyons qu’ils ont conservé leurs caractères nationaux<br />
<strong>et</strong> qu’ils forment comme une enc<strong>la</strong>ve germanique au milieu du royaume franc.<br />
Chose remarquable, ils avaient dans une certaine mesure germanisé les<br />
popu<strong>la</strong>tions romaines au milieu <strong><strong>de</strong>s</strong>quelles ils vivaient ; du moins est-ce parmi le<br />
clergé <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te région que nous rencontrons les plus anciens noms<br />
germaniques2.<br />
Un troisième groupe <strong>de</strong> Saxons était établi, dès l’époque romaine, à<br />
l’embouchure <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire, sur <strong>la</strong> rive gauche <strong>de</strong> ce fleuve <strong>et</strong> dans les îles qui<br />
forment l’archipel <strong>de</strong> son <strong>la</strong>rge estuaire. C’est celui-ci qui a le plus souvent fait<br />
parler <strong>de</strong> lui dans l’histoire : il a été <strong>la</strong> terreur <strong>de</strong> toutes les popu<strong>la</strong>tions <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
Basse-Loire. On a vu les combats acharnés que leur ont livrés les <strong>de</strong>rniers<br />
comtes romains, assistés <strong>de</strong> Childéric, leur assaut sur Angers, leur défaite, <strong>la</strong><br />
chasse que les Romains leur donnèrent dans leurs îles. Ces revers ne les avaient<br />
pas domptés. Quelques années après — c’était dans les commencements du<br />
règne <strong>de</strong> Clovis — ils menaçaient <strong>de</strong> nouveau <strong>la</strong> ville <strong>de</strong> Nantes. Nantes était un<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> centres du commerce gaulois ; elle ne le cédait qu’à Marseille <strong>et</strong> à Bor<strong>de</strong>aux.<br />
De plus, par l’importance <strong>de</strong> sa position stratégique, qui comman<strong>de</strong> le cours<br />
inférieur <strong>de</strong> <strong>la</strong> Loire <strong>et</strong> qui ferme aux vaisseaux <strong>la</strong> porte <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gaule centrale, elle<br />
1 Sur les Saxons <strong>de</strong> Bayeux (Baiocassini Saxones) v. Grégoire <strong>de</strong> Tours, Hist. Franc., V,<br />
26 ; X, 9.<br />
2 Voici les plus anciens noms germaniques portés en Gaule par <strong><strong>de</strong>s</strong> évêques ; je les<br />
relève sur les listes <strong><strong>de</strong>s</strong> signatures <strong><strong>de</strong>s</strong> conciles du temps, <strong>et</strong> l’on verra qu’ils sont tous<br />
portés par <strong><strong>de</strong>s</strong> évêques ou <strong><strong>de</strong>s</strong> prêtres du Littus Saxonicum : 511. Gildardus, évêque <strong>de</strong><br />
Rouen, <strong>et</strong> Littardus, évêque <strong>de</strong> Séez ; 538, Lauto, évêque <strong>de</strong> Coutances, Theudobaudis,<br />
évêque <strong>de</strong> Lisieux, Baudastes, prêtre délégué par l’évêque d’Avranches ; 541, Scupilio,<br />
prêtre délégué <strong>de</strong> Coutances <strong>et</strong> Baudardus, prêtre délégué d’Avranches. C’est seulement<br />
à partir <strong>de</strong> 549 que les listes conciliaires nous offrent <strong><strong>de</strong>s</strong> noms germaniques portés par<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> prêtres qui appartiennent à d’autres diocèses que <strong>la</strong> Normandie.